Quatre jours riches en émotion, et en plein d'autres choses ... (2) : où l'on boit et l'on mange !

Par Eric Bernardin

Après une heure de discussion, nous partons ensemble au château de Sassetot où nous allons dîner, puis y dormir en ce qui me concerne. Comme la photo ne l'indique pas, il faisait nuit, et il tombait des trombes d'eau...

Nous sommes accueillis par Jean-Philippe que j'avais rencontré l'année dernière qui nous place dans un salon privé afin que nous ouvrions en toute tranquillité les bouteilles que nous avons amenées. Ca nous permet aussi de s'exprimer bruyamment sur les qualités ou les défauts d'un vin sans déranger les autres clients.

Nous démarrons par un Chablis 2008 d'un domaine peu connu, le domaine d'Elise. Et pourtant, il mériterait de l'être, car c'est vraiment bon. Le nez est fin et intense à la fois, sur des notes de fumée et de craie humide, puis en s'aérant, part sur la noisette grillée, le zeste de citron. La bouche est ample et élancée, avec une acidité évoquant une lame d'acier. Le tout est gourmand et tonique, se terminant sur une finale à la noble astringence, finement lardée. J'aime vraiment bien ce vin dont je me ressers maintes fois, découvrant toujours de nouvelles facettes.  Dans quelques années, cela devrait donner quelque chose de très intéressant ! Pour l'accompagner, il nous est servi une émulsion d'huître qui renforce la minéralité et la fraîcheur du vin :

Ce n'est pas du tout ce qui nous est apporté : sur la photo (assez catastrophique, j'en conviens), on devine des ravioles de cèpes, bouillon de langoustine, crème de gingembre. Quand on les mange, c'est par contre délicieux, très marqué par le cèpe, avec des notes presque fumées. Le bouillon est excellent. Le vin parfait serait plutôt un Meursault d'une quinzaine d'années, où un Pessac Léognan blanc des années 80 (Chevalier 85, par exemple).

Là, il n'y a pas d'intitulé du plat. C'est une pièce de boeuf, avec un accompagnement tout ce qu'il y a de varié Un peu trop, peut être. Mais comme j'avais apporté de quoi boire, c'était bien qu'il y ait aussi de quoi manger...

Le sort d'une première bouteille fut vite réglé : elle était bouchonnée (pas souvent que ça m'arrive). Dommage. J'avais vraiment envie de faire découvrir ce rouge à Jean-Jacques. Ce n'est que partie remise...

La deuxième était impeccable. La robe semble assez peu concentrée. Le nez marqué par le fer au départ (style sang séché) s'ouvre à l'aération sur des notes de fruits noirs (cassis, surtout), de tabac, de cuir, tout en élégance. La bouche est élancée, à la matière fine et soyeuse. Un vin aérien, à la grande buvabilité. Un détail ne trompe pas : les verres se vident rapidement. C'est un château Nogues 2002. Je trouve que ce vin est resté très jeune malgré une structure qui aurait pu faire douter de sa garde.

La troisième était un autre vin que je voulais faire découvrir à Jean-Jacques. Ce qui est drôle, c'est qu'il a contacté le producteur il y a peu pour avoir des échantillons ;o) C'est pas beau, la vie ! C'est la Tina 2008 du Champ des Soeurs, déjà évoquée ICI il y a peu. Il faut dire que JJ lit mon blog. Et comme il cherchait un bon Fitou... Y avait pas besoin de chercher longtemps. Au départ, le vin est vraiment réduit. Après une bonne aération, les fruits noirs épicés apparaissent. En bouche, la matière est dense et fruitée, avec des tannins veloutés et une bonne fraîcheur. Je crois que Jean-Jacques a été plutôt séduit, et que le Champ des Soeurs devrait être commercialisé sous peu à Fécamp...

Nous avons continué avec un autre vin du domaine : Lady M, un liquoreux issu de grenache blanc passerillé. Il m'a moins convaincu que lors de mon passage à Fitou. Mais je crois que là-bas, le vin était ouvert depuis un certain temps et s'était complexifié. Dans un premier temps, il était plutôt sur l'abricot sec, puis il est passé sur la figue, l'écorce d'orange. Tout en gardant une bouche assez monolithique, manquant de sensualité. Nous l'avons testé sur plusieurs fromages : bleu, époisses, chèvre sec. Rien d'inintéressant, mais rien de renversant non plus. Bon, c'est pas très grave. A réessayer une autre fois...

 

Nous avons fini avec une rareté (en France, en tout cas) : un Kagor de Massandra, vignoble créé sur ordre du Tsar Nicolas II en Crimée pour fournir la Cour. Issu du cépage  Sapéravi (à jus noir), c'est un vin inspiré du Black Wine cadurcien (Kagor est une déformation de Cahors). Le raisin est chauffé longuement puis subit une macération avant de démarrer sa fermentation (il est probable qu'il soit légèrement muté). Puis est élevé 3 ans en barrique. La robe est d'un noir opaque. Le nez dégage des effluves de cassis, de truffe et de chocolat noirs, d'épices. La bouche est d'une grande densité, avec une "mâche veloutée", certes agréable, mais pas franchement sensuelle. Ceci dit, il cache très bien ses 180 g de sucres résiduels que l'on sent à peine. Les tannins et l'acidité (discrète) font bien leur travail. A essayer sur un dessert au chocolat et fruits noirs.

L'ami JJ s'est arrêté là. J'ai conclu pour ma part ma soirée sur une Bénédictine Single Cask rafraîchie par une bonne dose de glace pilée. Eh bien j'y prend goût, à ce breuvage local !

Bon, l'air de rien, il est 1h15 du matin, il fô peut-être aller se coucher...

Outch...tout ça à monter ???

(To be continued)

blog A boire et à manger   blog A boire et à manger  blog A boire et à manger