Avec un tel pedigree et au vu d’une critique élogieuse de la réédition de son bouquin Le cher disparu écrit en 1948, je n’ai pas hésité à me jeter dans sa lecture. Ma déception n’en a été que plus grande. Mais revenons d’abord sur le sujet du roman.
Nous sommes dans le Hollywood des années 40 au cœur d’une communauté Anglaise qui tâche d’y faire bonne figure et représenter son pays dignement, « Il ne faut pas d’Anglais pauvre qui traîne à Hollywood ». Le jeune Dennis Barlow se voit charger de l’enterrement de Francis Hinsley, son ami, qui vient de se suicider après avoir appris son licenciement. Dennis travaille, pour gagner sa vie, dans une entreprise de pompes funèbres animalière, les obsèques de son ami l’amènent à fréquenter une entreprise de pompes funèbres plus traditionnelle, mais gérée à l’américaine. C’est ce « gérée à l’américaine » qui est sensé donner tout le sel à ce roman.
Evelyn Waugh y trouve matière à se rire des travers de la civilisation moderne. Que tout le livre repose sur les rites funéraires était assez audacieux, qu’il nous en décrive tous les aspects poussés à leurs limites les plus extravagantes dans les moindres détails pouvait certainement choquer et faire son effet à l’époque où le livre a été écrit, mais de nos jours, la fiction elle-même dépassée par la réalité nous a habitué à pire et/ou à plus amusant. Tout le côté incongru du propos de l’auteur paraît bien banal, ou déjà lu ou vu ailleurs, maintenant. Je reconnais que c’est assez injuste pour l’écrivain, il était pionnier mais ne lisant son ouvrage que maintenant, j’ai été très déçu.
Je devine que ce livre a été féroce et drôle, doté d’un certain humour noir, mais à notre époque il est dépassé et s’il est dépassé c’est qu’il ne doit pas être aussi bon que cherche à nous le faire penser le texte au dos du bouquin. Heureusement le roman est court. Quant à Evelyn Waugh, il faut très certainement l’aborder par un autre opus que celui-ci.
« -Alors là, vous êtes injuste, Aimée. Je suis atterré de m’apercevoir que vous avez cru ça. C’est moi qui devrais être déçu d’avoir eu la sottise d’être amoureux de quelqu’un d’aussi ignorant que vous, d’une jeune fille à qui les trésors les plus célèbres de la littérature sont inconnus. Mais je fais la part des choses. Vous avez des standards culturels différents de ceux auxquels je suis habitué. Vous êtes sans aucun doute plus versée que moi dans les sciences et dans l’instruction civique. Mais dans le monde en train de mourir d’où je viens, la manie des citations est un vice national. Personne n’aurait l’idée de faire un discours dans un banquet sans citer un poème. Autrefois, c’était du latin ; maintenant, ce sont des vers anglais. Les députés du parti libéral, à la Chambre des Communes, citent tout le temps Shelley : les tories et les socialistes ne se lèvent pas pour se plaindre d’être déçus quand ils découvrent que ces fleurs de rhétorique ne sont pas originales. Ils préfèrent rester tranquilles et faire semblant de l’avoir toujours su. »