07 septembre 2010
Télé éducative
Aujourd'hui, un post de pure science-fiction. Non, ce n'est pas la suite de mes interrogations lasses sur les pitches de SF (qui d'ailleurs ont largement été atténuées par la découverte de District 9 sur les recommandations éclairées de Livia), mais un post qui en lui-même, relève de l'imaginaire.
Il y a eu une naissance, récemment, dans mon entourage. Fait peu courant parce que, globalement, on est en froid avec la plupart des membres de notre famille, mais surtout parce que, même en cherchant bien parmi ceux à qui on ne cause plus, on doit être 5, à tout casser, à être dans la tranche d'âge où on pourrait faire des enfants. Dont ma sœur, moyennement motivée, et ma cousine, pas tellement plus convaincue mais bon, elle vient de se marier, on en reparlera dans quelques temps ; du côté des garçons j'ai pas de nouvelles mais apparemment ce n'est pas à l'ordre du jour. Quant à moi, j'ai clairement fait savoir qu'il valait mieux porter ses espoirs sur autre chose, qu'au mieux je veux bien produire quelques textes chaque semaine, mais que c'est tout ce qu'on fera sortir de moi (et à l'approche des trente ans, mes parents commencent à réaliser que je ne déconne pas et que les chances que je change d'avis s'amenuisent). Donc, la natalité, dans ma famille, c'est pas ça qu'est ça. Obligée de me tourner vers les proches en-dehors du cercle familial.
Cette naissance a donc déclenché quelques interrogations de ma part, dont le tout naturel : "et tu vas lui faire regarder quoi, à ton gosse ?". Ce qui, nous en conviendront tous, est une question des plus évidentes lorsque l'enfant paraît. Devant l'absence de réponse de mon interlocutrice (dévoilant par là que son projet éducatif n'est pas encore bien clair), je me suis donc mise à imaginer ce que moi, je ferais voir à mon gamin, si par le plus grand des malheurs il m'en venait un.
Malheur qui, si je puis me permettre, serait probablement réciproque chez ledit bambin : "maman c'est quand qu'on mange ?"/"chut, laisse-moi finir ma saison".
En tant que téléphage, la télévision fait partie intégrante de l'arsenal que je déploierais pour éduquer un gamin. C'est tellement évident que je ne devrais même pas avoir besoin de le préciser.
Je ne dis pas qu'il serait question pour moi de me servir de la télé comme d'une nourrice, au contraire. Je ne vois pas l'intérêt de mettre un chérubin qui ne sait pas encore parler devant une télé qui blablate à longueur de temps, pour commencer. On ne regarde pas la télévision parce que ça bouge et ça fait du bruit, on la regarde parce qu'elle raconte quelque chose, de réel ou de fictif (souvent un peu des deux), et pour cela il faut que la parole soit déjà présente, ça semble logique. Certes, je ne suis pas très au fait de ce que disent les spécialistes sur la capacité de compréhension d'un bébé avant et après qu'il possède le don (ou la malédiction, ça dépend du point de vue) de parole, ça se trouve un bébé est tout-à-fait capable de piger ce qui se dit dans un programme pour jeunes enfants, je n'en sais rien, je m'en fiche. Là, tout de suite, un expert débarquerait pour me dire qu'un enfant de 6 mois peut suivre sans problème un épisode d'A la Maison Blanche, c'est le même tarif. Si le gamin ne peut pas parler, je ne vois pas pourquoi il regarderait la télé.
Évidemment, je ne le parquerais pas dans son berceau pendant que je regarde moi-même la télé, il serait éventuellement envisageable que quand je la regarde, il soit dans les parages, donc il pourrait l'entr'apercevoir, mais je ne lui ferais pas spécialement regarder.
Ce serait plutôt une façon réaliste de lui faire comprendre que dans les décennies à venir, s'il me cherche, il sait où me trouver : cherche l'écran, tu trouveras maman.
Ainsi donc, être capable de communiquer avec le gamin semble, de façon instinctive, logique. S'il ne peut pas discuter de ce qu'il voit, ça n'a pas le moindre intérêt. Ensuite, effectivement, viendraient les années les plus horripilantes, quand le gamin peut parler mais n'a rien à dire et finit par faire du bruit. Je vous avoue que ces 3, 4, ou peut-être 5 années-là sont une des grandes raisons qui m'incitent à ne pas faire d'enfant (ça, et les 15 suivantes ; en gros, je suis tout-à-fait prête à avoir un enfant s'il m'est livré majeur, par exemple). Il y a probablement des choses à faire regarder à un enfant qui est en maternelle, mais pour ma part je n'en vois aucune actuellement.
