Localisation du département de Bokin dans la province du Passoré
Je viens de rentrer de Bokin après 48 heures passées auprès de l’équipe de Sahel Solidarité (SASO). Bokin est le chef-lieu de la commune portant le même nom. Il est situé à 130 km environ au nord-ouest de Ouagadougou la capitale du BURKINA FASO.
A mon arrivé le 23 septembre 2010, Bokin était en pleine effervescence. Pour cause, la population préparait la célébration du »Pakoodé » une fête coutumière annuelle qui devait se tenir le lendemain (vendredi 24 septembre). J’ai voulu savoir ce qu’est le PAKOODE pour partager avec vous. Et voilà ce que j’ai appris d’un natif résident de la localité :
Mais, c’est quoi « Pakoodé »?
« Pakoodé » signifie littéralement en mooré « on ne cultive pas » en d’autres termes la population n’effectue pas de travaux champêtres ce jour là. En fait, il y a trois (3 ) Pakoodé. Le premier a lieu au début de la saison hivernale qui correspond au début des travaux champêtres. Le deuxième (qui est l’objet de cet article) se déroule à la fin des travaux champêtres mais bien avant les récoltes; période qui est réservée au troisième Pakoodé.
Selon quelques habitués de cette fête, le deuxième Pakoodé est le « vrai » c’est à dire qu’il est le plus célébré parmi les trois. C’est seulement lors de ce Pakoodé qu’on sent que les populations sont en fête. A l’occasion on peut voir un match de football avec des équipes féminines, une course cycliste, la fanfare protestante parcourir le village, le marché plein à craquer . . . C’est un moment de réjouissance pendant lequel, les paysans se retrouvaient après plus de 2 mois de labeur dans les champs.
La période de célébration du Pakoodé n’est pas choisie au hasard. A cette période de l’année, la soudure est devenue un fait du passé, les légumes sont mures, le maïs est disponible et les récoltes s’annoncent déjà. Plus les prévisions de récoltes sont bonnes plus la fête est belle, C’est le Pakoodé à ne pas rater.
La fête en elle-même : Je vous fais grâce de la partie coutumière que je n’ai pas eu le privilège de suivre. Ce n’était pas l’objet de mon voyage.
Le lieu de convergence ce jour là, était la place du marché local. Du couché du soleil le 23 septembre au lendemain matin, cette place donnera constamment l’image particulière d’un jour de marché. Ce qui n’est pas habituel. Les marchés se tiennent d’habitude le jour. Mais exceptionnellement ce soir, la population est dense, le bruit infernal et la poussière présente ; voilà le décor.
En ce moment là, il est plus aisé et rapide de faire le tour complet du village que traverser l’artère principale qui traverse le marché tellement elle est bondée de monde. Mais d’où vient tout ce beau monde, pourquoi tant d’effervescence, et pour combien de temps durera la fête, êtes vous tenter de dire. Ils viennent de partout et sont là pour la fête. Ici, c’est une troupe de danse traditionnelle qui soulève la poussière, là c’est la projection d’un film qui soulève l’enthousiasme ; devant, sur une piste illuminée par un groupe électrogène des jeunes gens trémoussent à se couper le souffle. Tout cela embaumé par l’odeur de l’alcool de mil, les grillades, les fritures et la sueur des festivaliers. Quel spectacle.
Tenez, en plein dîner dans un restaurant aux alentours de 20h dans la nuit du 23, j’ai constaté l’arrivée de quatre (4) véhicules de transport en commun en l’espace d’une heure. Ceux-ci venaient de Ouagadougou, de Kongoussi et de Kaya. J’ai même rencontré dans le centre multimédia de Bokin un festivalier du Pakoodé venant tout droit de la France, Oui de la France ! Ce dernier étant originaire du village. Pendant les discussions, il a affirmé avec d’autres convives : « je ne manquerais le Pakoodé pour rien au monde, et malgré le temps [...] Le Pakoodé garde sa renommée. Ce que j’aime dans cette fête, c’est qu’elle me donne l’occasion de rencontrer d’autres camarades qui ont émigré comme moi, c’est aussi une occasion pour moi de revoir ma famille et mes amis ». Comme quoi, il n’est pas le seul à venir d’ailleurs.
Au delà de son aspect festif, le Pakoodé est présent dans toutes les discussions et devient de ce fait une expression passe partout.
Dans la foulée, un client demandera à un commerçant de lui accorder un bonus parce qu’aujourd’hui c’est Pakoodé.
Vous discutez avec une personne plus de 30 minutes, la personne vous fera remarquer qu’aujourd’hui c’est Pakoodé et qu’il doit se rendre sur la place du marché.
Vous égarez un objet ou vous commettez une imprudence, on vous fera savoir que c’est l’ambiance du Pakoodé qui vous rend moins vigilent.
Ceux qui ont raté le Pakoodé sont conscients d’avoir raté quelque chose d’important, la preuve: en rentrant à Ouagadougou mes compagnons de voyage et moi avons rencontré un monsieur qui voulait savoir d’où nous revenons. En lui disant que nous rentrons de Bokin, voilà sa réaction: « Bokin! Ooooh, les veinards vous étiez allé à la fête du Pakoodé, ça dû être grandiose… »
Une autre réaction ayant retenu mon attention est celle d’une de mes proches qui m’a demandé dès mon arrivé comment s’est passé ma fête de Pakoodé, oooooooh! Qu’il est célèbre, ce Pakoodé!
Voila, qu’il commence à occulter ce que je suis allé faire à Bokin. Je ne suis pas allé pour le Pakoodé! J’ai juste joint l’utile à l’agréable pour partager avec les lecteurs la vie à Bokin lors du Pakoodé.
Depuis le mois d’août je suis partenaire de l’Institut Internationale pour la Communication et le Développement (IICD), chargé du suivi- évaluation des partenaires projets de la dite institution. C’est à ce titre que je me suis rendu à Bokin pour amorcer le processus de suivi-évaluation d’un partenaire projet de l’institut qu’est Sahel Solidarité.
Siège de Sahel Solidarité de Bokin
Dans le billet suivant je vous promets la suite de l’aventure à Bokin et plus précisément à Sahel Solidarité, intimement appelé « Sahel ».