La vidéo de Sigalit Landau, Barbed Hula, m’avait fait forte impression à la Maison Rouge. J’allais donc plein d’espoir voir son exposition Dining Hall au KW de Berlin (jusqu’au 13 Janvier). Hélas !
D’abord, quatre salles dont les installations rappellent avec un humour distancié l’époque du sionisme conquérant, la nostalgie des kibboutz glorieux et la création de l’Etat d’Israël : un lave-vaisselle géant récupéré dans un kibboutz, une cuisine et un salon petit-bourgeois (haut-parleurs dans la cuisinière, et discours politique à la télé) et de bien jolis lustres en fil de fer barbelé couverts de sel de la Mer Morte : symboles un peu trop lourds, absence de finesse.
Ensuite une grande salle pleine de corps sanguinolents, vautrés au sol, escaladant une colonne (de Brancusi ?), et, dans un coin une porte qui pourrait être celle d’un crématoire. Du pathos partout, mais si peu de mesure.
Enfin, après une vidéo gadget (repeindre une maison le jour en noir et la nuit en blanc), une charmante employée du musée tient un stand de serrurerie, datant des années 1930, avec photos jaunies et enseignes en hébreu. On y refait votre clef, mais à l’envers, en symétrie : clef qui n’ouvrira rien, clef immatérielle, clef des songes ou du coeur. Sislej Xhafa avait déjà souligné le lien entre clef et intimité. Pour Sigalit Landau, la ligne entre les deux clefs est une coupure comme il y en eut à Berlin et à Jérusalem. Moi, je me suis souvenu d’une vieille femme palestinienne rencontrée il y a longtemps dans un camp, qui, de sa maison abandonnée après la Naqba, n’avait emporté que la clef, seul lien qui lui restait avec sa patrie.
C’est un peu triste d’être déçu alors qu’on attendait beaucoup, mais je n’ai pas retrouvé ici la force et la dignité de Barbed Hula. Dommage. Mais ces deux articles, ici et là, y ont vu plus de profondeur que moi. Quelques photos ici.