Très poétique, ce premier roman est ambitieux dans sa construction. Le thème général est classique : le mal être d’un jeune homme préférant se réfugier dans la fantasmagorie plutôt que dans la triste matérialité du présent et de l’avenir qui s’offre à lui. Mais Pierre Ducrozet n’hésite à bousculer le lecteur avec une narration très éclatée, passant d’une situation à l’autre, d’un lieu à l’autre sans transition. Il faut parfois s’accrocher pour trouver le fil conducteur. C’est clairement une volonté délibérée de l’auteur. Quelque part, il est dans la provocation : « qui m’aime me suive ! ». Les autres, tant pis pour eux, ils resteront sur le bord de la route. Le risque majeur est là. Avec un tel onirisme, le coté déstructuré du texte embarque le lecteur ou pas. J’avoue que certains passages, trop évanescents, trop vaporeux, m’ont laissés de marbre. Il ne m’étonnerait pas que les avis soient très tranchés : en gros, on adore ou on abandonne la lecture !
L’écriture de Pierre Ducrozet, sous ses airs nonchalants, est à l’évidence très travaillée. Jamais il ne se laisse aller à un lyrisme exacerbé. Lorsque les élans lyriques surgissent, ils sont très vite contenus, et c’est tant mieux.
Au final me reste une impression mitigée. Il n’empêche, ce premier roman contient de belles promesses pour l’avenir. Et je serais sans doute partant si ce jeune auteur à la chance de publier un jour un second roman.
Requiem pour Lola rouge, de Pierre Ducrozet, Grasset, 2010. 174 pages. 17 euros.
L’info en plus : Pierre Ducrozet a publié en 2009 un album pour enfants intitulé : Les clefs du zoo. L’histoire d’une petite fille qui se voit confier la garde d’un zoo par son grand-père. L’ouvrage est accompagné d’un CD-audio reprenant le texte lu par Romane Bohringer.