Un culot de ce calibre mérite bien un prix Nobel du mensonge. Voilà que cet individu (on dit bien cela d’un travailleur de base, pourquoi pas d’un ministre ?) a déclaré, promis, juré, craché, qu’il ne connaissait ni n’était intervenu pour faire obtenir à M. De Maistre, depuis employeur de son épouse, la Légion d’honneur, que, s’il la lui avait remise, c’est qu’en fait elle avait été demandée par d’autres. On lui place sous le nez une lettre à en-tête de l’Association de soutien à la candidature de Nicolas Sarkozy, datée, signée de sa main, où il demande pour le même conseiller financier cette décoration au même Nicolas, alors Ministre de l’Intérieur, et il a l’insolence de dire : «je n’ai jamais menti, je ne mens à personne, je ne mens pas à la Justice, je ne mens pas aux Français ! ». Bel aplomb !
Sous le feu des critiques, il avait confié un rapport, non pas à l’Inspection Générale des Finances comme le veut l’usage, mais à son chef, Jean Bassères qui, coïncidence troublante, avait été nommé à ce poste par le même sémillant Woerth. Alors que, par exemple, il faut des semaines à la Fédération française de football pour déterminer les responsabilités dans la grève en Afrique du Sud, ce rapport de l’IGF est, passez-moi l’expression, torché en une semaine. Celle-ci a suffi pour passer au crible des milliers de dossiers. Comme si d’ailleurs les recommandations se faisaient exclusivement par écrit !
Sur le contingent de ce même M. la Vertu, M. Godet Bernard, expert-comptable, a obtenu en 2008 la Légion d’honneur pour 35 ans d’activités professionnelles et de services militaires. Des millions de Français sont dans ce cas mais ils n’ont pas, eux, accompli cette tâche ô combien vitale pour le rayonnement de notre pays, de certifier les comptes de la campagne municipale du Ministre du Budget, un Everest d’intégrité.
Le toujours innocent (plutôt que de retenir le sens étymologique de « incapable de nuire », je suis tenté de penser ici « aux ressources intellectuelles limitées ») M. Woerth avait, en vue de cette même campagne municipale, rempli et signé une demande de prêt bancaire dans laquelle il certifiait avoir pour seule ressource 3000 euros mensuels. Devant la stupéfaction suscitée par un mensonge de cette pointure, notre Ministre n’hésite pas à déclarer que, s’agissant d’une élection municipale, par souci de cohérence, il avait jugé opportun de ne mentionner que sa rémunération de maire.
En commençant ce billet, je pensais, par symétrie avec un précédent, à le conclure en déclarant : qui vole un bœuf vole un œuf. Mais non, qui vole des bœufs ne vole rien, pas même une plume de cheval. Non, il est révéré, admiré, glorifié, qui sait, promu. Vive ce beau royaume de Sarkozye !