Traverser de nuit banlieue de banlieue en bus démultiplie sans trop le vouloir le sens de la géographie. Ça veut dire le temps, ça veut dire l'espace, ça veut dire la lune qui rôde en haut comme un chaman rempli d'hélium. Serpenter dans la nuit, le béton minuscule, les bretelles autoroute, diffracte aussi la carte telle que je l'avais en tête ; j'en profite pour écouter podcast d'Eden matin midi et soir (Chloé Delaume via France Culture) et recommande vivement.
Vide, tu es je suis vide. L’esprit en appel d’air, organes fantoches et cœur aride. Une âme stérile, une voix de pierre. Des cailloux plein la bouche, des crachats de silex. Mais aucune étincelle n’affleure aux commissures, aucune, jamais.
(Voir aussi Arnaud Maïsetti pour lecture et écoute du podcast)
Coincé Gare de Lyon, comme le narrateur bien anonyme de Coup de tête je cherche Nil, Nil est nulle part, ou plutôt si, des Nils, c'est à dire des clodos, y en a partout, certains même n'en sont pas, ils puent l'alcool, ils dorment par terre. Gare de Lyon coincée la nuit ressemble en fait à Gare de Lyon ouverte le jour. Quelques corps en moins. Mais grosso modo la même absence de temporalité : la nuit, le jour, là-bas, sous terre, comme dans un Casino en fait, c'est juste exactement la même chose. La même lumière, les mêmes annonces. On fait, au fond, pas trop la différence. Est-ce que j'ai pensé ne serait-ce qu'une seconde aux risques d'attentat dans les transports ou même ailleurs, aux bombes disséminées partout sur, sous et dans les rails, les wagons, les caténaires, est-ce que j'en ai profité pour en construire une peur primaire de plus à ajouter au catalogue ? Même pas. J'y pense maintenant, mais a posteriori.
Coup de tête, deux mots, juste pour dire que la dernière des dernières relectures est en cours, se terminera d'ici demain, samedi au plus tard. Ensuite ce sera terminé, ça fait bizarre rien que de le penser, mais c'est bien vrai. Après je ferai lire.
Pour passer le temps dans la nuit tartinée au néon j'ouvre 79 carré nuit blancs de Jean Gilbert acheté au pif il y a un mois. Ce livre de poésie fiévreuse est en réalité une traversée en Insomnie. Je me rappelle lecture d'Arnaud Maïsetti, « Où que je sois encore... il y a quelques semaines et j'insomnise. Il faudra que je relise, faudra aussi en reparler.