""""""
***
The Jim Jones Revue
‘Burning Your House Down’
Punk Rock Blues/PIAS
« Qui parle dans mon dos parle à mon cul » disait Fatbart avec ce talent de communicateur et de tribun qu’on lui connaît. Comme j’ai pas envie de sentir ce qui sort ni du sien ni de celui de Jim Jones, je me tais. Sauf que ce qui sort de la bouche de Jim Jones, c’est pas de la daube pop(uliste) : larynx au bord de la rupture, brutalité ravageuse et hénaurme son, les petit-fils de ces putes de Cactus et The Faces méritent une review détonante. Non pas que leur rock’n’roll de pub anglais ait inventé quoique ce soit mais juste pour la jouissance d’écouter un sempiternel et authentique rock’n’roll band qui va vous tordre le coup à force de vous secouer la caboche comme des brutes. Et ce qu'il y a d'essentiel c'est qu'ils jouent cette musique comme si tout était encore à inventer! Déchirure rock’n’roll absolue du moment et dès lors à ne pas mettre entre toutes les oreilles. Long live rock’n’roll ! (jd)
***
Junip
‘Fields’
COOP/City Slang
Voilà un disque qui atterrit dans ma platine sur une bien
heureuse suggestion. Très vite l’oreille est attirée par la voix suave et
étrangement aiguë de José Gonzales. Le phrasé apaisant qu’il déploie sur ces
chansons folk sont d’une infinie délicatesse alors que celles-ci s’écoulent
comme une caresse aérienne sur fond de bourdonnements électroniques. Puis la
répétition de certains motifs révèle comme une présence fugace qui semble
hanter chaque titre et lui conférer un pouvoir hypnotique subtil. Sans doute
l’influence de la musique éthiopienne pays d’origine de la mère du batteur
Elias Araya. La sobre ornementation électronique due à un Moog sensationnel
ressort par couches successives tandis que la voix est appuyée ci et là par de
discrètes harmonies, relevant la voix juste où il faut. Cet album finalement
est une vibration qui prend de plus en plus d’ampleur au fil des titres et finit
par vous envelopper ‘In Every Direction’.
Aux détours d’autres projets, le groupe a mis dix ans pour le finaliser
l’album, ce qui prouve que les bonnes choses arrivent à qui sait attendre.
Junip fait de la musique comme on n’en fait plus. (jd)
Chali 2NA
‘Fish Market Part.2’
DECON Records
Quoi mon poisson ? Qu’est-ce qu’il a mon poisson ? Le premier qui ose dire qu’il est pas frai se prend ce 2NA en pleine tronche. Chali 2NA c’est cette voix profonde et chaude qui gronde et bougonne avec ses potes de Jurassic 5 depuis perpet’. Jamais à court de bon rap, le groupe a pourtant décidé de se séparer. Voici donc un nouvel exercice solo de Chali après le très réussi ‘Fish Outta Water’. Plus ichtyophage que jamais, il nous revient avec un étal toujours aussi bien achalandé : voilà un album plein d’espiègleries hip hop, incisif et efficace. On trouve autant de featurings qu’auparavant bien qu’ils soient moins « crème du hip hop». C’est que ‘Fish Outta Water’ avait pour mission de lancer très officiellement la carrière solo de Chali et se devait donc d’assurer, ce dont il s’acquitta avec grande classe. Ici, il se met moins la pression et signe un album un poil plus old school. Cela ne l’empêche pas d’être on ne peut plus fresh comme on disait dans les débuts du funk. Cet effluve est encore renforcé grâce à quelques titres aux sons très actuels comme cet espèce de dubstep (va !) ‘Hood Report’ sur lequel Chali pose un flot imparable. ‘Focus Up’ incurve presque vers le hit facile où les vocals féminins viennent apporter une touche R’n’B sans être bitchy pour autant. On trouve donc un album très prolifique avec tout ce qui a fait le talent de Jurassic 5 mais dans un style légèrement différent (sans doute grâce à DJ Des Andres également). En tout cas, voilà une production nettement plus digeste et crédible que bien d’autres carnivores du rap US plein de haine va, et bien en peine de sortir quoique ce soit d’aussi fresh. (jd)
Donso
‘Donso’
Comet/Because
