Roman - Editions Stock - 148 pages - 15 €
Rentrée littéraire 2010
Résumé : "C'est le dernier jour, mais je ne le sais pas encore. Exactement comme au moment où a été pris ce Polaroïd. Je dois avoir dix ans, mes yeux sont plissés de fureur parce qu'on me force à me tenir face au soleil ou parce que je n'existe qu'en photo ; le tee-shirt bleu ciel des Dents de la mer ne me rappelle rien, le banc de sable qu'on devine flou derrière non plus, et du jour où cette photo a été prise, je ne sais que ce qu'on m'en a dit : qu'après l'avoir éventée pour la faire sécher, au lieu de l'empocher comme n'importe quel parent, ma mère me l'a tendue comme si elle ne voyait vraiment pas quoi en faire. Maintenant je la regarde sans me reconnaître tant je n'ai aucun souvenir d'avoir été aussi déterminée, aussi certaine, à cet âge, de ce que j'étais et de ce que je refuserais de devenir, et je finis par penser que si je dois quelque chose à quelqu'un, c'est à cette gamine énervée qui ne fixait pas sa mère mais un point déjà bien au-delà". Au fil d'une journée où se croisent ceux qu'on a trop aimés ou pas assez, un passé resurgit et se déconstruit peu à peu. A la folle jeunesse exprime, avec le plus de sincérité possible, les plus gros mensonges. Et inversement.
Tentatrice : une attraction surnaturelle...
Fournisseur : Libraire et porte monnaie !
Mon humble avis : Mes mains, mues par une attraction irrésistible, ont saisi ce livre, mes yeux en ont parcouru la 4ème de couv. C'est décidé, A la folle Jeunesse sera MON achat grand format de cette rentrée littéraire. Je ne connais pas l'auteure. Ce n'est qu'un peu plus tard que ces premiers titres évoqués ici me rappelleront vaguement quelque chose. Je lis et ne trouve pas ce que je pensais y trouver. Et pourtant, ce livre est pour moi un coup de coeur et prouve une nouvelle fois la magie des livres.
Celui ci est il un roman ? Une autofiction ? Une autobiographie ? Peu importe, cela ne nous regarde pas et Ann Scott brouille brillamment les pistes. Ce qui nous importe, c'est la vérité que les mots portent en eux et l'écho que ceux ci trouvent en nous. Et chez moi, dans mon intérieur, il y avait un puit qui n'attendait que cette résonnance.
Il n'y a pas vraiment d'histoire ici et la chronologie des faits n'était pas toujours limpide à mes yeux. Ann Scott revient sur sa vie, sa famille, l'énorme succès de son premier roman et l'image médiatique qui lui colle à la peau. Je n'ai jamais été mannequin (et ne le serais jamais rhooo, j'suis pas équipée pour !), ni accro aux paradis artificiels. Je ne suis pas homosexuelle ni bi. Je n'ai jamais fréquenté la jet set plus ou moins intellectuelle. Mais je me suis souvent retrouvée dans les propos d'Ann Scott. Car Ann Scott écrit un amour asexué, universel : les doutes, le manque, l'absence, la rupture, l'obession, l'erreur. Celui aussi qu'on laisse passer sans le retenir, parce que parfois, on n'ose pas. Comme l'auteur, j'approche la quarantaine. Un âge charnière où l'on regarde derrière parce que le devant se raccourcit. Le bilan... Qu'ai-je fait de ma vie ?... Un vide et pourtant, je suis débordante de vie d'après tout le monde. J'ai fait plus de choses que la plupart des personnes qui ont fait ce que j'aurais aimé faire. Comme l'auteur, je regarde mon nombril, les gens que j'aime, et le monde... A travers un polaroide, des souvenirs, mes faits et gestes, la presse,internet, la TV, la foule, les autres. Et ce que je vois, de près comme de loin : contradictions intimes, universelles, sociales, écologiques... Toutes ces contradictions me paralysent. Ann Scott a su prendre un stylo et écrire tout cela avec une émotion intense, une sincérité indiscutable et touchante. Un style intimiste, lucide, très juste. Une oeuvre qui peut donner des réponses à ceux qui peinent à trouver leur place dans leur environnement, qui dit qu'il faut s'accepter et grandir pour avancer. Il faut renoncer. Ca parait réducteur mais ce n'est pas toujours simple. Un roman réussi qui ébranlera la réputation "sex et rock & roll " de l'auteure pour lui donner l'image d'un talent qui dépasse le phénomène de mode.
Quelques extraits parmi mes innombrables "petites croix dans ma marge"
" Je reste en vol parce que je ne sais pas où me poser. Je suis de passage parce que je ne trouve rien sur quoi m'appuyer"
"je comprenais que ma peur de mourir est aussi le refus de rompre le lien avec les gens à qui je tiens. De les perdre, mais aussi de les abandonner."
"N'oublie pas pas que le gens croient toujours ce qui est écrit"
"Il n'y a que ceux qui ont accompli ce qu'ils avaient à faire qui peuvent espérer que le moment venu, ils auront le temps de regarder la chose en face, de dresser le bilan, de dire merci à la vie et d'accueillir avec curiosité le passage à l'état suivant, s'il existe. A quarante ans , je n'ai rien accompli." (je suis bien d'accord, les autres dresseront sans doute la liste de ce qu'il n'ont pas fait)
" L'étoile qui trembre émeut toujours plus que celle qui brille".
Allez, j'arrête là ! je vous encourage à lire le livre ainsi que le très beau billet de Sébastien