Avertissement : Je jure devant Ste Lison que ce billet est véridique et porte sur une vérité vraie et véritable, même si incroyable !!!
C’était mardi dernier, il est 8h13, je dors, toujours dans ma clinique. Mon rêve : Millénium 7. Je suis Lisbeth Salander, rien que ça ! Je cours dans les feuilles d’un sous bois. Soudain, une forte douleur au ventre, insoutenable. Je viens de me prendre une balle. Je m’effondre, reste immobile et fais la morte…Puis quelqu’un arrive et là je dis : « Je suis Lisbeth Salander, et je ne suis pas encore morte ».
8h14
Passage à la réalité : les guitares d’Indochine résonnent partout. Ca, c’est mon téléphone portable. Qui peut m’appeler ? J’ai bien précisé à mon entourage qu’à la clinique, je ne voulais aucun coup de fil ni visite. Alors qui, entre SFR, Bouygues ou le CIC a décidé de me vendre ce matin un abonnement qui me fera économiser des centaines d’Euros que je ne dépense même pas chez eux ? Qui vais-je trucider ce matin ?!!! Et pourtant, je réponds d’une voix endormie.
Réalité :
- Allo
- Allo, Géraldine ? Géraldine B ?
- Euh oui… (pas d’accent, une voix claire et posée même si intimidée. Ce n’est donc pas SFR). Reste Bouygues Télécom ou le CIC…
- Bonjour, c’est Amélie Nothomb.
- Amélie Nothomb ?!!! (comment n’y avais-je pas pensé !!!, Amélie Nothomb, mon auteur préférée, j’ai lu 16 de ces 18 livres. Le 18ème, je m’apprête à le lire. Et le premier, je le garde en réserve, au cas où un jour, Amélie Nothomb arrêterait d’écrire. Il y a de nombreux artistes que j’adore et que j’admire. Amélie en fait partie mais en plus, elle jouit de ma totale fascination tant pour ce qu’elle fait que pour ce qu’elle est : car tout chez elle est hors norme !)
- Oui, Amélie Nothomb, l’écrivain. Je vous réveille ?
- Euh, oui, non, un peu, je ne sais pas. Il faut juste que je réalise…
- J’ai reçu votre lettre dans laquelle vous me demandez une interview pour votre blog, je vous appelle donc pour répondre à vos questions.
J’ai envoyé ma lettre la semaine dernière (avec mes dix questions au dos de la feuille). Et comme chaque année, Amélie Nothomb est l’une des auteurs phares de cette rentrée littéraire. On la voit partout, on la lit partout, le monde entier la sollicite …. Et elle m’appelle moi !!!! (J’ai toujours rêvé de cet autre monde !)
Nous discutons. Qu’avons-nous dit ? Je ne sais plus et ce dont je me souviens ne vous regarde pas !!! Mais la terre s’est arrêtée de tourner pendant 3, 5, 10 mn ??? Je l’ignore. Ce qui est certain, c’est que si à la fin de l’année, la Terre termine son ellipse en retard de quelques minutes, Messieurs les scientifiques, ne cherchez pas de raison dans les bouleversements climatiques ou autres… C’est juste un bouleversement très personnel !
Ensuite, comme convenu, je raccroche mon téléphone et l’éteins. Amélie me rappellera 5 fois pour déposer ses réponses sur ma messagerie, me laissant ainsi le loisir de les recopier et d’en garder aussi un souvenir impérissable !
Alors, comme je suis très généreuse, je vais donc partager ce « questions/réponses » exclusif et exceptionnel avec vous ! Mais juste avant, je vous laisse répondre en votre âme et conscience à l’équation « probabilitique » suivante.
Sachant qu’Amélie Nothomb a publié 18 livres. Sachant que si j’ôte 18 à mon âge, je retrouve mes vingt ans. Sachant 3a² + 1/3 bc ( x – xy)= c+d-y(a+b)-2
Quel événement avait la plus forte probabilité de se réaliser :
- Qu’entre 20 et 38 ans, parmi les centaines, voire les milliers de personnes rencontrées, croisées, aperçues, je rencontre THE MAN of my life ?
- Qu’Amélie Nothomb m’appelle en ce mardi 21 septembre 2010 à 08H15 ?
Cela paraît évident… Comme quoi, il faut toujours se méfier des probabilités. De toute façon, que ce soit du côté clair ou obscur, ma vie tend plus vers l’improbable que vers l’infini !
Allez, je n’abuse pas plus longtemps de votre patience, voici l’interview :
Un auteur doit-il être cultivé ?
AN : Non, vraiment pas. La culture ne nuit pas forcément à un auteur, elle peut même l’aider. Mais ce n’est absolument pas indispensable. Je dirais même que la culture peut certainement être une gêne si elle encombre trop l’auteur.
Vous êtes une constante dans la rentrée littéraire depuis presque 20 ans. De votre observatoire, distinguez- vous une évolution au fil des ans ? Un retour en force de la littérature ? Dans les médias peut-être ?
AN : Mon dieu ! Je n’ai pas constaté de retour en force de la littérature, ni d’ailleurs l’inverse ! Je dois dire que « bravo à la France », car moi qui vient de Belgique, je suis assez frappée par la place que la France octroie à la littérature dans les médias. En Belgique, c’est tout de même moins frappant. Donc j’observe, mais j’ai peut-être tord, mais j’observe une certaine constance dans la place prépondérante que les médias français offrent à la littérature.