Si vous n’avez pas appris la Bambara étant jeune, Donso veut dire guerrier. Mon petit neveu qui sait déjà tout sur tout m’a dit qu’en Chinois ça se dit Jaan Sphyr et en russe Tematchké etc. C’est fout ce qu’on leur apprend comme conneries aux gosses. Vous voilà bien avancé pas vrai ? Mais sachez qu’en France, Donso c’est un groupe derrière lequel se cachent quatre musiciens maliens et français. Alors que l’un d’eux est mieux connu sous le nom de Krazy Baldhead (et ses disques sortis sur Ed Banger), les autres sont vocalistes et joueurs de n’goni. Voilà qui laisse croire qu’on a affaire à des gens qui ne manquent ni d’imagination ni d’audace. En effet ils signent un album tout à fait captivant où le chant africain fleuri est accompagné de toutes sortes d’effets et de riffs électroniques non moins ornementés et rythmés. Il faut souligner que les musiciens ont su faire preuve d’une imagination et d’un respect mutuel assez rare tant il est vrai que l’electro ici n’est en aucun cas envahissante et vulgaire. Aucune des deux tendances n’éclipse l’autre et on a droit à des chants d’une fort belle facture auquel il est laissé toute latitude. ‘Donso’ constitue donc un travail afro et electro comme on n’a pas encore entendu pour lequel on ne peut que féliciter ces guerriers de tous les antipodes. (jd)
Roots Manuva Meets Wrongtom
‘Duppy Writer’
Big Dada
Parti de l’excellente idée de réinterpréter du Roots Manuva en accentuant la teneur en reggae/ thc (si tant est que cela est possible) Wrongtom passe en revue différents titres phares (ou pas) répartis sur l’ensemble de la carrière de Roots. On a donc un travail en parfaite adéquation avec les originaux et une approche reggae/dub tapissée de structures et de sons électroniques poussés au plus tordu possible. Parmi tous ces titres, on retrouve avec plaisir ‘Lick Up Ya Foot’ travesti où l’on entend distinctement Roots Manuva railler notre pays avec des choses comme : tendez votre cul, Belgique, tendez plus haut, svp, aub. Oui voilà, encore un petit effort, oh oui, comme ça ! Il y a encore un parti politique qui veut se faire une réputation sur ton dos. Euh, pardon je devrais dire dans ton cul, haha. Non pas besoin de vaseline, ça va encore grever le budget fédéral et qui va payer pour ce pot-là, la Sécu ? Puis, t’as l’habitude depuis tout ce temps. Quoi ? Bon, allez mais un tout petit peu, hein. C’est vrai que ce n’est que le début d’une longue, longue tournante, d’un véritable carrousel faut-il dire. ‘Rebuff’ justement fait tourner à nouveau l’excellent ‘Buff Nuff’ sur une rythmique au clavier qui donne un tournis en mode dub et c’est pas qu’un coup de bluff. ‘Motion 82’ loin de ressembler à un remix bureaucratique, clôt cet album en beauté et en dansant. Bref tout sauf un jeu de dupe, cette rencontre entre Roots Manuva et Wrongtom. (jd)
Tricky
Mixed Race
Domino
Certes, c’est avec convoitise qu’on voit venir un nouvel album de Tricky. Certes, on donne toujours autant de crédit à son univers embrumé et tortueux. Pourtant on ne peut pas dire qu’il ait regorgé d’inspiration ces derniers temps. Ce ‘Mixed Race’ semble malheureusement confirmer qu’il est bel et bien du mauvais côté de la pente, celui où on sue pour le moindre petit pas. À l’inverse de ses ex-compères de Massive Attack, il a quand même le courage de s’essayer à autre chose et nous offre ici huit titres allant dans des directions assez différentes. Exit le trip hop et tout l’appareillage sonore sophistiqué, il a voulu aller à l’essentiel. Mais force est de constater qu’il manque quelque chose : le premier titre se termine après même pas 2’30 sans que rien ne s’y soit passé. ‘Kingston Logic’ est une reprise un peu courte de la Jamaïcaine Terry Lynn se terminant par un banal fade out après 2’30 également. ‘Early Bird’ commence plutôt bien mais il aurait pu développer un peu plus ! ‘Ghetto Stars’ fait la part belle aux arrangements à la Vanier/Gainsbourg, influence de la France où il réside désormais. Franchement on reste sur sa faim à chaque fois. Et c’est comme ça tout au long de ce court album : 28’ ! On dirait que Tricky a voulu faire du light, du sobre mais ça ne lui va pas trop bien. Soit il a arrêté l’herbe, soit il a pris le risque de construire ses nouveaux titres sur un format hyper court comme un vieux reggae. Mais ils n’ont nullement cette vivacité-là. Soit c’est bel et bien le manque d’inspiration. Niet genoeg, onvoldoende, copie à revoir et à représenter avec quelque chose de plus consistant pour relancer notre intérêt. (jd)