C’est ainsi que le Point commence son article relatant l’extraordinaire lucidité d’un neuropsychiatre détruisant toute trace du dossier médical de sa patiente quand il apprend qu’il va être convoqué par la police pour être entendu. Ces titres et sous-titres, ce qu’ils sous-entendent, démontrent une fois de plus le peu d’importance accordé au secret médical. Le jour où cette éthique fondamentale disparaîtra , et elle est menacée, un pas de plus vers Orwell aura été franchi.
Ce médecin était celui de Mme Bettencourt. Il avait examiné sa patiente à sa demande et fourni, en son âme et conscience, un certificat « remis en main propre pour faire valoir ce que de droit » selonla formule consacrée. Il a dans sa tête son examen et ses conclusions, elles ne regardent que lui et sa patiente. Il faut louer haut et fort le respect du serment d’Hippocrate que vient de démontrer ce praticien.
Au cours de leur perquisition chez ce médecin, les policiers n’ont retrouvé aucun dossier ni aucune pièce relative à cet examen. Dans le même souci de confidentialité, l’agenda du médecin comportait la mention d’un rendez-vous ultérieur sous une identité déguisée, à la date du 21 juillet 2009 : “R.V. ici Mme Liliane Goguel + certificat.” Bien joué, très bien joué même …
«En présence des policiers, le médecin a indiqué avoir également effacé la cassette sur laquelle il avait dicté le texte de son rapport, qui lui avait été commandé par l’avocat Fabrice Goguel, alors conseil de la milliardaire» (retenez bien jeunes collègues!)
La perquisition qui a eu lieu lundi à son cabinet, ordonnée par la juge Isabelle Prévost-Desprez, l’avait été pour «savoir si des éléments médicaux contredisant le certificat du médecin n’auraient pas été soustraits par lui à la justice» … On croit rêver. Cela montre une fois de plus l’extraordinaire méfiance des magistrats à l’égard des médecins supposés faire des certificats de complaisance (cela existe, certes, mais n’est pas la règle). Ensuite c’est véritablement considérer le neuropsychiatre comme un imbécile, inscrivant dans son dossier le contraire de ce qu’il certifie. La réconciliation entre magistrats et médecins n’est pas pour demain !
En face d’une telle situation je me serais comporté exactement de la même manière. J’ai d’ailleurs dans ma carrière, eu ainsi à protéger des patients de curiosités légitimes sans doute, mais dont le médecin n’avait pas à éclairer la recherche. J’en suis fier et je prescris à mes jeunes confrères d’avoir toujours cette impérieuse nécessité absolue en tête.