Les Américains célčbrent la National Aerospace Week.
Cela s’appelle jouer de la corde sensible : les forces vives du secteur aéronautique et spatial américain organisent la National Aerospace Week, succession de manifestations permettant d’en souligner l’importance. L’affiche (notre illustration) annonce trčs honnętement la couleur, le slogan choisi, ŤCelebrating Patriotismť valant un long discours.
Outre-Atlantique, de bons auteurs ont brillamment analysé ce qu’il est convenu d’appeler la romance de l’Amérique avec l’aviation. On la croyait éteinte mais il n’en est rien. Et, tout au long de cette semaine, la preuve nous en est donnée : grand meeting aérien ŕ Pittsburgh (pourquoi lŕ et non pas dans une ville plus symbolique comme Seattle ?), colloques, exposition centrée sur les avancées technologiques, etc. Et une grande réception en l’honneur des membres du Congrčs qui déploient des efforts bienvenus pour défendre l’industrie aérospatiale nationale. Ils sont un certain nombre, en effet, en général plus crédibles que ceux qui bénéficient de retombées médiatiques importantes grâce ŕ des propos souvent excessifs, notamment des critiques acerbes des concurrents européens. Ces derniers sont mal vus, dans la mesure oů ils sont victimes d’une image d’entreprises subventionnées qui détournent les lois fondamentales de la libre concurrence.
Cette National Aerospace Week se déroule ŕ un moment bien choisi, d’un point de vue américain s’entend. La puissante Aerospace Industries Association of America, que dirige d’une main de fer Marion Blakey, exprime sa profonde inquiétude ŕ la suite de la publication, le 9 septembre, d’une étude du World Economic Forum qui révčle un net recul de la productivité américaine. Sa réaction a été instantanée : Ťil est clair que le Congrčs doit agir immédiatementť. Cela, notamment, par des incitations fiscales, notamment pour soutenir les investissements de recherche et développements.
Cette fois-ci, il n’est pas question de romance mais de patriotisme économique. Le dossier de Marion Blakey est solide comme du roc, sachant que les membres de l’AIA apportent chaque année 56 milliards de dollars ŕ la balance commerciale américaine. Il s’agit lŕ d’un solde net, aprčs déduction d’environ 25 milliards d’importations, avions de transport d’Airbus, biréacteurs d’affaires de Dassault, moteurs de Rolls-Royce, part française de ceux de CFM, etc.
Au sortir de la récession, l’industrie aérospatiale américaine se porte relativement bien. En revanche, les raisons d’inquiétude ne manquent pas. Outre la productivité en baisse, le recul attendu des dépenses du Pentagone annonce des moments difficiles. Cette ambiance soucieuse est, en toute logique, défavorable aux Européens. Exemple qui vient aussitôt ŕ l’esprit : comment, dans ce contexte, les Américains pourraient-ils choisir en novembre la proposition d’EADS, et non pas celle de Boeing, pour renouveler le parc de ravitailleurs en vol de l’USAF ? De męme, en toute logique, la situation devrait se durcir davantage sur le marché des avions de combat.
Les slogans utilisés en marge de la National Aerospace Week, outre la célébration d’un patriotisme bien compris, témoignent d’une grande puissance de conviction. On en épinglera deux, “Wings of Libertyť et Ť The Strength to Lift Americať. Clairs, nets, probablement efficaces. On ne connaît rien de tel de ce côté-ci de l’océan…
Pierre Sparaco - AeroMorning