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Le cadavre de Spence Broughton – Angleterre

Publié le 19 septembre 2010 par Shamrock
Sud du Yorkshire
  • L’histoire :
A l’époque où le vol était monnaie courante, Spence Broughton vivait à Londres avec son partenaire dans le crime, John Oxley. En Février 1791, les deux compères voyagèrent un peu plus au nord afin de dérober le wagon poste qui partait de Sheffield jusqu’à Rotherham. L’action se tint à Ickles à la lisière de Rotherham, dans la banlieue d’Attercliffe. La légende raconte que le seul objet de valeur était une lettre de change française d’une valeur de £123.
En Octobre de la même année, Oxley fut arrêté pour avoir prit part dans un autre cambriolage à Cambridge et il admit être responsable dans celui concernant le wagon poste. Dans un moment de panique Broughton s’enfuit voir un criminel bien connu – Thomas Shaw – peut être pour chercher des conseils afin d’éviter d’avoir à faire aux autorités, mais il fut reconnu et appréhendé par un policier. Oxley et Shaw n’essayèrent pas de protéger Broughton et le dénoncèrent pour un cambriolage. Il fut transporté aux Assises de York – endroit où l’on jugeait les criminels – reconnu coupable et condamné à mort.
Le cadavre de Spence Broughton – Angleterre Illustration d'Attercliffe avec le gibbet à droite et le pub Arrow à gauche - copyright Sheffield Archive
Le 16 Avril, Spence Broughton fut pendu. Son cadavre fut ensuite installé sur un gibbet, un genre de potence où l’on pendait les cadavres pour qu’ils soient visibles de tous et en particulier des criminels. Cette sentence était commune à l’époque et dans le cas présent, elle était d’autant plus prévisible que le cas Broughton était connu des habitants de Sheffield. 40 000 visiteurs affluèrent la première journée pour assister au spectacle, et ce pour le plus grand plaisir du propriétaire du pub d’à coté – The Arrow – qui clama que le corps de Broughton avait fait sa plus grande fortune. Puis le cadavre devint l’attraction locale et il resta sur le gibbet jusqu’en 1827 !
  • Pourquoi le cadavre resta si longtemps sur le gibbet ?
Au 18ème siècle, le pilorie, la flagellation et la potence étaient des formes classiques de peines publiques pour vol. Le gibbet était une sentence que les autorités réservaient pour les félons afin de montrer l’exemple. Bien que le terme de gibbet fût parfois utilisé pour décrire la potence, il fut plus tard utilisé pour parler d’une forme de sentence où le corps du criminel était exposé en plein air. Le corps était pendu par des chaines en fer après l’exécution, et laissé sur place pour qu’il pourrisse pendant un certains nombres d’années. Selon JP Bean dans « Crime In Sheffield », le juge qui jugea et rendit la sentence de Spence Broughton ajouta « dans le but de dissuader les autres, sa punition ne doit pas cesser à l’endroit de l’exécution et son corps doit être suspendu entre la terre et le paradis […] pour être effleuré par le vent et les tempêtes ».
Ainsi, alors que le gibbet était censé continuer la sentence du criminel, il avait aussi pour but de dissuader les gens qui avaient pour ambition de commettre un crime. L’historien Jim Sharp décrit le procédé comme tel : un gibbet est un mât d’environ 9 mètres. Il pouvait y avoir des variations comme le fait de placer le corps dans une cage métallique et cylindrique afin que le corps reste en place. La cage était ensuite accrochée au gibbet avec des chaines. D’ailleurs, on retrouve parfois ce procédé sous le nom de « body hanged in chains » soit le « corps pendu avec des chaines ».
C’était une pratique courante en Angleterre au 18ème siècle, environ une centaine de gibbet furent reportés à Londres en 1800. Dans la tradition du Yorkshire, il existait une autre version du gibbet – l’Halifax gibbet – et qui consistait en un genre de guillotine.
La préméditation, l’usage de la violence et un comportement indiscipliné menait souvent à la peine capitale et cela expliquerait pourquoi Spence Broughton reçu une telle sentence. Cinquante ans plus tard, du fait du changement des mentalités, on limita les cas passibles de peine de mort et le vol n’en faisait plus partie.
  • L’exécution comme spectacle :
A l’époque les exécutions étaient vues comme une forme de divertissement public et les gens pouvaient aller jusqu’à payer être courant en avance de la mise à mort d’un criminel. Des illustrations de la potence, des copies du derniers discours du condamné ainsi que des figurines du criminel étaient souvent vendues. Les compagnies de lignes de chemins de fer pouvaient même offrir des excursions peu chères pour que les gens puissent aller assister à la pendaison du malheureux. Mais comme il était impossible de savoir à l’avance la taille de la foule, ce business restait tout de même assez risqué et si la foule se prenait de compassion pour le condamné, il pouvait y avoir des réactions excessives et non prévues.
Le nombre de personnes qui alla voir le cadavre de Broughton montre qu’il s’agissait d’une affaire assez populaire. Mais certains documents comme le Sheffield Register d’Avril 1792 montre qu’il avait aussi acquit la sympathie de certains : « le comportement de ces hommes malheureux, particulièrement fervent et pénitent – et celui de Broughton en particulier, était marqué par un degré de courage et résignation, rarement observé chez les personnes dans les mêmes circonstances ».
C’est certainement le comportement, la façon horrible dont il mourut ainsi que son étalage sur le gibbet qui provoqua autant de sympathie à l’égard de Broughton, et c’est grâce à cette sympathie que son cadavre devint une attraction. Certain pensent que Broughton serait le seul criminel à avoir donné son nom à une rue Broughton Lane. Cependant l’historien Peter Harvey pensent que le nom de cette rue serait dérivée de Broughton Park – crée par le Duke de Norfolk – et n’aurait donc rien à avoir avec le criminel.
Selon d’autres personnes – notamment Charles Dickens et les réformateurs du 19ème – la potence et sa fonction de dissuasion ne pouvait pas fonctionner si la foule était dans un état de plaisir. Leur point de vue devint plus fréquent au fur et à mesure où on avançait dans le 19ème siècle, puis les exécutions publiques devinrent de plus en plus rares et la dernière eut lieu en 1834.
Les deux derniers cas de gibbet eurent lieu en 1832 : James Cook à Leicester et de William Jobling dans le Comté de Durham qui furent tout deux exécutés pour meurtre. Ce sont les événements entourant l’exposition du corps de Jobling qui menèrent à la fin de cette horrible sentence : l’appétence du public pour le sang mena à la demande d’un propriétaire de bateau de pouvoir emmener ses touristes voir le corps du malheureux. La famille de Jobling, désespérée,  vola le corps dans le but de lui donner une sépulture descente. Les témoins de ce genre de spectacles devinrent insensibles ce qui provoqua une sympathie à l’égard des criminels et mena à enterrer les corps des criminels qui pendaient sur les gibbets.
Le gibbet du corps de Spence Broughton n’eut pas l’effet escompté et provoqua une compassion pour les bandits de grands chemins. C’est grâce à lui qu’il eut un début de changement dans les peines réservées aux bandits et cambrioleurs. D’ailleurs le fait que le cadavre de Broughton fut enlevé seulement six ans avant la dernière exécution public montre le changement radical qui fut opéré.

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