Les Éditions de la revue Conférence publie De la mort prochaine du poète suisse François Debluë.
De la mort prochaine, en deux guises successives définies par le choix de leur énonciation, « Proses de la mort prochaine » et « Poèmes de la mort prochaine », propose une méditation élégante et simple sur une évidence bien difficile à définir… Prose et poésie dont l’intensité est toujours contenue, et le caractère dramatique et parfois tragique offert sous des espèces où « rien ne pèse ni ne pose » ; écriture à la fois limpide et saturée, qui vise à donner, à exprimer le plus avec la discrétion, le retrait de la litote : par quoi il s’agit, tout autant que d’une leçon de poésie, d’un leçon de vie, d’une leçon éthique, faite de l’évidence d’une allure qui n’impose rien à autrui et ne lui offre que la douceur de qui revient des combats intérieurs les plus acharnés. Bref, une poésie sans faux-semblants, qui a passé le cap des mirages et des manifestes, pour présenter simplement une fervente méditation sur la vie que l’humour sait traverser. (Présentation du livre sur le site de l’éditeur)
Si tu mourais aujourd’hui ou (disons) demain (mais pas plus tard), il ne serait pas impossible que le petit peu d’estime qu’ils ont pour toi augmente d’un cran ou deux (avant le retour des probables médisances, et avant le rapide oubli).
On remercie ainsi les morts de bien vouloir se taire enfin – eux qui ont tant parlé ! – de bien vouloir laisser la place aux survivants – à ceux d’entre eux du moins que possède l’impatience de s’exprimer et d’occuper le terrain.
•º•
Quand, de son corps d’homme mort et depuis peu enterré, se détachera son sexe.
(« parties » à elles-mêmes retournées : plus que jamais ambigument et justement nommées)
Séparé.
Dé-fait, celui-là même qui aura été source de tourments de plaisirs, de plaisirs et de tourments.
Pour d’autres peut-être (les enfants), pour une part non négligeable malgré tout, source de vie.
•º•
petit testament
Que fera-t-on
de mon veston
que ferez-vous
ce jour-là
de mes idées
de celles-là
qu’en partant
derrière moi en désordre
j’aurai laissées
de celles-là
en tous sens si longtemps
trimballées ?
Que deviendra
mon crayon
tout usé lui aussi
compagnon
de mes jours et de mes nuit
− que deviendront
mes souliers
aux vivants sans confort
comme toujours
sont les souliers des morts ?
Ces bouts de moi
ces embarras
un chiffonnier n’en voudrait pas :
que ferait-il
de bouts de crayons
vieilles idées et bouts de chandelles
que ferait-il
d’une pendule
qui ne donnerait
aux vivants
que l’heure d’un autre temps ?
François Debluë, De la mort prochaine, Éditions de la revue Conférence, 2010, pp. 20 & 21 et p. 84.
Bio-bibliographie de François Debluë
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