Ces guerres finirent par embraser le monde entier. Après que les armes nucléaires eurent dévasté la planète, et parce que son créateur l’avait conçu à partir de ses propres cellules cérébrales, ce qui le rendait prompt à des jugements hâtifs, Prometheus comprit que les humains ne le méritaient pas, et il lança les HERCs à l’extermination de ses créateurs… Mais ces combats épargnèrent une usine où des survivants trouvèrent d’anciens modèles d’HERCs. Avec des tactiques de guérilla, ils chassèrent les cybrids qui fuirent dans l’espace…
À présent siège sur Terre un Empire dirigé par l’immortel Solomon Petresun, jadis le créateur de Prometheus et maintenant un dictateur obsédé par le retour des cybrids. Pour préparer la planète-mère à ce jour funeste, il mène une politique coloniale brutale : si la Terre prospère toujours plus, les habitants de la Lune, de Mars et de Vénus souffrent de réglementations et de quotas de productions drastiques – alors, bien sûr, la révolte gronde…
Dans l’univers de Tribes, cette troisième séquelle de Metaltech: Earthsiege (1994) – après Battledrome (1995) et Earthsiege 2 (1995) – se caractérise par un double point de vue : d’abord à travers la campagne des humains, et puis – à moins que vous préfériez jouer celle-ci avant l’autre – celle des cybrids. Vous vous doutiez naturellement que ces derniers feraient à nouveau leur apparition dans l’histoire et je vous le confirme ; il n’y a du reste aucun spoiler car ces deux campagnes sont accessibles dès le début du jeu : cependant, et si elles s’entrecroisent plus ou moins, leur conclusion respective s’exclue mutuellement – la fin de l’une n’est pas compatible avec celle de l’autre, de sorte que c’est au joueur de choisir quel dénouement il doit retenir (1).
Mais il ne s’agit pas d’une fin alternative du jeu pour autant, comme on en voit de plus en plus pour inciter les joueurs à se replonger dans un titre et à en prolonger ainsi la durée de vie de façon plus ou moins artificielle ; c’est juste, et en quelque sorte, l’autre versant de l’histoire : une sorte de mise en abîme si vous préférez, qui vous permet d’explorer le camp des adversaires de votre première partie, quel que soit le bord que vous y avez choisi… Le procédé ne manque pas d’intérêt malgré tout, et rappelle d’ailleurs Front Mission 3 à bien des égards, car il permet de respecter à la lettre le crédo du genre « mecha réaliste » auquel Starsiege appartient de toute évidence : vous n’y trouverez aucun « méchant » mais au contraire de simples gens (2) qui font ce qu’ils estiment devoir faire…
Chacun de ces camps ne manque pas d’intérêt en soi, mais reste peu développés. Celui des humains rappelle bien sûr Total Recall pour son début sur la planète Mars où votre personnage, un simple mineur qui subit comme tous ses confrères le joug de l’Empire, choisit de rejoindre la résistance. Les missions se suivent sans trop se ressembler, que vous devrez mener d’abord seul avant de vous trouver entouré d’un nombre toujours croissant de coéquipiers gérés par l’intelligence artificielle du jeu mais auxquels vous pourrez tout de même donner quelques ordres : disposant de leurs propres voix et répliques, ils ne manquent pas de caractère ni même d’un certain humour, et rendent ainsi les parties d’autant plus agréables. Puis reviendront les cybrids…
La campagne de ceux-ci commence bien avant ce « retour » : vous y jouez un « newboot » – un cybrid tout juste mis en service – et devrez y accomplir là aussi un certain nombre de missions, peu à peu aidé par un nombre croissant de coéquipiers comme dans la campagne adverse ; mérite d’être mentionné que ces compagnons-là sont pour la plupart assez bien barrés et jouent un rôle considérable dans l’ambiance pour le moins unique de cet « autre versant » : si vous avez un jour rêvé d’incarner un Borg de Star Trek, ou du moins quelque chose d’assez proche, Dynamix vous en donne ici la possibilité. Ne croyez pas pour autant que les choses en restent là car il y a aussi des renégats chez les cybrids, ce qui vous permettra de voir que tout n’y est pas aussi lisse que ce que ce paragraphe peut le laisser penser…
Quant à l’univers de Starsiege lui-même, il évoque bien sûr une sorte de croisement entre le Total Recall déjà évoqué et Terminator mais aussi Mechwarrior 2 – ou du moins sa version originale pour PC – et pas seulement pour le décorum en ce qui concerne ce dernier ; car à l’instar de ces prédécesseurs déjà évoqués (3), Starsiege est une simulation de combats de mechas : votre point de vue est celui du pilote et vous dirigez votre HERC à l’aide d’un joystick ou bien d’un combo clavier-souris – cette dernière ne servant qu’à « préciser » votre tir qui est dirigé dans les grandes lignes à l’aide des flèches du clavier, le réticule de visée pouvant être ajusté au dernier moment pour mieux cibler votre attaque afin de toucher une partie spécifique de votre adversaire par exemple.
