Principe de Lucifer
Cerveau Global
Le Génie de la Bête
GLOBAL BRAIN
Introduction
Le cerveau global est le deuxième opus traduit de l’américain Howard Bloom, sorti en France sous le titre Le principe de Lucifer 2. L’auteur qualifie lui-même son œuvre comme La grande Théorie Unifiée de toutes les choses de l’Univers y compris de l’âme humaine (sic). Pour synthétiser les deux premiers livres il s’agit de la première théorie pan-science du monde, de la vie, et d’une complexification croissante : exceptionnellement la physique fondamentale, la paléontologie, l’anthropologie, la sociologie, la biologie, la génétique, les théories évolutionnistes, la sociobiologie, l’éthologie, l’histoire, la psychologie, la neuro-biologie et j’en passe ne sont plus des domaines d’étude séparés d’une tentative de compréhension du monde mais forment un tout cohérent.
L’auteur, propagation du livre
Avant d’aller plus loin sur ce livre, quelques remarques/critiques : Howard Bloom citoyen américain neo-darwiniste (au parcours atypique) est un véritable guru de la communication, d’ailleurs je pense qu’il pourrait aisément fonder une secte. Son livre dans un objectif de communication au plus grand nombre est écrit de manière passionnante et (trop ?) convaincante comme un roman avec de nombreuses et judicieuses analogies afin de permettre au lecteur non scientifique de l’aborder, bien que son raisonnement lui ne repose pas sur ces éléments. Et finalement le livre est paru en France au Jardin des Livres, ce qui lui vaut une exposition dans des rayons « ésotériques »…
Alors comment donc ce livre réussit-il à se vendre malgré le silence des médias à son sujet et un classement dans les librairies inadéquat qui l’éloigne de son lectorat cible ? (le livre devrait se situer dans le rayon sociologie). Et bien cela se résume à l’effet virus, le fameux bouche à oreille fait son œuvre (nous ne sommes pas encore dans un phénomène Harry Potter !), même certaines personnes à sa lecture en achètent plusieurs exemplaires car il est impensable que leurs amis ne l’aient pas lu. Depuis longtemps un livre de réflexion touche le grand public et suscite débat entre ses lecteurs. Et sans vouloir trop en faire l’apologie, à défaut de rien il y a désormais au moins la théorie de Bloom. En contact permanent avec des chercheurs à la pointe dans différents secteurs de recherche, Bloom a réussi à assimiler des connaissances pointues dans de nombreux domaines et à élaborer une théorie générale. Depuis la sémantique générale de Korzybski (Science and Sanity 1933, jamais traduit en français) il s’agit d’une révolution scientifique qui mettra certainement du temps à faire son chemin. Car dans les sociétés agissent deux forces contraires : le principe de conformité et les agents de diversité, et sans trop se tromper on peut dire qu’à notre époque d’incertitude le bon vieux réflexe Spartiate fait son œuvre de conformité
Quelles forces insoupçonnées agissent ? ?
Global Brain est la suite du Principe de Lucifer : premier opus et réflexion sur la vie, de son apparition à maintenant. Le seul gagnant des luttes inter-espèces est mère nature ! le titre vient bien sûr de Milton (Paradise Lost) et est un pied de nez : d’une part se cachent en nous des forces auto-destructrices, d’autre part nous sommes amenés à une compétition pour la survie, la tragédie est un combat qui oppose deux forces, deux forces du bien, dans lequel une seule peut triompher.
Ce livre est un immense voyage qui vous mène à travers l’histoire de la vie, la vie, et l’histoire (à noter des passages très instructifs sur l’apparition de plusieurs religions). Maintenant même si on ne retient pas tout son dense raisonnement certains éléments s’échappent du lot. Le biologiste Richard Dawkins (cf Selfish Gene, traduit en français : le gène égoïste) défini
le gène comme une molécule réplicante faisant des copies d’elle même
Dans la complexification du monde est apparu d’autres outils que Dawkins par analogie a dénommé mèmes (par rapport à gènes) :
le mème est un réplicateur immatériel qui se duplique dans la soupe immatérielle des esprits.
Bref une idée, une chanson, une idée politique, la vision d’un aspect du monde, le principe de Lucifer sont des mèmes. Ces mèmes ont une place capitale dans la complexification du système dans lequel nous vivons, si le corps est le véhicule généralement des gènes, les mèmes manœuvrent les groupes sociaux. La méthode utilisée par la nature pour tester les outils auto-réplicants est la compétition, et quant aux mèmes ces conflits mènent à obtenir une place dans l’ordre de préséance (ou hiérarchie de dominance), ordre qui s’établit, entre individus, groupes et nations. Cet ordre n’est pas une vue de l’esprit : la préséance ajuste le style de vie, les chances de survie, la vie sexuelle et la physiologie. D’autre part les règles n’ont pas été déterminées de manière absolue et atemporelle : à chaque étape de l’histoire de la vie au cours de laquelle naît une unité auto-réplicante, les règles de fonctionnement de la sélection naturelle changent du tout au tout.
