Heureuse découverte de cet été 2010, le groupe russe Motorama, dont l’excellent album Alps chroniqué il y a peu sur Hartzine est toujours téléchargeable gratuitement ici, se livre en toute simplicité. Ils évoquent Drew Barrymore, la Russie, la new wave, les nazis, Moby Dick et bien d’autres sujets encore en une seule interview… Rien que pour vous…
Comment vous est venue l’idée de ce patronyme ?
C’est une idée de notre premier bassiste. Il avait vu un film appelé Motorama avec Drew Barrymore. Nous trouvions que ça sonnait bien sans savoir de quoi parlait le film…
Quelles ont été vos premières influences ? Joy Division ?
Au tout début, oui, sûrement… Closer est un de nos albums préférés, mais nous écoutions aussi énormément de musique de The Chameleons, The Sound, Gang of Four et A Certain Ratio. Maintenant Motorama s’éloigne un peu de tout ça. Nous avons fondé un autre groupe appelé Ytro dont la direction est plus violente…
C’est donc pour ça que vous vous êtes engagés dans le projet Ytro ?
Oui, nous avions besoin de plus d’espace pour nourrir notre désir post-punk. Et nous avions également besoin de chanter en russe… C’était expérimental. Nous nous sommes rendu compte que tout cela était incompatible avec Motorama. En plus, nous ne ressentions pas le besoin de mixer tous nos désirs en un seul projet à tout prix.
Sur Alps, la twee pop a détrôné la new wave. Comment est-ce arrivé ?
Nous avions envie etbesoin de quelque chose d’autre, quelque chose de neuf pour Motorama. Ytro a clairement été conçu comme échappatoire new wave. Nos premières influences étouffaient peut-être Motorama. Nous avons toujours aimé la twee pop et nous sommes sentis proches de la scène downtempo scandinave. Nous sommes aussi tombés amoureux de la dream pop de Beach House. Leurs mélodies pures et tranquilles nous ont fait fondre.
Est-il facile pour un pop lover de s’épanouir en Russie ?
Pas vraiment… À vrai dire, si vous n’avez pas de connexion internet, c’est assez difficile d’être en contact avec la pop moderne. Sommairement, la Russie vit encore dans les 90’s et écoute la musique de cette période-là.
Pourquoi est-il si important pour vous d’associer musique et esthétique ?
Je pense qu’il s’agit encore une fois d’influence musicale au sens large. Nous avons beaucoup écouté et avons été impressionnés par des groupes européens ou américains qui, comme Pink Floyd, The Velvet Underground, The Smiths ou Black Flag, ont attaché énormément d’importance à l’aspect esthétique de leur œuvre.
Votre philosophie du « Do-It-Yourself » est-il un choix narcissique ?
On peut dire ça mais en Russie, quand tu veux réaliser un projet, c’est aussi une obligation… Mais ça nous convient. Le DIY est la philosophie de nos groupes préférés. Nous trouvions logique de l’appliquer à nous-mêmes.
Dans quelle mesure l’aspect esthétique sera-t-il transposé sur scène ?
Euh… À vrai dire, nous n’y avons pas encore pensé… Ha, ha, ha !
À ses débuts, Motorama a été le groupe phare des supporters de football de votre région. Comment l’expliquez-vous ?
L’atmosphère des premières chansons de Motorama était quelque peu militaire. Cela pouvait plaire aux nationalistes qui se retrouvaient à notre insu dans notre première direction post-punk et dans notre apparence qu’ils assimilaient à un look nazi. Tout ça, nous ne le contrôlions pas… Mais les choses ont changé à présent. Nous ne proposons plus du tout ce qu’ils attendent !
Vous avez écrit Song Ghost. Qui sont vos fantômes ?
Je dirais : Matthew Arnold, Guillaume Apollinaire, Anna Akhmatova,
Kingsley Amis, Julie Hill Alger, Alfred Austin, William Lisle Bowles, Arna
Bontemps, Thomas Campbell, Amy Clampitt, Bret Harte, Randall Jarrell et, bien sûr, Samuel Johnson.
De quelles régions parlez-vous quand vous évoquez la mer et les voyages sur Ship et Northern Seaside ?
Ship évoque la région de l’Essex. Nous nous sommes inspirés de Moby Dick, le classique de Herman Melville. Un navire quitte Nantucket en 1819 pour chasser les baleines dans le Pacifique Sud. Il a été attaqué par une baleine et a fait naufrage. Seuls deux hommes ont survécu… Northern Seaside a tout simplement trouvé son inspiration dans les paysages côtiers de France, du Danemark, du Royaume-Uni et de la Norvège.
Pour terminer… Pourquoi avoir choisi le titre Alps pour votre album ?
J’aime cette question. Alps nous a semblé un mot esthétiquement intéressant… Nous avons imaginé les quatre lettres sur la pochette et avons trouvé l’idée plaisante… Et, accessoirement, nous aimons les montagnes…