Je danse sur La Carmagnole.... "dansons la Carmagnole, vive le son,des chansons."....
08.09.10
11h31 • Mis à jour le 08.09.10
"Mercredi matin en conseil des ministres, Nicolas Sarkozy a tiré les leçons de la forte mobilisation du mardi 7 septembre. Il a annoncé des assouplissements de la réforme des retraites dans trois domaines principaux : la pénibilité, les carrières longues et le cas des polypensionnés.
Rien en revanche sur l'âge du départ à la retraite et sur l'équilibre général d'un projet qui participe à l'assainissement des finances publiques de la France. "C'est une réforme essentielle… Nous devons assurer aux Français que leurs retraites et celles de leurs enfants seront payées", a déclaré M.Sarkozy.
Les propositions du président de la République
Carrières longues Le projet Woerth prévoit que les personnes ayant commencé à travailler avant leurs 18 ans et ayant les années de cotisations requises pourront continuer à partir à 60ans, voire avant. "Je demande au gouvernement d'améliorer le dispositif afin d'éviter tout effet de seuil", a annoncé M.Sarkozy. L'effort est chiffré à 350 millions d'euros.
Pénibilité Le projet de loi a prévu que pour tout assuré ayant un taux d'incapacité supérieur ou égal à 20%, l'âge de la retraite sera maintenu à 60 ans. M.Sarkozy veut étendre ce dispositif aux agriculteurs. Surtout, toute personne présentant un taux d'incapacité de 10% pourra faire valoir ses droits devant une commission, qui "pourra décider de lui accorder le bénéfice d'un départ à la retraite à 60ans", a assuré le chef de l'Etat.
Public-privé Le gouvernement veut supprimer le droit des fonctionnaires ayant 3 enfants et 15 ans de service, à liquider leur retraite. M.Sarkozy souhaite que les agents à cinq ans de la retraite puissent en bénéficier.
Les polypensionnés M.Sarkozy demande "de présenter dans les meilleurs délais au Parlement les amendements du gouvernement".
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L'Elysée a décidé de faire des ouvertures importantes à défaut d'être majeures en direction des syndicats, CFDT en tête : 350millions d'euros supplémentaires seront consacrés aux carrières longues. Le dispositif de la pénibilité est assoupli, 30 000 personnes en bénéficieraient au lieu de 10 000 initialement. Des gestes ont été également faits en direction de la fonction publique, notamment pour améliorer le sort des "titulaires sans droit" et en direction des polypensionnés.
Le gouvernement et les syndicats abordent une période délicate d'ajustement réciproque de leurs stratégies, où la moindre erreur d'appréciation, le moindre faux pas, la plus petite déclaration intempestive peut coûter cher.
La mobilisation de mardi, jugée "exceptionnelle" par Bernard Thibault et François Chérèque, a déjà conduit l'exécutif à revoir ces plans initiaux. Les cortèges de manifestants, très étoffés et pas seulement dans les grandes villes, ont réuni 2,7 millions de personnes selon la CGT et 1,12 million selon la police. Soit une hausse de 35% à 40% par rapport à la journée précédente du 24juin. L'ampleur de la mobilisation est comparable par le nombre des manifestants (pas par celui des grévistes) à celui du 13 mai 2003 en pleine réforme Fillon des retraites.
Il devenait difficile dans ces conditions pour l'exécutif de s'en tenir à ses projets initiaux: garder le silence, laisser passer la journée de mardi sans réagir, et rendre publics jeudi – François Fillon est l'invité de l'émission "A vous de juger" sur France 2 – les ajustements du projet de loi sur les carrières longues et la pénibilité, peut-être aussi sur les polypensionnés.
Un premier signe a donc été envoyé aux leaders des organisations syndicales qui, de Jacques Voisin (CFTC) à Alain Olive (UNSA) en passant par MM.Thibault et Chérèque, avaient tous demandé au gouvernement d'annoncer "rapidement" les éventuelles concessions qu'il était prêt à faire. "Que fait le gouvernement? Ils ont roupillé pendant l'été? Il nous faut des réponses demain matin", commentait mardi soir sur France 2 M.Chérèque.
FERME SANS ÊTRE AUTISTE
Mercredi à 9 heures, le chef de l'Etat a tenu une réunion d'arbitrage sur les trois thèmes encore ouverts à la discussion. Comme prévu, les modifications du projet de loi ne touchent pas le cœur d'une réforme que l'Elysée n'a pas l'intention de "mettre en lambeaux".