Modèle d’une société auto-organisée
Même si à sa lecture j’ai trouvé le Principe de Lucifer exceptionnel, à la lecture de Global Brain, il ne semble plus qu’un préambule à une théorie plus vaste. Global Brain traite donc du cerveau global (d’une espèce, et inter-espèces, une explication scientifique et plus vaste de ce que C.G. Jung avait pressenti avec sa noosphère) : avec l’émergence des nouvelles technologies de l’information beaucoup de journalistes et écrivains délirent (c’est peu dire) sur l’évolution de la vie et l’émergence d’une nouvelle conscience etc… ce que nous apprend Bloom c’est que les bactéries sont dotées d’un cerveau collectif global et ce depuis l’ère précambrienne !! ce fameux nouveau partage de l’information est au final vieux comme le monde et au cœur de l’évolution!
Le schéma qui se dégage de ce deuxième opus est la définition des systèmes adaptatifs complexes (qui englobent des théories plus connues comme celles des systèmes auto-organisés surtout étudiés par les chercheurs de la théorie du chaos en biologie et les chercheurs en intelligence artificielle).
Les Systèmes adaptatifs complexes sont composés des différents éléments suivants :
1- agents de conformité
2- générateurs de diversité
3- juges internes : des éléments propres à chaque unité qui soit le récompensent, soit active des process autodestructeurs (comme l’inhibition du système immunitaire)
4- distributeurs de ressources : systèmes sociaux, émotions collectives (Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas, on ôtera même ce qu’il a. in Bible)
5- tournois intergroupes : compétition entre groupes subculturels d’une même ville, compétition entre villes d’un même pays, entre pays, et entre espèces
Conclusion partielle
Les conclusions peuvent être une remise en cause de la vision du monde propre au lecteur ou au contraire une théorie de quelque chose que l’on a toujours pressenti mais de manière diffuse et intangible. Même si indirectement certaines conclusions paraissent douloureuses, voire gênantes par rapport à la vision du monde de chacun, il est évident que savoir c’est pouvoir, c’est uniquement en comprenant les forces qui sont à l’œuvre que l’on réussira à changer le monde et sortir enfin des cycles traditionnels de l’histoire. Bref à une époque où l’obscurantisme pointe son museau partout cette démarche est une véritable bouffée d’oxygène. Il appartient à chaque personne de s’interroger, de forger son opinion, et aussi à chacun le pouvoir de changer le monde. Je vous encourage à essayer de le lire en même temps que des amis pour pouvoir en discuter.
Concernant l’impact de ce livre, on pourrait le comparer au Matin des magiciens du début du XXIème siècle, sauf que ce n’est pas une vaste blague… J’ai eu l’occasion de croiser des esprits plus que brillants, au niveau mondial : scientifiques, artistes, penseurs, créateur de multinationales… Je n’ai jamais croisé Howard Bloom mais c’est de loin l’auteur qui m’a le plus marqué, et dont la vie même est intéressante, je vous invite à lire la bio sur son site, pour comprendre comment il a débuté dans l’industrie du spectacle (society’s myth-making machinery) et comment booster par l’adrénaline au sommet de la gloire, il s’est posé des questions que peu se posent :
In the music and film industry everyone knew that money and career advancement were on the line. But few realized how deeply what they did affected the lives of millions, and even fewer felt the responsibility that demands. It was an amazing privilege to work as an equal with the entertainment industry’s elite, many of whom I either had to woo or thwart to help my clients reach their audience with a message of genuine value. Some executives were master strategists but used their intelligence to increase their own stature, often at a brutal cost to others. Others were far more ethical. Yet even the best-intentioned employed boardroom and backroom tactics handed down from the politics of chimpanzees. Without knowing it, they used tricks of leadership we share with social animals from lizards and lobsters to baboons and mountain apes.
Concernant son dernier ouvrage, il me semble effectivement qu’il est temps de remettre de l’âme dans la machine qu’est notre société, tout en évitant de sombrer sous les assauts de sombres idéologies ou religions
Extrait du draft :
our material goods can elevate our dreams. And our dreams can carve out new realities. That’s a basic message of this book. It’s one of the secrets powering economies. It’s at the very heart of reinventing capitalism. But not all dreams are equal. Some that offer liberty and justice are killers in disguise. Wrong ideas can kill. So it’s time to add more accurate ideas to the toolkit of Western mind.