Rémy Pflimlin crache sur Médiapart : Nicolas Sarkozy a trouvé la carpette qu’il lui fallait !

Publié le 25 septembre 2010 par Kamizole

S’il fallait une preuve que Rémy Pflimlin n’est pas le patron de presse indépendant – et garantissant l’indépen-dance des chaînes qu’il dirige désormais nonobstant ses promesses la main sur le cœur ! – elle n’a pas tardé selon ce que je lis sur une dépêche de l’AFP Rémy Pflimlin s’en prend à Médiapart, tollé à France Télévisions (24 sept 2010). Même son de cloche dans Libération du même jour (qui reprend la dépêche) Affaire Woerth : le PDG de France Télévisions critique Médiapart.

Il va vite en besogne ! A peine avait-il pris ses fonctions le 23 août 2010 qu’il débarquait Arlette Chabot de la direction de l’information de France 2 : elle avait déplu à Nicolas Sarkozy et nul doute qu’il ne déférât toujours plus servilement aux exigences de Nicolas Sarkozy pour le choix des animateurs : France Télévisions : “la liste noire” de Nicolas Sarkozy dont parlait Emmanuel Berretta, spécialiste des médias au Point, le 27 août 2010.

Je lis sur Wikipedia qu’un de ses hauts faits d’arme quand il fut directeur général France 3 (de 1999 à 2006) fut le lancement de l’émission – plutôt trash et larme à l’œil, à peu près dans la même veine que «toute une histoire» et autres émissions de Jean-Claude Delarue dont ont parle beaucoup en ce moment – «C’est mon choix»… C’est dire le niveau culturel des chaînes de service public auquel aspire Rémy Pflimlin !

Quant à l’indépendance des journalistes, elle semble bien compromise ! Nicolas Sarkozy et ses comparses entendent bien “serrer les boulons” et museler presse et médias dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012. Ce n’est sûrement pas pour renforcer l’indépendance des chaînes de la télévision public qu’il a fait voter par ses parlementaires benis-oui-oui une loi redonnant au Président de la République le pouvoir de nomination des dirigeants par décret en Conseil des ministres ! Retour à la pratique du contrôle de l’information à la télévision de «l’étrange lucarne» du Général de Gaulle et tous les gouvernements jusqu’en 1981.

Certes, les autorités indépendantes qui se sont succédé depuis la réforme de 1982, de la Haute autorité de l’audiovisuel jusqu’au CSA sont loin d’être parfaites – la CNCL du RPR fut sans nul doute la pire ! – mais elles ont l’insigne mérite de faire échapper la nomination des PDG des chaînes au pouvoir discrétionnaire du gouvernement et du Président de la République. Je ne surprendrais per-sonne en affirmant sans nul risque d’erreur que Nicolas Sarkozy cherche à éradiquer tous les contre-pouvoirs et hautes autorités indépendantes dans tous les domaines. La Sarkozie tend à instaurer un pouvoir de plus en plus autoritaire et totalitaire où la démocratie et l’Etat de droit sont plus que «chefs d’œuvre en péril».

La tentative de faire main basse sur Le Monde ayant lamentablement échoué, il envoie Serge Dassault monter au créneau pour la reprise du Parisien/Aujour-d’hui en France (AFP 16 septembre 2010)…

Encore une évidente collusion entre l’argent et le pouvoir : la France est le seul client de l’avionneur pour les Rafales, donc Serge Dassault est “l’obligé” de l’Etat pour les dépenses publiques dont il dépend totalement – comme d’ailleurs beaucoup de grands groupes des médias, presse et audio-visuel - en même temps que sénateur UMP de l’Essonne (il fut aussi maire de Corbeil-Essonnes avant que sa dernière élection fût invalidée : il avait carrément acheté les électeurs !) et fait bien évidemment partie du «premier cercle» des généreux donateurs de l’UMP qui a défrayé la chronique de l’Affaire Bettencourt-Woerth.

Déjà propriétaire du Figaro (314.000 exemplaires vendus en moyenne en 2009) il prendrait le contrôle d’un autre quotidien phare s’adressant plus particulièrement aux couches populaires avec 305.000 exemplaires pour Le Parisien et 177.000 exemplaires pour Aujourd’hui en France. Quant au prix de la cession, on évoque en général 200 millions d’euros.

Si l’on se souvient qu’avant d’acquérir Le Figaro Serge Dassault émettait le souhait d’un journal diffusant des «bonnes nouvelles», c’est dire que les journalistes du Parisien seront priés de remiser toute critique du pouvoir en place !

Prière désormais de ne diffuser que les désormais fameux «élements de langage» fournis clef en main par l’Elysée et l’UMP. Ce que fait magnifiquement Rémy Pflimlin au sujet de Médiapart !

Si le nouveau servile PDG de France-Télévisions avait quelque intelligence – mais cela se saurait ! – il eût fermé son grand clapet à sarkonner et compris qu’en faisant le 23 septembre 2010 au Club de la presse de Strasbourg des déclarations inconsidérées sur le manque de rigueur journalistique de Mediapart dans le traitement de l’affaire Bettencourt-Woerth il ne pouvait que se discréditer et «provoquer un tollé vendredi chez les journalistes du site et au sein du groupe».

