En plein débat sur les retraites, le gouvernement a fait contre mauvaise fortune bon coeur. Passant par perte et profit la progression du chômage en août dernier, Laurent Wauquiez a insisté sur la hausse du taux d'emploi des seniors. Une réussite du gouvernement selon le secrétaire d'Etat à l'emploi. Sauf que, il y a un petit effet d'optique.
En revanche, Laurent Wauquiez, reprenant le compte-rendu du Conseil des ministres du mercredi 24 septembre, a préféré
s’attarder sur un indicateur particulier : le taux d’emploi des seniors. Selon le secrétaire d’Etat, la proportion de salariés âgés de 55 à 60 ans est passée de 54,6% en 2007 à 60%
aujourd’hui. Un record. Comment expliquer un tel mouvement ? Et surtout son ampleur ? D’autant que dans le même temps les chiffres du chômage pour cette catégorie de salariés ne montre eux
aucun signe positif, comme cela devraient être le cas : ces personnes demeurent plus longtemps que les autres hors de l’emploi, et leur nombre a cru sensiblement comme le relève sur son blog Marc Landré.
Mais le paradoxe n’est que de surface. Un chômeur est en effet comptabilisé comme un actif pour peu que celui-ci ne soit pas dispensé de rechercher un emploi. Et justement, Laurent Wauquiez rappelle utilement que le gouvernement a mis fin à l’automaticité de cette mesure pour les chômeurs âgés de plus de 58,5 ans. Ce qui, au passage, n’a pas empêché leur nombre de croître de près de 30% en un an, ainsi que le montre notre tableau. En fait, tout se passe comme si le gouvernement, à l’approche du débat sur la réforme des retraites, avait voulu absolument voir augmenter cette statistique, si politique qu'est le taux d'activité des 55-59 ans, quitte à ce que celle du chômage en pâtisse. Arbitrage d'autant plus simple qu'avec la crise, la hausse du chômage était inéluctable.
Pour que sa démonstration fonctionne, il fallait nécessairement insister sur le fait que les entreprises ne sont pas réticentes à conserver leurs salariés âgés, rompant ainsi avec une longue tradition. Comment en effet vendre une mesure de report de l’âge de la retraite à 62 ans quand, comme le relevaient les critiques de cette mesure, il est de plus en plus difficile de conserver un emploi pour les seniors ? La hausse du taux d’emploi permet donc au gouvernement de valider la thèse selon laquelle on peut encore être actif à 55-59 ans et donc au-delà. Mais être actif ne signifie pas être dans l’emploi comme le montre la hausse du taux de chômage de cette catégorie.
Emmanuel Lévy- Marianne