Je me suis sentit aussitôt en danger car le sentier que j'empruntais serpentait au milieu des hautes herbes et me dissimulaient à moitié. Comment faire confiance à ces hommes armés qui avaient attendu ce jour depuis si longtemps et qui maintenant étaient pressés d'en découdre ? Impossible en effet de continuer impunément ma balade improvisée au milieu d'une horde de tueurs
tirant au moindre mouvement suspect de branchage. Alors que je rebroussais chemin en faisant le plus de bruit possible pour déclarer ma présence, je tombais sur l'un des responsables de mes tourments. Un gros homme en treillis était lourdement assis sur un tas de cailloux, le fusil en travers de son torse. Cet abrutis au teint rougeaud, bedonnant et aviné faisait le fier sur son promontoire graveleux et me fixait du regard. Son chien nerveux, faisait des ronds devant lui et sautillait comme un cabris. Le plus intelligent des deux n'était pas celui qu'on croit et il est fort à parier que si j'avais du demander mon chemin, c'est sans doute le chien qui m'aurait répondu. J'imaginais cet adhérent du front national, à la messe le dimanche matin durant la prière eucharistique en train de lorgner sur la croupe de la fille de sa voisine. Celui-ci en tout cas avait l'air plus bête que méchant mais affublé de ce fusil il en devenait effrayant et je préférais ne pas m’éterniser.
Sur le chemin du retour rythmé par les salves irrégulières des tirs de fusils, je pestais intérieurement contre ces imbéciles avides de tuer, surement pour prouver à leur entourage et à eux même qu'ils étaient de vrais hommes. Des vrais mâles aux couilles bien remplies, qui balançaient à leur retour, le fruit de leur chasse sur l’épaisse table en bois de la cuisine en hurlant "Femme, prépare moi mes pantoufles !".Merci de l’intérêt que vous portez aux Nouvelles du Rayon Bleu. Bonnes lectures ! et n’hésitez pas à commenter.