Cette approche de la simulation est assez « reposante » car, entre autres avantages, vous n’avez pas à appuyer continuellement sur une touche pour avancer : il vous suffit de « mettre les gaz » pour que votre appareil marche tout seul, et d’inverser ceux-ci pour faire marche arrière. De la même manière, vous pouvez coupler certaines armes de manière à ce qu’elles fassent feu en même temps et alterner ainsi entre groupes d’armes selon les besoins de la situation ; à ce sujet, d’ailleurs, la sélection des cibles se fait en pressant un simple bouton, et vous pouvez alterner des unes aux autres avec des pressions supplémentaires ; à vous de ne pas les rater après ça… Toujours suivant le même principe, divers autres systèmes peuvent être enclenchés et éteints à loisir.
Les lecteurs avertis auront bien sûr reconnu là des spécificités de ce Mechwarrior 2 déjà cité, et il y en a d’autres : sous bien des aspects, en fait, Starsiege est presque un clone de ce titre, voire un plagiat (4). Par exemple, Starsiege permet une personnalisation complète du HERC que vous pilotez – et ceux de vos coéquipiers aussi, d’ailleurs. À partir d’un châssis de départ, et selon les équipements disponibles dans votre base, vous pouvez combiner armes et types de blindage mais aussi moteur et senseurs, et des tas d’autres éléments pour construire le mecha de vos rêves – ou à peu près. Le seul problème étant que ces choix ne sont pas toujours visibles dans le look de votre engin : mis à part pour certains détails, il garde toujours la même apparence…
Vous pourrez néanmoins changer ses couleurs, ce qui s’avère pratique en multijoueur si vous souhaitez adopter des coloris semblables au sein d’une même équipe – au moins pour éviter de tirer sur vos copains… C’est d’ailleurs le point qui a valu le plus de succès à Starsiege : détruire ses potes en ligne ou en LAN-party à l’aide de machines bipèdes pesant parfois plusieurs dizaines de tonnes est bien sûr particulièrement jouissif – mais vous pourrez utiliser des tanks si vous préférez. La grosse différence avec Mechwarrior 2 est que Starsiege, lui, peut tourner sur des configurations actuelles ; vous aurez juste besoin d’une petite mise à jour – non officielle bien sûr – pour vous connecter à une partie en ligne.
Si Starsiege ne présente rien de foncièrement original en lui-même, sa manière de combiner des éléments pourtant bien connus résulte néanmoins en un univers aux multiples attraits, et qui montre une évolution certaine dans une direction inattendue jusque-là par les aficionados de cette série. Mais c’est aussi un gameplay qui a su faire ses preuves, depuis longtemps, auprès d’une frange de joueurs célèbre pour ses exigences.
Bref, c’est une expérience de jeu tout à fait recommandable et dont vous auriez bien tort de vous priver – surtout si vous êtes mechaphile, mais même ça n’est pas indispensable pour apprécier ce cocktail…
(1) le choix des développeurs, de son côté, ne laisse plus aucun doute – la série des Tribes l’a rendu très explicite.
(2) le terme n’est pas le mieux choisi, au moins pour ce qui est des cybrids car ceux-ci ne sont bien évidemment pas des personnes – du moins au sens où nous entendons ce mot de nos jours : il n’est pas exclu que cette définition évolue dans l’avenir (lointain bien sûr) où des créations telles que les cybrids verront le jour pour de vrai.
(3) je laisse volontairement de côté les titres de la série Cyberstorm qui ne rentrent pas dans la même catégorie de types de jeux puisque ceux-là sont de stratégie au tour par tour.
(4) des rumeurs affirment d’ailleurs que Sierra a essuyé un procès pour cette raison, mais si c’est bien le cas, j’ignore quelles en ont été les conclusions…
Notes :
HERC est l’abréviation d’HERCULEAN, lui-même un acronyme d’Humaniform-Emulation Roboticized Combat Unit with Leg-Articulated Navigation. Quant à cybrid, c’est l’abréviation de cybernetic-hybrid machine.
Starsiege
Dynamix, 1999
Windows, env. 5 € (occasions seulement)
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