Dix personnes disent la difficulté de vivre dans ce quartier de Nice qui porte le nom d’Ariane. On dit « l’Ariane », un quotidien de misère, de violence, d’abandon. Des visages dont on se souvient, comme celui d’Andrée à la voix rauque, des gestes fragiles, comme ceux de Gh’zala, gestes de danseuse qui porte ses enfants « au-devant d’elle », les souvenirs de monsieur M’Boup, qui récite un poème ou un extrait du Cid, appris à l’école au Sénégal où il est né. Et d’autres, hommes ou femmes, dont elle témoigne en s’engageant elle-même dans le quartier, découvrant le « carré des fusillés » près de la rivière et réinventant, au contact des vivants, l’histoire d’Ariane et de Thésée.
Maryline Desbiolles brasse dans ce recueil l’Histoire et les histoires, et se souvient, avec la dixième voix qu’elle nous fait entendre, « des feuilles de marronnier auxquelles on aurait enlevé la chair verte pour qu’apparaissent les arêtes. J’aime bien cette occupation minutieuse, l’épluchage des feuilles de marronnier et l’apparition des poissons ».