La population africaine qui vit avec moins de un dollar par jour a été réduite substantiellement ces dernières années. Le bien-être du continent oublié augmente grâce à la croissance du revenu par habitant.
En ce qui concerne les pays du Tiers-monde, spécialement en Afrique, le continent le plus affecté par la pauvreté, des organismes internationaux comme le Programme alimentaire mondial prévenaient que le nombre de pauvres dans le monde serait désormais plus haut que jamais. Cependant tous ne sont pas d’accord avec cette vision négative sur les pays les plus pauvres, mettant en question les calculs du Programme alimentaire mondial, et faisant ressortir la croissance des pays en voie de développement des décennies précédentes. Parmi ceux-ci on trouve deux économistes, Maxim Pinkovskiy et Xavier Sala i Martín, qui semblent apporter un peu d’espoir. De fait, habitués que nous sommes aux mauvaises nouvelles concernant l’Afrique, leur étude intitulée « La pauvreté diminue en Afrique… Plus vite que vous le pensez ! » apporte une bouffée d’air frais.
Dans cet article, et dans la lignée qui est la sienne depuis plusieurs années, Sala i Martín passe sous le feu de la critique nombre d’idées préconçues que nous avons au sujet du continent africain et de son développement économique. Pour Sala i Martín l’idée selon laquelle la pauvreté ne diminuerait pas en Afrique est simplement fausse. Ce message optimiste au sujet des pays les plus pauvres et ceux en voie de développement – dans un contexte de globalisation et de liberté économique – n’est pas neuf chez cet économiste et rejoint d’autres de ses travaux précédents. Une de ses études les plus diffusées dans les universités et les médias (« La distribution mondiale des revenus : diminution de la pauvreté et période de convergence ») traitait de la distribution des revenus au niveau mondial et montrait déjà comment entre 1970 et 2000 la pauvreté et l’inégalité économique s’étaient significativement réduites, rejetant ainsi le lieu commun qui voudrait que les riches soient chaque fois plus riches et les pauvres plus pauvres. Dans d’autres articles, il avait également déjà pointé le fait qu’entre 1995 et 2007, les taux de croissance en Afrique étaient restés positifs – chose jamais vue jusqu’alors – et que la pauvreté avait baissé de 46% en 1995 à 37% en 2007, concluant que l’Afrique réunissait les conditions pour sortir du puits de la misère, tout en rappelant les obstacles, comme la fragilité politique ou la situation internationale.
Dans la nouvelle étude, qui vient d’être publiée par le prestigieux National Bureau of Economic Research (NBER), Pinkovskiy et Sala i Martín réalisent donc une étude empirique des indicateurs socio-économiques africains disponibles. Des principales conclusions de l’étude, on retiendra la réduction substantielle de la pauvreté – qui concerne la population vivant avec moins de 1 dollar par jour – et les augmentations des indices de développement humain dans le continent africain grâce à l’augmentation du revenu par habitant. Comme on peut le voir sur le graphique suivant, le taux de pauvreté en Afrique a chuté de 10 points après 1995, un chiffre remarquable, même si inférieur à celui atteint en Asie.
Reflétant le fait que les idées préconçues sont souvent erronées, ces chiffres contredisent d’autres études ainsi que la vision classique de la situation africaine véhiculée par les médias ou certains « people » comme Bono, U2 ou Angelina Jolie ou les nouvelles diffusées par des organismes internationaux ou ONG – souvent intéressés à dépeindre de manière négative la situation – qui ne tiennent pas compte des développements positifs observés et qui proposent un modèle de développement économique fondé sur l’aide internationale qui a montré sa complète inefficacité depuis des décennies.
Mais en plus des données fournies par ces deux économistes, il existe d’autres raisons d’être confiant dans l’avenir des Africains, même si avec prudence. Une de celles-ci se trouve dans les parcours de ces Africains qui malgré les obstacles et grâce à leurs efforts, leur ténacité et leur créativité vont de l’avant et contribuent à créer la richesse, d’abord pour eux, ensuite pour leur entourage, œuvrant ainsi à la mise en place d’un environnement favorable à la coopération et à l’intégration sociale. Parmi les obstacles rencontrés, on rencontre le plus souvent les barrières légales et les tracasseries réglementaires que doivent affronter ces personnes qui désirent démarrer leurs affaires ou leur commerce, afin de bénéficier des fruits de leur labeur.
C’est pour cette raison que le contexte institutionnel est la base même de la croissance – fruit de l’investissement productif – lorsqu’il favorise, en défendant et protégeant les droits de propriété, la recherche du bénéfice légitime sur le marché, en satisfaisant les besoins des gens plutôt que la traque désespérée des rentes et autres privilèges étatiques. Chose que l’on peut observer, par exemple, dans l’éducation. Bien que cela puisse paraître incroyable, les Africains – à l’instar des Chinois ou des Indiens – créent leurs propres écoles privées pour pallier à l’échec de l’enseignement public. Les résultats sont encourageants et augurent d’une révolution éducative silencieuse. Depuis l’Occident, il n’est pas facile de comprendre précisément ce qui se passe en Afrique, et encore mois de discerner l’évolution au fil de temps. Néanmoins, comme le montre Alwyn Young dans son étude « Le miracle de la croissance africaine » il semble bien que l’Afrique se trouve ne meilleure situation que nous le pensons, même s’il convient de ne pas sous-estimer les tragédies qui frappent ce continent oublié.