Les commentaires s'interrogeaient hier pour savoir si la séquence que nous venons de vivre est signe d'un affolement ou choix tactique. Il y a sans doute des deux, une tactique qui a dérapé. Mais l'interview que Brice Hortefeux a donné au Figaro Magazine montre que, malgré tous les dégâts dores et déjà commis, Nicolas Sarkozy et son équipe (Hortefeux, Morano, Lefebvre, Bertrand) ont choisi de poursuivre leur campagne de séduction en direction des électeurs du Front National.
C'est Brice Hortefeux qui le dit, mais cela aurait pu être Marine Le Pen : "Est-il normal aujourd'hui que des assassins ou des violeurs, condamnés par une cour d'assises, puissent sortir de prison avant la fin de leur peine parce que des magistrats professionnels l'ont décidé? Quelle que soit la déontologie des magistrats, que je ne mets aucunement en cause, je ne crois pas possible qu'ils puissent toujours se substituer à l'expression directe de la volonté populaire. Puisque c'est un jury populaire qui décide aux assises de condamner quelqu'un à la réclusion criminelle, je crois que le choix de le libérer avant qu'il ait purgé l'intégralité de sa peine doit aussi être fait par le peuple lui-même." On est dans la droite ligne de la circulaire sur les Roms.
Cette politique suscite une violente réaction à gauche, en Europe, mais aussi plus qu'un malaise à droite puisque selon le dernier sondage du CSA pour Le Parisien, 36% des sympathisants de droite accordent une grande importance aux critiques de l'Union européenne. Il faut dire qu'après l'ONU, le Pape, les évêques, le Parlement européen, la presse internationale… cela fait assez de critiques pour amener l'électeur de droite le plus sarkozyste à s'interroger.
36%, cela fait beaucoup. C'est une base suffisante pour lancer, à droite, une offensive contre Nicolas Sarkozy. Les Juppé, Raffarin et compagnie que l'on n'entend pas beaucoup ces jours-ci doivent ronger leur frein. Ils savent que tant que le remaniement n'aura pas été réalisé, il leur sera difficile d'agir, mais dés que celui-ci sera acté ils auront les mains libres pour monter au sein de l'UMP une fronde contre un Président qui a décidément perdu la main. Il leur sera possible de trouver des alliés parmi tous ces élus qui doivent raser les murs dans leurs circonscriptions pour échapper aux lazzis de leurs adversaires, aux remarques désagréables d'électeurs déçus, aux interrogations de leurs amis les plus proches qui voient l'image de la France se dégrader dans le monde.
Beaucoup d'élus UMP, à ce jour silencieux, seraient sans doute prêts à les rejoindre dans une fronde qui pourrait se manifester au Sénat lors de la discussion de la loi sur les retraites avant de prendre corps lors d'autres débats à l'Assemblée Nationale. La situation s'est tellement dégradée que s'ils veulent être réélus aux prochaines législatives, il faut qu'ils commencent à faire entendre leur différence et à envoyer à leurs électeurs des signes indiquant qu'ils se désolidarisent d'une politique aussi impopulaire.