Quelle bonne idée a eu Albin Michel de publier conjointement ces deux romans ! Le premier est de Sophie Tolstoï, l'épouse du grand Léon. Le second de Léon. Tous deux traitent du mariage et de ses affres. Tous deux montrent des amants poussés à bout. A qui la faute ? est l'histoire d'Anna qui épouse le prince Prozorski, son aîné de quelques années. Remplie d'un amour pur et platonique, elle est oppressée par le comportement sensuel de son époux. Bientôt mère, elle se découvre moins amante. L'incompréhension s'installe et règne entre les deux époux. En contrepoint, s’esquisse un amour pur. La sonate de Kreutzer est bien plus concentré dans l'espace et le temps. Dans le wagon que partagent plusieurs voyageurs s'engage une discussion entre une femme et un vieil homme. Notre narrateur en est le témoin. Il a aussi repéré un homme étrange... qui fait fuir tous les autres. En effet, Pozdnychev déclare avoir tué sa femme. Ce dernier conte la triste histoire de sa vie au narrateur, de sa formation à la sensualité jusqu'à son mariage avec une femme, trop pure comme toutes ses semblables, puis à la jalousie dévorante et aux querelles. Ces deux romans, tout aussi tragiques l'un que l'autre, portent un regard bien sombre sur le mariage, sur les attentes des hommes et des femmes, sur la vie de famille. Si le roman de Léon est comparativement plus fort, celui de Sophie est plus classique, plus lent, pas forcément plus sensible. Malgré une préférence marquée pour Léon, j'ai été heureuse de découvrir Sophie, cette épouse avec laquelle il s'est tant chamaillée. Quel dommage qu'elle n'ait été cachée par l'ombre de son époux... Et quelle horreur que cette vision du mariage, qu'ils semblent partager !