Et si c’était simple. Simple comme une seule minute. Une minute pour faire un petit voyage, comme ce petit remontant que l’on prend souvent avant de descendre du tabouret de ce vieux bar qui sent bon le cuir chaud, avant de rentrer chez soi. Ça s’écouterait comme on prend un médicament, ça se consommerait comme une évidence qu’il serait absurde de remettre en question.
Ce serait comme Pascal Comelade, ce serait surprenant, dérangeant, intriguant. Et ça pourrait être un problème. Au début, je ne comprenais pas Comelade, comme englué dans un préjugé à la Tiersen, avec une forme de joie naïve et enfantine en plus, qui ne me parvenait pas. Et puis à force de lire que le problème venait de moi, j’ai fini par y croire. Et je suis allé chercher un peu plus loin. Je sortais d’une période où la naïveté, encore moins la joie étaient des choses que je recherchais dans la musique – je pense que je l’avais rangé dans cette case-là Comelade, celle de l’enfance, du bal de village stéréotypé, de la surface. J’avais besoin de profondeur. Et c’est bien là que je me suis trompé.
Pascal Comelade est de ces artistes qui ont des univers dans lesquels il faut rentrer en sautant à pieds joints. C’est un grand manège qui tourne très vite, qui vous happe en trois temps comme ça. Alors c’est plus ou moins facile d’être confronté à ce cocktail qui évoque à la fois la candeur de l’enfant et la mélancolie de l’adulte, c’est d’ailleurs peut-être ce qui déstabilise. Il joue sur des registres diamétralement opposés qui s’entrechoquent sur cinq minutes.
Comelade, c’est un péché d’anachronismes calculés que l’on aime réussir à pardonner.
Ça commencerait comme ça, sans prétention. Trois temps et un piano, une valse toute bête. Ce serait une forte brise ponctuée de gouttes de pluie. Ce serait la batterie. Et puis ça se transformerait en une valse moins bête. Ce serait une valse naïve et enjouée au glockenspiel, sous une pluie battante. Et puis viendrait l’accordéon, vaporeux et entraînant, comme un orage en slow-motion.