L'intervention du chef de l'Etat vise aussi à montrer aux syndicats et à l'opinion publique que le pouvoir peut être ferme sans être autiste. Depuis qu'il a ouvert le chantier des retraites, l'exécutif campe sur ses positions initiales.
A une question démographique (la dégradation du rapport actif-retraité), il faut, estime-t-il, apporter une réponse démographique, en reculant les bornes d'âge de la retraite de 60 à 62 ans pour l'âge légal et de 65 à 67 ans pour l'âge de la pension complète sans décote. Mardi à l'ouverture du débat parlementaire sur la réforme, MM. Fillon et Woerth l'ont redit sans aucune ambiguïté.
Or c'est sur ces mesures d'âge, censées couvrir 44% du besoin de financement des retraites en 2018 et contribuer à assainir les comptes publics, que se cristallise l'opposition des syndicats. Entre le désir de préserver sa réforme et la volonté de ne pas paraître fermé, les marges de manœuvre du pouvoir étaient limitées.
Celles des syndicats le sont tout autant. Après le succès de mardi, l'heure des difficultés a sonné. Quelle suite donner au mouvement? Comment l'organiser pour peser au maximum sur l'exécutif? Et jusqu'où aller? Telles sont quelques-unes des questions que doit régler mercredi après-midi l'intersyndicale. Sa tâche est d'autant moins facile que les divergences en son sein entre contestataires et réformistes n'ont pas disparu.
Les syndicats feront tout pour préserver la dynamique de l'unité d'action, bien rôdée depuis plus d'un an et demi, parce qu'ils la jugent positive. Mais s'ils sont tous d'accord pour juger "injuste" le projet gouvernemental, ils sont en désaccord sur ce qu'i l conviendrait de faire pour sauvegarder les retraites. Il y a un monde entre Force ouvrière et SUD, favorables au "retrait" du projet de loi, et la CFDT, qui réclame la mise en place d'une réforme "systémique" inspirée de ce qui s'est fait en Suède.
Il est probable que le pouvoir ne négligera aucune occasion pour enfoncer un coin entre les différents membres de l'intersyndicale.
Dans l'immédiat, tout est fait pour préserver la dynamique unitaire. A défaut de s'entendre sur l'opportunité de s'engager dans un scénario de grève générale, Sud d'un côté, la CFDT et la CGT de l'autre, devraient au moins s'accorder sur une série d'initiatives de nature et de portée différentes. La priorité pour les uns et les autres est d'entretenir la mobilisation et, si possible de l'élargir.
Mardi soir, parmi les hypothèses envisagées par les organisations, figurait l'idée d'une adresse commune des syndicats au Parlement et au gouvernement avant l'adoption, prévue le 15 septembre, du projet de loi par les députés. Les différentes composantes de l'intersyndicale semblent d'accord pour considérer que de nouvelles mobilisations s'imposent avant le 29 septembre, date d'une journée européenne d'action sur la croissance et sur l'emploi, et bien sûr avant la fin du débat parlementaire. Une journée de manifestations pourrait être organisée le 17 ou le 18 septembre, et des grèves ne sont pas exclues.
Sur ce dernier sujet, toutefois, la prudence est de mise. Le secrétaire général de la CFDT pense que "les salariés n'ont pas la possibilité de se payer plusieurs jours de grève". Son homologue de la CGT n'est sans doute pas très loin de le penser aussi.
Quelles que puissent être les pressions de SUD ou de FO, aucun des deux ne jettera de l'huile sur le feu pour ne pas mettre en péril la dynamique actuelle de la protestation mais aussi pour ne pas jouer les apprentis sorciers.
Acteur majeur du mouvement de 1995 qui paralysa les transports et le pays pendant trois semaines et fut indirectement à l'origine de la dissolution de 1997, Bernard Thibault n'ignore pas qu'une partie de sa base, notamment à la SNCF, rêve d'en découdre avec Nicolas Sarkozy et de se lancer dans une grève reconductible. Pour l'instant, il n'a pas fait sien ce scénario. Mais il sait comme le sait le président que dans un pays comme la France, le risque de débordement ne peut jamais être exclu.
Claire Guélaud
Article paru dans l'édition du Monde du 09.09.10.