Il ne manquait plus à Toy Story du géant Pixar que la 3D pour asseoir définitivement sa renommée intergalactique. Et c'est aujourd'hui chose faite, avec ces adieux menés en virtuose par Lee Unkrich & co sous l'égide de John Lasseter. 2010 aura décidément clôturé bien des sagas emblématiques. Mais ceux de Woody, Buzz et Rex sont indéniablement les plus déchirants...
Il est étrange de dire adieu, le coeur noyé de larmes, en gardant néanmoins le sourire, les yeux pétillants de joie. C'est ce qu'a magnifiquement su inspiré Pixar avec cet ultime volet des aventures de Woody & cie, l'opus le plus marquant et le plus abouti de toute la trilogie.
Je peux bien vous l'avouer. La naissance de Toy Story, je l'ai vécu de très, très loin, ne m'interressant pas à l'époque aux films d'animation, trop occupée que j'étais à découvrir le cinéma d'aventures, de cape et d'épée (oui, j'ai eu l'aval suprême de mes parents assez tardivement). Lassée de mes classiques Disney, je me tournais donc vers Indiana Jones (là aussi, j'avais du retard) plutôt que vers Toy Story. Alors, bien sûr, je connaissais Buzz, je connaissais le cowboy (pas son nom, toutefois) et j'avais repéré le dinosaure vert avec son sourire enthousiaste, oui. Mais ça n'est que très récemment qu'il m'a été donné l'occasion de voir les deux premiers volets (quel bonheur, par moments, d'avoir un très jeune frère), que j'ai jugé épatants, malgré de sérieux a-priori de départ. Tout ça pour vous dire - oui parce que je n'ignore pas que le racontage de ma life, vous n'en avez rien à carrer - que s'il a été si bouleversant pour moi, fan récente de la joyeuse tribu de jouets, de prendre part à ses adieux, je n'ose imaginer ce qu'ont ressenti les officionados de la première heure... voilà quinze ans de cela.
Même si les deux premiers volets m'avaient énormément plu, j'allais tout de même à reculons voir celui-ci. Moins parce que je redoutais une histoire convenue que parce que je reste fâchée contre la systématisation grandissante de la 3D. En fait, je craignais que celle-ci soit le seul argument vendeur du film. Mais au bout du compte, il n'en est fichtrement rien.
J'écrivais il y a quelques jours une critique sur Ratatouille, du même Pixar, en sous-entendant clairement mon adoration du film et sa mise sur un piédestal. Aussi est-ce pour moi un choc de constater que Toy Story 3 a réussi le pari fou de détrôner Rémi le rat et sa toque au profit d'une bande de jouets en déroute.
Il y a fort longtemps que je n'avais ressenti autant d'émotions devant un dessin animé. Je devais encore être en couche-culotte, à l'époque. Pourtant, force est de constater l'immense maturité de ce film, à la fois lisible pour le jeune public, et puissamment évocateur pour les grands enfants que nous avons été. Le secret de Toy Story 3? Il a tout bon, et à tous les niveaux.
L'histoire d'abord. On aurait pu croire que le récit de la séparation inéluctable entre Andy, devenu un jeune adulte, et Woody, le cowboy au grand coeur, se révèlerait mièvre et pathétique jusqu'à un happy end libérateur. Même pas. Alors que le film commence sur les angoisses des jouets à la veille du départ d'Andy pour l'université - vont-ils être relégués au grenier, vont-ils être donnés ou même... jetés? - notre sympathie à leur égard n'a jamais été aussi forte, tant leur conciliabule sur leur existence vouée à l'amusement et leur fidélité à leur propriétaire est pertinente, et touchante. Mais, bien vite, avant que l'atmosphère ne soit plombée par trop de pessimisme et que nous ayons envie d'étrangler Andy pour ne pas souffrir du syndrome de Peter Pan, la situation bascule bien vite vers un bouleversement majeur, aux allures d'El Dorado et aux relans pestilentiels de traquenard savamment orchestré. Les jouets sont victimes ici d'un odieux complot, et jamais encore ils n'ont semblé si mal embarqués auparavant. Dés lors, au fil d'un scénario ample, parfaitement rythmé et dosé à l'alchimiste, la tension s'installe, tandis qu'une foule de sentiments divers et variés viennent nous titiller à la vision de scènes évocatrices.
Equilibre parfait entre comédie, drame et thriller, ce Toy Story a la saveur d'une grande évasion que l'on pressent périlleuse et chaotique, mêlé de drame en bonne et dûe forme, de ceux qui vous malmènnent le coeur et l'âme tout en vous ravissant les yeux. Et tandis que Buzz et Jessie organisent la fuite du pénitencier de Sunnyside sur fond d'idylle andalouse, on nous colle en sus LA rencontre entre Barbie et Ken, les états d'âme glaçants d'un clown plus triste que triste (doublé par Grand Corps Malade), un terrifiant poupon aux allures de videur, un ours à la fraise trop rose pour être clean, une réflexion sur le temps qui passe et nous éloignent de nos jeux de gosse, sur l'amitié, toujours, puissante et grandiloquente, sur la fidélité (à un enfant, à un jouet, à une famille, une maison...), et sur tellement d'autres choses encore qu'il serait difficile et fastidieux de toutes les lister sans craindre d'en omettre une seule. La réflexion est dense, ici, et la nostalgie dévastatrice. La vaillante cinéphile que je suis, nourrie aux coups bas et aux trahisons de tous bords par les thrillers de la pire espèce, a manqué de fondre en larmes à deux reprises devant tant de terribles épreuves imposées à la plus fabuleuse bande de jouets qu'on ait réunit en ce monde. Mais, pour ne pas affoler le bout de chou que j'accompagnais et qui, lui, n'avait nullement conscience de la nostalgie intense qui cernait son dessin-animé et profitait du spectacle, avide, j'ai ravalé mes sanglots avec moult peine, en sachant d'ores et déjà qu'ils sauront s'épancher devant le dvd.
Il y aurait encore des tartines de lignes à écrire pour encenser ce joyau de Pixar. Mais je me contenterais de l'essentiel: Toy Story 3 est juste, à ce jour, le meilleur film d'animation que j'ai vu depuis longtemps, dépassant même allègrement ce que je considérais comme LA bonne surprise de l'année: Dragons. Dense, mature, universel et splendide, la bande à Buzz a simplement tout pour elle... Et bon dieu, elle va nous manquer!
(Ahem, ça vous dérange si je pleure?)
*Indice de satisfaction: (++)
*1h40 - américain - by Lee Unkrich - 2010
*Cast: Tom Hanks/Jean-Philippe Puymartin, Tim Allen/Richard Darbois, Michael Keaton/Benoît Magimel, Joan Cusack/Barbara Tissier, Wallace Shawn/Henri Guybet, John Ratzenberger/Patrick Prejean...
*Genre: Les évadés de Sunnyside
*Les + : Un scénario lisible de 7 à 77 ans, mature, bien ficelé, rythmé à la baguette, superbement mis en images... Un sans faute.
*Les - : Bah... c'est la fin.
*Liens: Fiche Film Allociné
*Crédits photo: © Walt Disney Studios Motion Pictures