Accord UE / Corée du Sud : le Parlement européen n’a pas dit son dernier mot !

Alors que les dirigeants wallons et flamands « se tiennent par la barbichette » et s’irritent mutuellement de ne pouvoir mettre un terme à ce jeu des nerfs, la Présidence belge de l’Union européenne peut s’enorgueillir d’avoir relancé la machine commerciale européenne en panne depuis 2002. Après avoir accordé des garanties à l’industrie automobile italienne, le Conseil européen des affaires étrangères a en effet autorisé, jeudi 16 septembre, la signature de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Corée du Sud.

Il s’agit d’un accord extrêmement ambitieux qui touche à tout et qui prévoit l’annulation de tous droits de douanes sur de très nombreux produits. Cet accord va renforcer le positionnement de l’Union en Asie, mais surtout il va accroître la confiance des négociateurs européens et leur crédibilité vis-à-vis des partenaires commerciaux. Il devrait par ailleurs servir de référentiel aux accords futurs. C’est donc bien une nouvelle dynamique qui s’insuffle dans la politique commerciale de l’UE.

Au demeurant, cet accord arrive à point nommé comme un gage – certes tardif – de réussite de la politique commerciale actuelle, et il est fort à parier que la Commission européenne ne change en rien sa stratégie commerciale alors qu’une réflexion sur les nouvelles orientations est en cours. A quoi bon changer une politique qui marche ?

Si l’accord a été relativement simple dans sa négociation, l’Union européenne est soumise à un véritable parcours du combattant pour apposer le sceau final. L’exercice n’est pas simple entre des traductions dans les 23 langues officielles de l’Union et un Parlement qui fait le jeu des lobbyistes et surpondère les intérêts sectoriels.

Il est dans l’intention des dirigeants européens de signer effectivement l’accord lors du sommet UE – Corée du Sud, le 6 octobre prochain, lorsque les deux parties essaieront d’aller plus loin et d’envisager un partenariat stratégique en se coordonnant sur quelques sujets globaux.

Pour “faire la nique” aux Etats-Unis, il faut encore que les Européens réussissent là où les Américains ont échoué. En effet, si les Américains ont été plus prompts à signer un accord avec la Corée en 2007, ils n’ont pu le ratifier faute d’approbation du Congrès. L’Europe devrait donc tirer la leçon et ne pas négliger le « droit de veto » du Parlement européen.

Elle ne saurait faire fi du calendrier du Parlement européen sans s’exposer à des réprimandes lourdes de conséquences. Le Parlement se montre particulièrement susceptible quand il s’agit de pouvoir exercer ses nouveaux droits conférés par le Traité de Lisbonne, et il est prêt à se défendre becs et ongles. L’Union européenne l’a déjà appris à ses dépens et ne devrait pas tenter un nouveau passage en force.

On se souvient que le Parlement européen, marri de n’avoir été informé des négociations de l’accord SWIFT avec les États-Unis (sur le transfert vers les États-Unis des données sur les transactions interbancaires en Europe), s’est amèrement vengé en rejetant l’accord. La fronde fut efficace puisqu’il est désormais impliqué dans les nouvelles négociations. De la même manière, le Parlement européen tape du poing dans le cadre de l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) et se heurte à une Commission européenne qui lui oppose vainement la confidentialité des négociations.

En conséquence, attendons avant de nous réjouir de cet accord ; la prudence est mère de sûreté. Pour autant, l’oisiveté n’est pas de mise et il appartient aux défenseurs de cet accord de le faire savoir au Parlement européen où les secteurs de l’automobile et du textile feront valoir leurs intérêts. A bon entendeur…