Le 21ème siècle est-il bien parti pour être plus littéraire que le 20ème ?
AN : Oh là, je pense que nous manquons vraiment beaucoup de recul pour le dire. En tout cas il est parti pour être au moins aussi littéraire, cela me paraît certain. Et certainement aussi d’une autre façon. Je ne pense pas qu’on puisse espérer avoir au 21ème un Proust comme nous en avons eu au 20èmesiècle. Mais sans doute d’autres écrivains, différents et j’espère aussi intéressants.
A l’époque de la médiatisation, un auteur muet pourrait-il réussir ?
AN : Oui, je le crois vraiment. D’autant plus qu’il y a des médias où la parole n’est pas utile. Je n’y connais strictement rien à internet, mais je crois savoir que sur internet, on peut aussi s’exprimer d’une autre façon que par la parole. Donc je pense qu’un auteur muet pourrait réussir. Je pense aussi que dans certaines émissions de télévision, certains auteurs qui parlent très peu, je pense à Patrick Modiano parle très peu dans les médias: il passe très bien à la télévision parce qu’il a des regards très intéressants. Donc oui, je crois qu’un auteur muet peut réussir aujourd’hui.
Plus de 700 livres publiés lors de cette rentrée littéraire. Démentiel ou non ?
Je ne trouve pas cela démentiel. Je crois qu’il devrait y avoir de la place pour autant d’auteurs. C’est vrai que ce qui est un peu dommage aujourd’hui, c’est que les gens se diversifient de moins en moins. On a tendance à lire un peu tous les mêmes livres mais je ne vois pas de raison pour que cette tendance demeure. Ce serait très bien qu’on aille de plus en plus vers les livres moins connus. Là, vous êtes consciente Géraldine que je prêche contre ma chapelle puisque je suis un petit peu une élue des lecteurs et cela me touche beaucoup. Mais je trouve que ce serait bien aussi de s’intéresser à des auteurs moins connus. Je suis persuadée qu’il peut y avoir place pour autant d’auteurs chez les libraires, comme dans le coeur des lecteurs.
Une rentrée littéraire sans le Nothomb est-ce concevable pour vous ?
AN : Mais oui absolument, c’est certainement quelque chose qui se produira un jour !
Que craignez vous le plus : le manque d’idées ou de ne pas trouver les mots justes pour décrire ces idées ?
AN : Je crains beaucoup ces deux écueils qui sont dangereux et angoissants pour un auteur. Je ne sais pas vous dire lequel je crains le plus.
vous parlez de la place de l’écriture dans votre vie, mais quelle est celle de la lecture ?
AN : Ô mon Dieu, une place encore plus grande ! Je suis absolument boulimique de lecture. Je peux passer des heures et des heures par jour à lire, encore plus qu’à écrire. Surtout quand je suis en vacances. Je peux lire huit heures par jour, et même plus. C’est sans limite ! J’aime follement lire ! Bien sûr, surtout des romans, mais pas seulement !
Tout le monde vous parle de votre lever. Moi c’est le coucher qui m’intéresse. A quelle heure vous couchez vous pour vous lever si tôt? Et, après votre fameux 4 à 8h, vous recouchez vous ?
AN : Je me couche généralement à minuit. Ce qui fait que j’ai des nuits assez courtes et que je suis fatiguée Géraldine ! Et comme vous pouvez le constater, je ne me recouche pas, je n’en ai pas le temps, je passe ensuite au courrier des lecteurs.
10/ Quels sont vos 3 derniers coups de cœur littéraires ?
AN : Le premier est de cette rentrée littéraire ci, justement, on parlait des livres moins connus, il s’agit de l’un d’eux. C’est une jeune femme qui s’appelle Stéphanie HOCHET qui publie « la distribution des lumières » son formidable roman chez Flammarion. Je suis cette auteure depuis ses commencements en 2001. Tous ses romans sont extraordinaires. Je la recommande chaleureusement.
Sinon, je recommande aussi le roman de Virginie Despente. Mais là, je ne suis pas la seule. Elle a beaucoup de succès cette rentrée. Apocalypse bébé, publié aux Editions Grasset.
Et bien sûr, je recommande toujours les livres mon chéri Japonais, le romancier Haruki Murakami… Tous ses livres sont formidables. « Kafka sur le rivage » vient de sortir en poche.
Voilà Géraldine, très belle vie et bonne journée.
C’était Amélie Nothomb pour Géraldine B !
Un million de mercis Amélie ! Et là, je constate et regrette les limites de « mon média » internet. Malgré toute la ponctuation à ma disposition, impossible de retranscrire l’intonation et la musicalité des paroles d’Amélie Nothomb. Et vous remarquerez que durant cette interview, il n'a été nullment question du dernier livre d'Amélie Nothomb, "Une forme de vie". Amélie Nothom n'a rien vendu auprès de moi, elle a juste donné !
En tout cas, l’adage (plus poétique de dire le slogan publicitaire), « le bonheur, c’est simple comme un coup de fil », se vérifie parfaitement ici !