D’où parle-t-il ? Contrairement à Patrice de Carolis, l’ancien PDG de l’audiovisuel public qui n’avait nullement démérité et défendait l’indépendance des journalistes et les missions de service public – c’est évidemment pour cela que Sarko voulait sa peau ! – Rémy Pflimplin n’est pas journaliste. Il est issu d’HEC, comme beaucoup de personnalités du sérail UMPéiste. La Sarkozie est un royaume où les margoulins sont rois.

Il a eu l’insigne toupet de «ceux qui osent tout» de prétendre que son groupe aurait traité l’information de façon “moins manipulatrice” (…) «Je pense que l’affaire dont tu parles peut sortir et probablement de façon plus sérieuse et moins émotionnelle, moins manipulatrice et moins publicitaire»… exactement les mêmes «éléments de langage» servis ad nauseam depuis plus de 3 mois par les chiens de garde de l’UMP ! N’y voyez surtout pas une pure coïncidence…

Rémy Pflimlin a visiblement endossé le gilet rayé des larbins de la Maison Sarko : selon lui les journalistes des chaînes publiques l’auraient fait «de façon plus respectueuse». Dans son esprit, entendre : plus obséquieuse ! Il nous sort toute honte bue une perle de derrière les fagots qui ferait rire aux éclats Jolly Jumper : «France Télévisions a une responsabilité importante et on ne peut pas se permettre de sortir des informations qui sont démenties le lendemain, de manipuler impunément»

Les démentis ! Parlons-en… Certes, Eric Woerth n’en a pas été avare mais les preuves de ses mensonges successifs n’ont pas cessé de tomber ensuite et fort rapidement plus dru qu’à Gravelotte ! Pflimlin – l’idiot du PAF ! – se ridiculise et serait bien avisé de ne point nous prendre – et ses journalistes en même temps - pour de parfaits cons. Sans doute voudrait-il qu’ils ne passent que les démentis du pouvoir ?

Il n’a surtout pas honte de dénoncer des «dérives à la Big Brother», estimant que Médiapart n’était «pas l’exemple à suivre». Il ne manque que les épithètes trotsko-staliniens pour être dans le droit fil des critiques de l’UMP ! Si quelque chose évoque encore plus sûrement les dérives à la Big Brother, c’est bien l’espionnage des journalistes du Monde par les services secrets français pour démasquer la source des informations ! Comme l’on disait dans les cours d’école de mon enfance, et peut-être encore aujourd’hui ? «C’est c’ui qui dit qui y est» ! Menteur de mauvaise foi de première bourre. Marque de fabrique du sarkozysme !

Bien évidemment, ces déclarations ont fait réagir les journalistes de Mediapart. La Société des journalistes (SDJ) a «dénoncé des “propos” diffamatoires, a fortiori quand ils émanent du premier responsable de la télévision publique, fut-il nommé directement par le président de la République».

C’est précisément parce qu’il a été nommé par Nicolas Sarkozy qu’il adopte la vulgate de l’Elysée ! De même, comment s’étonner de cette «vision méprisante de l’information en ligne» ? Les journalistes - profession-nels - de Médiapart rétorquent à bon droit que «Pour mémoire, la justice a (…) validé le travail éditorial de Médiapart dans l’affaire Bettencourt, jugeant que nos révélations relevaient de “l’intérêt public” et de “l’information légitime” des citoyens». Comme si cela pouvait être un argument sensible pour Rémi Pflimlin !

Les journalistes de l’audiovisuel public sont loin d’être sur la même ligne que leur nouveau patron… Ainsi, Loïc de la Mornais, président de la SDJ de France 2 : «Nous n’avons pas cette opinion de nos confères de Médiapart. On espère que c’est une maladresse»… Maladresse, tu parles ! C’est une offensive en bonne et due forme, relayant la “guerre permanente” chère à Sarko qui voit des ennemis partout : il en a besoin, autant que de l’air, pour vivre.

«On est très surpris par ces accusations de manipulation, d’autant que les antennes de France Télévisions ont beaucoup repris les informations de Médiapart» sur cette affaire, a ajouté Yann Fossurier pour la SDJ de France 3. Nul doute que ce soit cela qui défrise l’Elysée !

Pour le syndicat SNJ, les «accusations» de M. Pflimlin «ne peuvent qu’inquiéter (…) Un mois après sa prise de fonction, le PDG veut-il donner raison à ceux qui affirment que son mode de nomination par l’Elysée risque d’aliéner son indépendance ?». Il ne fallait pas être grand clerc pour ne point le subodorer dès sa nomination !

Pour sa part, le SNJ-CGT de France Télévisions estime que le PDG avait «franchi la ligne blanche en s’en prenant avec une violence inaccoutumée pour un premier dirigeant de l’audiovisuel à Médiapart». Exactement la même violence que Nicolas Sarkozy et sa meute de chiens de garde ! Le syndicat avertit «solennellement» M. Pflimlin «qu’il ne le laissera pas toucher à l’indépendance de l’information».

Je doute que le zélé loufiat qui passe les plats de la Maison Sarko - cuisinés dans l’infâme gargote à l’enseigne de l’Elysée & de l’UMP réunis - soit sensible à ces menaces si elles ne restent que verbales. En revanche, alors qu’il flotte dans l’air des mots d’ordre de grève reconductible et grève générale, il se prépare peut-être des moments difficiles si les journalistes et personnels de l’audiovisuel public prenaient fantaisie de suivre le mouvement social. Au nom de l’indépendance et de la pluralité de l’information.

Un pavé dans son pré carré ? Ou une future «mare au Canard»