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Penché sur les poches trouées, il faut bien constater que les couturiers de ce temps avaient bien fomenté leur œuvre : prendre dans la poche des uns ce qu'ils donnent dans celle des autres.
La fortune des uns est, de ce fait, incomparablement plus faible que celle des autres.
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L’économique est, au fond, assez simple pour être compréhensible par le poète moyen.
Soit une quantité constante de liquide devant circuler au long de tuyaux de longueur, elle aussi, stable. S’il n’est pas de fuite, ou de poches de rétention, et que le système n’autorise aucune évaporation inopinée, nous aurons à l’entrée et à la sortie une quantité inchangée.
Que quelqu’un ou quelqu’une se mette à forer le système, à en ouvrir la boite ou à s’y ménager quelque barrage discret, et voilà que ce qui sort se trouve en quantité amputée du prélèvement des saboteurs.
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Ainsi, si nous considérons une masse monétaire éditée en quantité suffisante, dans le vase clos d’une circulation normale de la monnaie, chacun devrait voir passer dans sa poche la même quantité d’espèces sonnantes et trébuchantes, et nous devrions voir entrer en caisse, au bout de cette circulation, une quantité inchangée de billets et de pièces.
Comme dans mon exemple cité plus haut, si la quantité s’affaiblit, c’est qu’il se trouve quelques petits malins pour faire des trous dans la tuyauterie, favoriser l’évaporation d’une partie de la fortune circulante, voire même créer quelques vannes discrètes pour en arrêter le cours.
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Le problème serrait de qualifier de tels actes.
Si nous considérons que soustraire une partie du patrimoine commun revient à restreindre les moyens d’une majorité pour l’avidité d’un particulier relève du vol, la qualification du délit est aisée.
Resterait à établir si l’attitude de celui ou celle qui prive ainsi la collectivité d’une part non négligeable de ses ressources agit sous l’emprise d’une bouffée délirante, ou s’il s’agit bien d’une préméditation.
Or, il s’avère que, depuis que l’humanité est entrée dans cette conception mercantile d’elle-même, si le nombre de délinquants s’est rétrécit, concentré dans une frange toujours plus faible, ceux là ne peuvent bénéficier de la moindre suspicion d’être des naïfs ou des pulsionnels justifiant d’un traitement psychiatrique.
Ils agissent donc de manière délibérée, n’hésitant pas à ériger leur comportement en norme de sociétés qu’ils considèrent à leur unique service, et l’immense majorité des spoliés comme leurs esclaves, taillables et corvéables à merci.
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Dès lors, nous pouvons considérer que non seulement ces êtres qui aujourd’hui pérorent à la tête de la finance internationale, des états les plus riches du monde, des instances du commerce mondial sont de dangereux malfaiteurs, mais qu’ils aggravent leur cas par une préméditation qui se transmet depuis des siècles, sans que la majorité aveuglée ne distingue le forfait.
Il s’agirait donc d’une mesure sanitaire élémentaire de se défaire de cette engeance qui mène l’humanité à sa perte et de rétablir, en confisquant les biens abusivement soustraits, la circulation normale des richesses qu’il ne resterait plus qu’à partager entre amis, sans crainte des crises que les faussaires nous imposent.
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Il est toujours très doux de rêver
Et d’écrire
Nous voici libéré d’un fardeau
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PS : on va sans doute m’objecter que, dans un contexte de croissance de l’humanité en nombre, la libre circulation des biens monétaires se trouverait à être compromise car réduite de facto. Que les esprits chagrins soient rassurés. Il s’agirait alors d’une mesure démocratiquement choisie et librement consentie que d’augmenter la masse liquide circulante, ou d’en contenir la quantité en veillant mieux aux gaspillages éventuels et en entretenant correctement le système d’arrosage, chaque graine de compétence et de création pouvant germer sans crainte.
Manosque, 30 juillet 2010
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