« Duplicité ». Le terme exprime avec force l’exaspération de Viviane Reding, chargée de la Justice et des droits fondamentaux au sein de la commission européenne en apprenant l’existence dissimulée d’une circulaire française ciblant expressément les Roms pour mener des expulsions.
« Il est choquant qu’une partie du gouvernement français vienne à Bruxelles dire des choses et qu’une autre partie du gouvernement fasse le contraire ». « C’est une honte » a déclaré Viviane Reding en référence aux garanties données quelques jours plus tôt par Éric Besson et Pierre Lellouche qui avaient juré qu’il n’y avait pas stigmatisation.
Bruxelles découvre les façons de procéder de l’exécutif français jamais gêné par un petit arrangement avec la vérité. Pour Viviane Redding, « Trop c’est trop! ». Exaspérée la commissaire a prévenu « ma patience a atteint ses limites ».
Contrairement à J.M. Barroso, très prudent sur le sujet, la responsable des droits fondamentaux veut lancer une procédure d’infraction pour non respect de la législation européenne dans les deux prochaines semaines. Le bras de fer avec Paris porte sur la transposition considérée comme insuffisante d’une directive européenne sur la libre circulation de citoyens européens.
Le coup de gueule des instances européennes n’émeut pas un seul instant le gouvernement français. « La France n’a procédé à aucune reconduite volontaire ou forcée sur une base ethnique, elle respecte la Commission dans son rôle de gardienne des traités. Nous avons répondu à toutes ses questions et nous recommencerons si nécessaire », a rétorqué Eric Besson.
L’UMP par la voix de Nadine Morano promue nouvelle égérie du Sarkozysme estime « irresponsables » les propos de la commissaire européenne à la justice. Pierre Lelouche secrétaire d’Etat aux Affaires européennes a jugé « pas convenable » le « dérapage » de la commissaire européenne dans son parallèle entre la situation des Roms en France et la Seconde Guerre mondiale.
D’un excès à l’autre, Jean-François Copé, a estimé lui qu’en votant la résolution condamnant l’attitude de la France, les eurodéputés français « trahissent leur pays » (source France Info ). Un invité du site Le Post s’interroge légitimement sur l’argument avancé par l’UMP de déni de souveraineté.
Aprés les Etats-Unis, les instances et une partie de l’opinion de l’Union européenne, Ankara est entrée à son tour dans les détracteurs de la politique française à l’égard des Roms pour saluer au contraire les critiques de l’UE.
Décriée comme excessive et caricaturale par l’UMP, la tribune signée par Dominique de Villepin dans le Monde le 23 août dernier qui évoquait “une tache de honte” sur notre drapeau est aujourd’hui largement partagée à gauche mais aussi à droite notamment par l’électorat catholique. « Je suis honteuse de ce qui se passe dans mon pays. J’en suis malade » a pour sa part précisé Martine Aubry ce matin sur France Inter. « La France abîmée » constitue désormais l’un des angles d’attaque du Parti Socialiste contre Nicolas Sarkozy et le gouvernement.