Le duo Levitt/Dubner récidive avec cette suite du best-seller Freakonomics paru il y a quelques années. Cette suite n'est pas décevante et même meilleure que le premier !
Tout d'abord, les auteurs mettent les choses au clair dès le début : ils ne parlent pas de la crise financière. Pour ma part, ça faisait bien mon affaire. Il y a déjà beaucoup trop de livre qui traitent de ce sujet. Voici un résumé des chapitres :
L'introduction nous explique comment l'automobile a réglé un problème majeur de pollution urbaine au début du siècle dernier : les excréments de cheval !Le chapitre 1 traite de la prostitution. Comment la situation des prostituées s'est-elle détériorée suite au renforcement des lois anti-prostitution. Est-ce que les « pimps » offrent un meilleur service que les agents immobiliers ?
Le chapitre 2 des terroristes kamikazes. Pourquoi devraient-ils s'acheter une assurance-vie ? La portion sur la sur-utilisation de la chimiothérapie est fort intéressante. Comment détecter un terroriste à partir de ses transactions bancaires ?
Le chapitre 3 parle d'altruisme. Je l'ai trouvé moins intéressant que les autres.
Le chapitre 4 montre comment certains problèmes complexes peuvent être réglés par des solutions simples et peu coûteuses. Le taux de mortalité infantile a grandement diminué suite à une recommendation aux médecins pour qu'ils se lavent les mains avant un accouchement. Comment le pétrole a-t-il permi d'éviter l'extinction des baleines ? Comment la ceinture de sécurité contribue-t-elle à la sécurité automobile à peu de frais, alors que ce n'est pas le cas pour le siège de bébé et les coussins gonflables.
Le chapitre 5, certainement le plus intéressant, parle du réchauffement climatique (plus de détails ci-bas).
Ne négligez pas le savoureux épilogue, dans lequel les auteurs décrivent une expérience sur la monnaie conduite auprès de singes.
Qu'est-ce que Al Gore et le Mont Pinatubo ont en commun ? Les deux ont le pouvoir d'affecter les changements climatiques, mais avec une efficacité et des coûts fort différents ! Les moyens proposés par les écolos sont toujours coûteux et font peu de différence. Par exemple, il est beaucoup plus efficient de réduire ses émissions de GES en mangeant moins de viande qu'en s'achetant une Prius. Le méthane émis par le bétail a 25 fois plus d'effet de serre que le CO2 émanant des voitures.
L'éruption du mont Pinatubo en 1991 a projeté des tonnes de dioxide de souffre dans la stratosphère, ce qui a créé un écran solaire qui fait reculer la température de 0,5 degré Celcius, annulant temporairement le réchauffement des 100 dernières années. Pourrait-on utiliser cette trouvaille pour développer une technologie permettant de contrer les changements climatiques ? C'est ce que l'entreprise Intellectual Ventures a fait ! Cette firme a été fondée par l'ancien chef de la technologie de Microsoft et bras-droit de Bill Gates (qui l'a décrit comme l'homme le plus intelligent qu'il connaisse), Nathan Myhrvold.
Selon Myhrvold, les craintes face aux changements climatiques sont exagérées et l'emphase sur le CO2 est injustifiée. Au cours des 100 dernières années, le CO2 dans l'atmosphère est passé de 280 ppm à 380 ppm, mais il y a 80 millions d'années, ce niveau était de 1.000 ppm, le même niveau observé dans la plupart des édifices à bureau. Le CO2 n'est pas un poison, il est essentiel à la vie. L'augmentation du CO2 est en fait une excellente chose pour la biosphère et pour l'agriculture. Cependant, Myhrvold reconnaît que l'augmentation très rapide du CO2 dans l'atmosphère peut avoir eu des impacts sur le climat. Il a donc décidé de s'attaquer au problème d'une façon beaucoup plus simple et beaucoup moins coûteuse que celles proposées par les écolos. Il mentionne notamment l'exemple des panneaux solaires, lesquels coûtent très cher, requièrent beaucoup d'émissions de CO2 durant leur fabrication et installation, et n'auront qu'un impact très faible sur le climat et ce qu'à très long terme.
La solution proposée par Intellectual Ventures est d'injecter 100.000 tonnes par année de dioxide de souffre dans la stratosphère. Il y a présentement 200 millions de tonnes de dioxide de souffre qui sont émises dans l'atmosphère chaque année, mais le problème est que ces émissions ne se rendent pas à la stratosphère et n'ont pas pas l'effet « désirable » de refroidir la terre. En en envoyant une petite quantité dans l'atmosphère, nous pourrions reproduire l'effet qu'a une grosse éruption volcanique sur le climat. Croyez-le ou non, cette solution coûterait moins cher que la campagne de publicité de Al Gore visant à sensibiliser les gens aux changements climatique ! De plus, la viabilité de cette solution a été testée avec succès…par le mont Pinatubo et plusieurs autres éruptions volcaniques.
Intellectual Ventures possède aussi une autre solution tout aussi abordable. Il a conçu une machine à fabriquer des nuages qui pourrait être déployée en pleine mer. Les nuages sont une excellente façon de refroidir la terre. Il ne suffit que de propulser une bruine d'eau salée suffisamment haut dans les airs pour que les nuages se forment au-dessus des océans, sans affecter les conditions météo sur les continents.
Ce que ce chapitre démontre est que si le réchauffement global était véritablement un problème, il existe des solutions simples et peu coûteuses pour le contrer sans avoir à appauvrir des centaines de millions de gens, sans avoir à taxer les contribuables pour dépenser des sommes faramineuses dans des projets inefficients et sans avoir à sacrifier davantage nos libertés individuelles pour laisser l'État nous dicter la marche à suivre selon ses intérêts.
S'il y a une leçon à retenir de ce livre c'est que malgré toutes les politiques, lois, règlements et recommandations imaginables, les gens réagissent aux incitatifs (financiers et autres). C'est pourquoi ces politiques produisent souvent des effets non-anticipés et peuvent même avoir l'effet inverse de celui qui est désiré.
Je recommande fortement ce livre, tant aux économistes chevronnés qu'au commun des mortels. C'est une lecture très instructive tout en étant fort divertissante.
Steven D. Levitt et Stephen J. Dubner, Super Freakonomics, 2009.