Grandiose ! Quel roman ! J'ai a-do-ré ! C'est sombre, baigné dans les contes de fées, les vrais, ceux qui sont sans espoir, qui font pleurer, saigner et trembler de peur. C'est magique, car envoûtant. Un charme fatal. Quasi immédiat, car les premières pages sont un peu teintées de brume. La suite se laisse dévorer, d'une traite. C'est radical. Fascinant !
Deux frères, Jacob et Will Reckless, ont traversé le miroir que cachait leur père dans son bureau. Ce miroir ouvre vers un autre monde, un monde en guerre, entre les chairs molles (les humains) et les Goyls (des créatures de pierre). Ces derniers sont redoutables, un coup de griffe vous transforme en pierre, comme cela a été le cas pour Will. Il souffre, est en train de se métamorphoser et son frère Jacob veut le sauver. Or, la Fée Sombre a rêvé de lui - du Goyl en jade. Le roi a envoyé ses meilleures troupes pour le trouver, la course contre la montre est entamée.
C'est sur ce rythme trépidant que la lecture s'enchaîne, dans un univers proche du conte, où la féérie, mielleuse et sentimentale, n'a pas lieu d'être. Les références sont nombreuses, détournées, et c'est un régal. Les émotions sont fortes, Jacob et Will sont unis mais la malédiction est en train de les séparer, de plus la jolie fiancée de l'un est en train de faire perdre la tête de l'autre, ou est-ce simplement sous l'effet de l'eau d'alouette ? Ils sont aidés dans leur tâche par Fox, leur amie-renarde, et par Valiant, un nain redoutable, fourbe et menteur, seul l'appât du gain compte à ses yeux. Des personnalités aussi belles et excentriques servent une intrigue délicate mais efficace. Ce qui rend cette oeuvre saisissante et scotchante, c'est l'aura qui s'en dégage, la force narrative et le pouvoir d'imagination de Cornelia Fune, c'est brillant, complètement exaltant, c'est aussi assez désespéré et poignant, mais c'est pour ça qu'on en redemande !
Gallimard jeunesse (2010) - 330 pages - 15€
imaginé et raconté par Cornelia Funke et Lionel Wigram
illustrations intérieures de Cornelia Funke
Traduit de l'allemand par Marie-Claude Auger