J’amasse mes souvenirs rêvés
Au temps de mon enfance…
Assis sur ce banc de Florence,
Je trempe mes lèvres dans ma Guinness,
Tout près de moi une belle gonzesse
Plaisante avec une insouciante indifférence.
Les touristes passent, eux, ils ne font que passer,
Tout chez eux : leur tee-shirt de marin,
Leur short bleu marine, m’agace…
Dans ma torpeur je rêvasse…
Une Italienne,
Toute de noir vêtue,
Me fixe d’un œil de chien battu
Elle est en deuil, je la comprends.
Au loin les ballades des musiciens
Apaisent les gestes prestes
Des autochtones nostalgiques
Des longues promenades équestres.
Mais, déjà, je me redresse
Fiévreusement,
Clopin-clopant, je marche jusqu’à la gargote.
Sur la carte, les prix sont culottés,
A une table des vieux jouent aux dés ;
C’est jour de fête je commande
Un cocktail : rhum, poire et amandes.
Mes yeux se lèvent vers l’horizon,
Les musiciens musèlent la chanson,
Mes voisines de table me saluent,
En cette langue étrange et familière
Qui donne à leur discussion,
Un accent dégagé et des notes légères.
Et déjà en cadence,
Les visages défilent,
Dansent des inconnus avec des filles,
Mes souvenirs, ma vie, tout tangue,
Et parle ma langue natale.
Florence,
N’est plus qu’une chimère,
Comme ces lieux où l’on espère
Trouver l’oubli et le repos
Mais, qui, cruellement,
N’ont rien d’intime et de ressemblant
Avec les délices que comptait
Goûter, ici, notre imagination.
Alors je m’égare, fiévreux, les mots
Glissent sur le papier comme un tombeau,
Ma main papillonne électrique,
Et je ne peux stopper sa gymnastique.
Soudain Florence semble sombrer dans la Renaissance,
Mais de ses cendres ne renaissent
Ni mes espoirs ni mes sens
Qui se consument,
Par avance, comme l’essence.