A Cuba, le leader communiste cubain Fidel Castro, 84 ans, a reconnu sa responsabilité dans les discriminations dont ont fait l'objet les homosexuels cubains dans les années 1960 et 1970.
L'ancien président, Fidel Castro a déclaré en réponse à une question du quotidien La Jornada, dont l'article a été diffusé le 31 août 2010, sur le site Internet officiel cubain Cubadebate, "S'il y a quelqu'un de responsable, c'est moi… Mais c'est sûr qu'à cette époque je ne pouvais pas m'occuper de ce sujet… J'étais immergé dans la crise d'octobre (1962), la guerre, les questions politiques".
Il a poursuivi "Échapper à la CIA, qui achetait tant de traîtres, ce n'était pas simple, mais s'il faut assumer la responsabilité, j'assume la mienne, je ne vais pas tenir pour responsable quelqu'un d'autre".
Ce "mea culpa" de Fidel Castro a en fait rouvert un chapitre sombre de la révolution cubaine, quand gays et lesbiennes, mais aussi artistes ou religieux étaient envoyés dans des camps de travail.
De 1965 à 1968, des centaines de personnes considérées comme "idéologiquement déviantes" ont ainsi été internées dans des Unités militaires d'aide à la production (UMAP).
Le pasteur Alberto Gonzalez, 67 ans, raconte "Ce fut une période sombre, douloureuse, frustrante, qui a bouleversé ma vie".
Comme le poète Pablo Milanes ou le cardinal Jaime Ortega, aujourd'hui archevêque de la Havane, il a été soumis aux travaux forcés et à des traitements humiliants dans ces camps entourés de barbelés, sous le regard de soldats armés.
Le pasteur ajoute "Mon père était communiste et le justifiait. J'ai souffert, mais j'ai décidé de rester à Cuba et je n'ai aucun remords. Il est toujours temps de reconnaître ses erreurs. Ce qu'a dit Fidel constitue une reconnaissance précieuse d'un point de vue historique".
Mais même après le démantèlement des UMAP, il a fallu attendre 1979 pour que les relations homosexuelles soient dépénalisées et l'homophobie institutionnelle est restée vive dans les années 1970 et 1980.
Les autorités ont ainsi interdit la publication d'oeuvres des écrivains Virgilio Pinera et Reinaldo Arenas, car ils étaient gays.
Le transsexuel Francisco Garcia, dit Sisi, employée au Cenesex (Centro National de Educacion Sexual) dirigé par Mariela Castro, nièce de Fidel Castro et fille du Président Raul Castro témoigne "J'ai été privée de liberté pendant six mois car je m'étais épilé les sourcils".
Il ajoute "A cette époque, on cherchait à détecter les homosexuels. C'était horrible. Par ignorance, c'était vu comme une aberration, et des atrocités ont été commises. Il y a eu des progrès, mais il reste beaucoup à faire et ce qu'a dit le Commandante (Fidel Castro) est un coup de pouce".
La situation s'est en effet améliorée pour les gays, lesbiennes et transgenres, grâce notamment à Mariela Castro qui milite depuis des années pour les droits des LGBT.
Depuis 2008, les opérations de changement de sexe sont ainsi autorisées.
Mais tout n'est pas facile pour autant, et des militants dénoncent l'écart entre les discours de la nièce de Fidel Castro et la réalité au quotidien.
Mario Delgado, 29 ans, affirme pour sa part avoir été exclu de l'Université pour avoir organisé l'élection de "Mister Gay".
Il déclare "Les excuses de Fidel ne signifient rien tant que la Police n'arrête pas de nous persécuter".
Aliomar Jankajer, président de la Fondation LGBT Reinaldo Arneas, a estimé que les déclarations de Fidel Castro étaient "une tentative désespérée pour montrer qu'il y avait eu des changements" en matière "de respect et d'égalité" à Cuba.
Et il a demandé "Qui va réparer les souffrances subies?"
Le chercheur homosexuel Tomas Fernandez évoque, lui, des "excès" propres aux processus révolutionnaires "qu'il ne faut pas oublier pour que ces erreurs ne se reproduisent pas".
Ce "mea culpa" doit être confirmé par les autorités cubaines, dans la réalité institutionnelle et quotidienne.
Seigneur, fais que le respect et l'égalité soient enfin reconnus aux LGBT cubains.