L’Organisation mondiale du commerce estime que Boeing a bénéficié d’aides illégales qui l’ont aidé ŕ financer sa gamme d’avions commerciaux. Des aides qui ne seraient pourtant pas vraiment interdites...
Il ne faut surtout pas chercher ŕ comprendre dans la mesure oů il s’agit lŕ d’un premier jugement, officieux et, surtout, confidentiel (ou supposé tel). En d’autres termes, l’Union européenne d’une part, l’U.S. Trade Representative, d’autre part, continuent ŕ s’opposer, mais en coulisse, Ťen secretť mais en męme temps sur la place publique. Cette maničre de faire est purement et simplement ridicule et permet de dire tout et son contraire, cela dans un contexte proprement surréaliste.
Pire, chacun des deux industriels concernés distille des commentaires sur des textes que le commun des mortels n’a pas lus, aucun recoupement n’étant permis, aucune vérification possible. Si les enjeux n’étaient pas considérables, on pourrait s’écrier Ťremboursez !ť Mais ce serait un jeu de mots peu apprécié.
Côté américain, les griefs déjŕ exprimés précédemment sont maintenus, ce qui n’est pas étonnant. On dit, ŕ Washington et ŕ Chicago, oů se trouve le sičge du groupe Boeing, que les pratiques européennes faussent le marché. Et d’affirmer qu’Airbus en reçu des Ťaides de lancementť d’un montant de 15 milliards de dollars, sur un total de 20 milliards de subventions. Et d’ajouter aussi que faisant fi des discussions transatlantiques entamées de longue date, les Européens ont maintenu envers et contre tout leurs pratiques pour soutenir le développement de l’A350XWB et, avant cela, celui de l’A380. On le notera au passage, le vocable Ťavances remboursablesť n’est jamais utilisé, ce qui n’est évidemment pas un hasard.
Le bras de fer, interminable, ne peut continuer ainsi ŕ l’infini. De toute évidence, l’OMC devrait se décider ŕ porter le dossier au niveau supérieur, c’est-ŕ-dire politique, en incitant avec fermeté les deux parties ŕ trouver un compromis qui leur permette ŕ toutes deux de sauver l’honneur et de garder la tęte haute.
En théorie, un tel objectif n’est pas hors d’atteinte, d’autant que le montant des aides litigieuses, réelles ou supposées, est similaire de part et d’autre. Un constat que personne, pour l’instant, n’ose exprimer ou encore moins mettre sur la place publique.
On peut espérer que Boeing reconnaisse que le programme 787 bénéficie bien d’aides diverses (qui sont sans doute de bonne guerre) tandis qu’Airbus, détenant dorénavant plus de 50% du marché mondial des avions commerciaux de plus de 100 places, devrait admettre que l’heure n’est plus aux avances remboursables.
Les autorités américaines devraient aussi calmer les plus vindicatifs de leurs élus, leur expliquer tranquillement qu’il ne sert ŕ rien –bien au contraire- d’attiser la discorde. Et qu’il ne faut pas męler les genres et affirmer, notamment, que le ravitailleur en vol proposé au Pentagone par EADS doit ętre écarté sous prétexte que c’est un produit réputé subventionné.
Reste l’essentiel. A savoir qu’il est urgent de mettre un terme ŕ l’affrontement pour permettre au canal historique Airbus-Boeing de présenter un front uni face aux concurrents russes et chinois qui pointent ŕ l’horizon. Les MS21 et C919 sont en effet intégralement financés par des fonds publics et, théoriquement tout au moins, sont susceptibles de faire de gros dégâts en attaquant les familles 737 et A320.
Reste ŕ savoir ŕ qui doit revenir l’initiative d’une proposition de pax romana attendue depuis trop longtemps. Que les candidats médiateurs se fassent connaître sans plus attendre !
Pierre Sparaco - AeroMorning