Une décennie est passée, et le genre masculin disparaît peu à peu dans la Nusoul : doit-on attendre que D'Angelo perde du gras pour ressortir ses tablettes de chocolat ? Dans quelle direction part Musiq Soulchild ? Comment se fait-il que James Poyser reste un musicien trop mésestimé ? Et Roy Hargrove alors, il fait toujours des concerts à des prix exhorbitants ? Puis pourquoi Love For Sale de notre intéressé a-t-il été annulé en 2006 ? Les modes changent vite et la Soul est devenue plus rétro que néo... Qu'à cela ne tienne, notre chanteur est reparti de zéro en sortant en total indépendanceAirtight's Revenge, un second opus – comment dire - déroutant.
Oubliez tout ce que vous connaissiez de la Nusoul d'il y a neuf ans avant d'entreprendre l'écoute de cet album qui promet d'en décontenancer plus d'un(e). Plusieurs passages sont nécessaire pour s'accommoder de cet étrange changement de direction artistique (jusqu'au look) qui démarre sur « Cake and Eat It Too ». Une batterie et des notes électroniques, un peu guitare électrique, je ne m'attendais pas à une pareille métamorphose. « Restart » est bien le titre qui définit cette prise de risque, ce besoin de partir vers de nouveaux horizons musicaux, une sorte de pop/soul alternative avec des passages rock et un esprit live omniprésent. Bilal et son partenaire Steve Mckie sont les co-producteurs de ces morceaux originaux, avec l'aide de Nottz, 88-Keys ou encore Shafiq Husayn (des Sa-Ra). C'est assez expérimental par moments (« Levels », « The Dollar » et « Robots » en particulier) mais à en juger certaines chansons comme « All Matter », « Move On » avec son groove reluisant ou la balade classique « Little One », cela mériterait de figurer sur les airplays.
Pour les influences, j'irai jusqu'à citer Lenny Kravitz, pour le style rock/soul. Dans l'état actuel des choses, je dirai que son métissage musical a pris ses espaces près de Kenna. Puis Airtight's Revenge ne fait pas que rattraper le temps perdu, il le dépasse. Et en plus, Bilal apporte grâce à ses textes une cinquième dimension supplémentaire à cet album, spirituelle (« Who Are You », « Levels »), qu'il transcende à travers sa voix. Ce second opus nécessite toute notre ouverture d'esprit. C'est à nous de faire l'effort ou non d'accepter sa vision de la Soul nouvelle.
Bilal Oliver, "Think It Over", live enregistré à la Bellevilloi le 13 Juillet 2010