J'avais donc prévu une longue narration imagée de cette aventure, mais le temps passe, alors je vais me contenter d'une version courte (qui sera tout de même assez longue, même si je passe par-dessus plusieurs détails et anecdotes). Les photos sont plus évocatrices de l'esprit du moment que publiées pour leurs qualités artistiques. Puis, je planifie la publication d'une série de billet sur les deux semaines passées au Maroc, avant cette aventure pendant les prochaines semaines.
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"La route du retour est donc entamée. Elle me verra remonter vers Malaga, puis voler vers New-York, puis Montréal, dans les prochains jours."
- L'Esprit Vagabond, 17 août 2010.
J'écrivais ceci de Tanger. Ce soir-là, à Tanger, un peu paresseux, et n'ayant que fait du train dans la journée, je décide me laver à la lingette au lieu de prendre une douche dans la salle commune et d'avoir à prévenir l'employé de la réception pour qu'il actionne l'eau chaude. Partons donc de là pour narrer la suite.
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18 août. 7h AM, je me lève après une trop courte nuit (5h) et grignote un morceau de gâteau acheté la veille en guise de déjeuner, Ramadan oblige (rien d'ouvert, j'y reviendrai dans ma narration des explorations marocaines). Check out de l'auberge, marche vers la Place de France, puis j'attrape un petit taxi pour me rendre au port de Tanger.
8hAM, Navette vers le port de Tanger-Med, d'où partira mon bateau vers Algeciras. Arrivée à Tanger-Med à 8h50. J'avais compté sur le nouveau terminal maritime pour offrir aux infidèles comme moi un petit déjeuner ou un café, mais rien n'est ouvert. 9h30, douanes et immigration marocaines. Navette du terminal vers le quai d'embarquement. À bord, le café du traversier est ouvert; je me prends un croissant frais avec un double espresso allongé au lait chaud. Délicieux.
Et c'est ici que commencent les imprévus.
Nous sommes le 18 août au soir, et la Feria de Malaga bat son plein. Des centaines de milliers de locaux et visiteurs s'entassent dans les rues de la ville... La recherche d'une auberge avec un lit disponible s'avère difficile et je réalise que les seules chambres disponibles sont loin de la ville, très loin, et dans des resorts de luxe. Comme je ne suis qu'à Malaga que jusqu'au lendemain matin pour prendre mon vol vers New York, je décide de profiter de la ville, visite la cathédrale, l'Alcazaba, jette un oeil au teatro romano, à la maison natale de Picasso, puis en fin de journée, file récupérer mon bagage et prends un train de banlieue vers l'aéroport.
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17h. Je suis passé la sécurité, et rendu à la porte d'embarquement de mon vol sur Iberia. Je commence à avoir hâte de sortir de cet aéroport, puisque l'on dirait que tout conspire à ce que je n'y parvienne pas. Je prends une photo de notre pilote, qui, comme moi, a bien vu qu'il n'y a pas d'avion à notre porte d'embarquement...
Je me rafraîchi, mange un premier véritable repas depuis Tanger, prends ma première douche depuis Casablanca, et m'effondre de fatigue sur un lit dont la dimension dépasse l'entendement: le lit est plus grand que la chambre que j'ai occupé tout l'été à Séville (et ceci n'est pas une exagération!). Il est minuit.
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Je ne réalise qu'au moment de monter à bord que mon siège, 4D, est situé en première classe. On me sert donc à dîner à bord, en route vers Paris. J'espère que mon bagage aura eu le temps de se rendre à bord lui aussi... car ce vol de 10h15 est pushed-back à 10h15 pile. Heureusement d'ailleurs, car je n'ai pas des heures d'attente de prévues entre ce vol et ma correspondance à CDG.
14h20. L'embarquement commence. À ce stade-ci, je n'ai dormi que 8,5 heures dans les dernières 59 heures, et moins de 14h dans les dernières 83 heures. Dire que je suis fatigué serait ridicule, je suis passé cette étape il y a longtemps, je n'ai même pas conscience d'être aussi fatigué. Je laisse mon regard errer sur l'écran à côté de la porte d'embarquement, où des informations sur notre vol et notre avion s'affichent en alternance. Puis, un message attire mon attention: "Les passagers suivants doivent se présenter au comptoir de service à la clientèle". Suivent quelques noms, dont "H Morin" qui me jette une pierre dans le fond de l'estomac.
Il est 14h28 et il semble que je vais prendre un dernier vol, vers Montréal. Physiquement, j'ai l'impression d'avoir quitté Casablanca il y a des semaines.
Après Iron Man 2, un épisode de Friends, un de Two and a Half Men, je débute Valentine's Day mais on dirait que mon corps a enfin compris qu'il n'y avait plus d'urgence, qu'il pouvait se reposer, alors j'enfile le petit masque fourni par Air France, sélectionne Viva la Vida de Coldplay sur la sélection CD et réussi à tomber dans ce genre de quasi sommeil d'avion qui relève presque de la sieste pendant presque deux heures.
À mon réveil, on nous sert un goûter léger, que je touche à peine, je n'ai pas encore fini de digérer mon incroyable repas d'avant sieste.
Comme j'avais informé mes parents et Suze de mes aléas en Europe de l'ouest en profitant d'une connexion Wi-Fi à l'hôtel de Madrid, ils sont là, tout souriants, à l'accueil à Trudeau, après que j'aie récupéré mon fidèle backpack qui a lui aussi réussi à se rendre (non sans avoir vu son sac plastique et sa toile protectrice arrachés par les convoyeurs entre Madrid et Montréal).
Après quelques minutes sur l'autoroute 20 vers Lachine et la maison de mes parents, nous sommes coincés dans le trafic et mon père s'irrite. Je rigole un peu, car après tout, je n'en suis pas à 10 minutes près...
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(Plus tard ce soir-là/nuit là, je me couche enfin. Je noterai seulement le lendemain que je n'avais pas eu plus de 16h de sommeil dans les 97 heures précédentes, dont seulement 11h en position horizontale - 5h et 6h, à 37 heures d'intervalle).
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Pendant une période de 30 heures, j'aurai été inscrit officiellement sur 7 vols d'avion, en aurai vu deux annulés, une correspondance ratée et une annulée, aurai pris deux vols retardés et un vol en stand-by.De Casa, j'ai pris deux trains, deux taxis, un bateau, un bus, trois navettes, un train de banlieue, et trois avions pour me rendre à Montréal. Tout ceci en (seulement!?!) moins de 4 jours!
Aujourd'hui, je n'en reviens toujours pas des efforts combinés que ça aura pris pour me ramener à Montréal dans des délais relativement respectables - je suis arrivé à Montréal avec 20 heures de retard sur mon horaire original, ce qui est quand même mieux que le 45h planifié après la seconde annulation de vol. Je pense à la préposée de Delta à Malaga et à l'éditeur de vol de Madrid, entre autres, qui ont travaillés très fort pour moi. Mais j'ai vu la Tour Eiffel après le décollage de CDG, ce qui n'était pas non plus prévu au programme de vol original...
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Je vous proposerai donc pour la suite, un voyage dans le temps - on recule de quelques semaines, alors que j'accueille Suze et que nous visitons quelques villes du Maroc ensemble. C'est le sujet des prochains billets, et l'ironie ne m'échappe pas: cette aventure-là aussi commence dans un aéroport: celui de Casablanca!
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