En fait, je commence à avoir une idée précise des séries que je ferais regarder à un enfant vers l'âge de 6 ou 8 ans, mettons.
Instinctivement, j'ai envie de dire que beaucoup des séries que j'ai vues dans ma propre jeunesse lui seraient recommandées. Punky Brewster, par exemple, très bien. Ricky ou la Belle Vie, très bien aussi. Des séries mignonnes, tous publics (enfin, je me suis pas fait d'intégrale mais d'après mes souvenirs et les pilotes revus récemment, je pense quand même que je ne m'avance pas trop), mais pas abrutissantes. Je ne vais pas me donner la peine de donner naissance à un gamin si c'est uniquement pour qu'il aille grossir les flots de décérébrés qu'on trouve déjà en quantités un peu partout. Non, si je dois avoir un mioche, autant ne pas le trépaner. Car ces séries ont quand même le mérite de n'être pas totalement des séries de Bisounours : une orpheline qui vit dans la rue, un petit garçon qui n'a pas de maman... bon, on ne va pas se le cacher, ce que je vais donner à manger téléphagiquement à mon gamin imaginaire, c'est pas quelque chose d'idéalisé.
Hélas, je n'arrive pas à penser à un exemple de série récente qui s'inscrive dans cette démarche. Des idées ?
Mais surtout, c'est ensuite que les choses se jouent. Jusque là c'est facile : le mioche vit en circuit quasi-fermé, il n'a pas de raison de sortir du cadre scolaire ou familial sans encadrement, il est culturellement contrôlable. Mais vient l'âge honni de la pré-adolescence, et là, tout bascule. Les forces qui sont en jeu sont énormes. Il faut lutter contre la société toute entière.
Le défi ? Éloigner mon rejeton des tentations des séries Disney.
En garde, héritières hélas inévitables de Hannah Montana, remakes honteux de Phénomène Raven, surenchères de niaiseries chantées à la Sonny with a Chance ! Ce n'est pas parce que tout le monde les regarde qu'il faut que le fruit de mes entrailles en fasse autant. Et si tout le monde se jette du haut d'un pont, est-ce qu-... Hm. Passons. Non, c'est un combat à la vie à la mort pour le salut de l'âme de la Bête pré-adolescente qui vit dans la chambre dans laquelle je ne peux plus entrer. Oh, c'est sûr, je vais me faire haïr pour ça, mais de toute façon je vais me faire haïr, alors autant que ce soit pour la bonne cause.
Et avec les années, le défi va augmenter. Alors qu'inexorablement, je vais devoir laisser l'Animal sortir de la maison de plus en plus souvent, pour des motifs qui me sembleront ridicules tels qu'aller faire du lèche-vitrines, se retrouver pour jouer au foot, ou même, jusqu'où ira la débauche, des pyjama parties (et encore, Dieu nous préserve des goûters d'anniversaires, mais enfin tu l'as pas déjà fêté l'année dernière ?!), je vais perdre le peu de contrôle que j'avais sur la consommation téléphagique de la Bête, c'est sûr.
C'est pour ça qu'il faut prendre les devants avant même les 10 ans. C'est ce que préconisent tous les spécialistes de la téléphagie. Statistiquement, c'est à ce moment-là ou jamais. Il me faudra alors regarder le plus possible de bonnes séries avec mon gamin, des séries récentes, évidemment, on ne veut pas l'effrayer ce petit, mais des classiques, aussi : 10 ans, La Belle et la Bête. 11 ans, Une Nounou d'Enfer. 12 ans, V. 13 ans, Oishii Gohan.14 ans, Pushing Daisies. 15 ans, Angela, 15 ans. 16 ans, A la Maison Blanche, Boston Public, Mousou Shimai, Roseanne, Better Off Ted... Je n'aurai jamais assez de temps !
Et ne pas juste lui faire regarder, non, regarder avec lui, et discuter, discuter, discuter, et expliquer, expliquer, expliquer...
Ça m'épuise juste d'en parler.
C'était déjà tellement difficile de m'éduquer moi-même téléphagiquement ! Regardez : bientôt 30 ans, et j'en suis à peine à aborder l'Asie, l'Afrique, l'Amérique du Sud... Non, il y a trop de boulot. La tâche est énorme.
Rien que pour ça, papa, maman, désolée, mais je ne ferai jamais d'enfant.