Jérôme Noirez
J'ai lu
318 pages
Résumé:
Parce qu'il nourrit une passion esthétique - mais néanmoins coupable aux yeux de ses contemporains - pour les toutes jeunes filles, Charles Lutwidge Dodgson est exilé dans les contrées lointaines de Novascholastica. Dans cette colonie britannique perdue au milieu de l'océan Indien, où les frontières du réel, du rêve et de la mort se confondent et se chevauchent, il ne prendra jamais le pseudonyme de Lewis Carroll, rencontrera des personnages étranges et, toujours, poursuivra le fantôme de son Alice...
Mon commentaire:
Quel étrange roman. Je ne lis pas souvent de la science-fiction pure et dure, mon intérêt se portant plus souvent vers le fantastique en matière de littérature de l'imaginaire. J'ai lu et aimé plusieurs livres de science-fiction au cours de ma vie de lectrice, mais celui-ci m'échappe.
J'ai d'abord été attirée par le résumé, aimant beaucoup Alice au pays des merveilles. La quatrième de couverture dit que c'est un brillant hommage à Lewis Carroll. Pendant une bonne partie de ma lecture, je n'en ai pas compris le sens. Dans l'histoire de Jérôme Noirez, Carroll est envoyé à Novascholastica, un monde étrange, un peu parallèle au nôtre, où vivent d'étranges créatures, à mi-chemin entre le rêve et la mort. On y envoie Carroll (Charles Dodgson de son vrai nom) car les enfants prennent trop de place dans sa vie. C'est choquant et on souhaite se débarrasser de lui. Pendant un moment, j'y ai sentis l'ombre de la pédophilie planer sur le livre. Les rêves de Dodgson n'aident en rien sa cause. Si sa sexualité demeure ambigüe, l'hommage de ce roman vient principalement du fait que l'auteur nous montre un homme ordinaire, qui bégaie, a ses peurs et ses angoisses, professeur accomplit, photographe intéressé et brillant logicien. On s'attarde beaucoup plus sur son travail personnel que sur sa vie publique et sur sa renommée d'écrivain. C'est le Lewis Carroll d'avant Alice. Même s'il connaît déjà les Liddell, qui l'ont rayé de leurs vies.
Le roman est conçu en alternant les deux mondes, celui de Novasholastica et celui de Charles Dodgson. Si je n'ai pas vraiment aimé la forme que prend ce roman, il est par moments assez cru à mon goût et mêle un monde parallèle et étrange avec le Londres victorien, monde dans lequel, je dois l'avouer, je me suis sentie perdue plus d'une fois, je trouve intéressant que l'auteur ait choisi de nous montrer un Charles Dodgson que l'on connaît assez peu: photographe, mathématicien et logicien. Le Lewis Carroll que l'on connaît, celui d'Alice, n'existe pas vraiment dans le roman.
Leçons du monde fluctuant m'a donné l'impression d'avoir de nombreuses qualités que je n'ai pas vraiment su saisir. Ma lecture m'a par moments ennuyée, je l'ai trouvé confuse et un peu longue. La science-fiction n'était peut-être pas, pour moi, le meilleur moyen de rencontrer Charles Dodgson. J'aurais sans doute préféré un roman plus cartésien car ce livre m'a déconcertée à plusieurs moments et m'a poussé à conclure rapidement ma lecture en feuilletant les dernières pages. Ce n'est pas une lecture linéaire et l'univers mêle l'exotisme au monde victorien. Le mélange ne m'a pas réussit.
J'ai lu beaucoup d'excellentes critiques sur ce roman. Si ce genre de livre vous intéresse, foncez. Si toutefois comme moi, vous préférez les romans plus définis, où le monde victorien est plus clairement marqué, ce livre n'est peut-être pas pour vous.
Un extrait:
"Novascholastica... Une main gauche plantée en plein océan Indien, grande comme deux fois l'Angleterre, dont les doigts semblaient s'agripper au tropique du Capricorne. Dans ses Geographic Rhymes for Children, l'explorateur James Bruce racontait qu'au début de la création, Dieu, pris de fatigue, s'était appuyé sur le monde et qu'il y avait laissé l'empreinte de sa main. Depuis lors, dans les fleuves et les chaînes montagneuses de cette île née du divin hasard, on pouvait lire l'avenir de l'homme ainsi que de l'univers tout entier. En tout cas, Novasholastica était une terre dont les géologues ne pouvaient toujours pas expliquer l'existence, une terre que trois siècles de colonisation n'avaient pas suffi à réellement domestiquer. Dodgson fit tourner la mappemonde dans un sens puis dans l'autre. Entre Oxford et la côte occidentale de Novascholastica, il n'y avait guère plus de cinq pouces de distance. Peu de chose en définitive pour qui tient le monde entre ses mains." p.52