Résilience

Publié le 04 septembre 2010 par Insideamerica

13% de réduction de salaire pour le personnel non-enseignant, 12% pour le personnel administratif et 9% pour les enseignants : le médiateur chargé de résoudre la crise budgétaire qui menace notre nouveau district scolaire —comme de nombreux autres à travers tout le pays— n’y est pas allé de main morte !

Il faut dire que le déficit de l’Etat de Californie —près de 20 milliards de dollars depuis le début de la crise financière—  est le plus élevé du pays. Et comme il est interdit à un Etat de reporter des déficits d’année en année (ce luxe est réservé au gouvernement fédéral), cela oblige à des coupes sombres dans le budget californien.

Mais si les coupes sont sombres, la liste des mesures d’austérité est claire comme de l’eau de roche : réduction de salaire des employés de l’Etat de Californie, suppression des programmes d’insertion des enfants en difficulté, suppression de certains programmes de santé… Les mesures proposées par le gouverneur Schwartzenegger sont aussi limpides que cruelles pour la réputation « sociale » de la Californie. Un dur rappel que Schwartzenegger doit sa popularité à Terminator plutôt qu’à Kindergarten Cop (Le Flic des Maternelles).

Au niveau d’un district scolaire comme le nôtre, cela se traduit essentiellement par les réductions générales de salaires annoncées, mais aussi par la suppression de quelques programmes et une augmentation du nombre d’élèves par classe. Là aussi, si on regrette les coupes, on ne peut pas se plaindre du manque de transparence ! L’impact sur le budget de l’école s’affiche en première page de son site Web, ligne par ligne, avec les montants économisés. Passer de 24 à 28 élèves par classe fera économiser 1,7 millions de dollars au district, et la suppression du programme d’éducation pour adultes près de 300.000 dollars.

Mais quand les subventions nationales et fédérales viennent à manquer, il reste aux écoles publiques californiennes la “Mesure B”. C’est un peu l’équivalent du “Système D” à la française qui permet comme par magie aux écoles des beaux quartiers de rester à flot et d’avoir de meilleurs profs alors que l’austérité, comme l’Éducation, est supposée être « Nationale » et égale pour tous. Sauf que la Mesure B américaine est beaucoup plus transparente. Le principe est de soumettre au vote d’un district ou commune un supplément de taxe foncière pour le financement d’un projet local(*). Un quartier qui accepte un supplément de taxe pour l’éducation se trouvera donc doté de meilleures écoles, a fortiori si le quartier est riche.

Malgré les coupes franches dans son budget, l’école de notre quartier se verra donc équipée de nouveaux « SMART boards » dans chaque classe cette année en plus d’un computer lab flambant neuf, grâce à la générosité de la Mesure B. Ajoutez la générosité d’associations de quartier et de donateurs privés, et le budget de l’école se trouve soulagé du salaire annuel d’une documentaliste et du coût d’achat de tous ses livres scolaires.

Ce qui semble sans doute d’une injustice criante à de nombreux français (du moins ceux qui ne profitent pas du « Système D »), est ici vu au contraire comme une maigre et juste compensation de l’effort (étant entendu pour la plupart des américains qu’il faut sans doute avoir travaillé dur pour s’offrir une maison dans les beaux quartiers… mais ceci est un autre débat).

La Mesure B ne suffira toutefois pas à compenser les baisses de salaires des enseignants (on veut bien offrir un bel écran multimédia tout neuf aux bambins, mais faudrait voir à ce que les profs ne s’en mettent pas plein les poches quand même !). Eux ravalent leur salive et iront au turbin demain pour 9% de salaire en moins, et sans faire grève : parce que les chiffres sont les chiffres et que s’il est une vertu ici bien répandue, c’est celle de faire face aux réalités.

(*) à noter que la majorité des 2/3 est requise pour adopter une « Mesure B », et que la taxe proposée a un objet et une durée bien définie. C’est pas des taxes qu’on a plaisir à payer ça ?