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Nous sommes Deux Fans (le père et le fils) et sommes des partisans de longue date des Carabins, mais également du football universitaire en général. Nous rédigeons 3-4 billets par semaine principalement sur les Carabins, mais également tout ce qui entoure le football universitaire québécois et ce qui peut intéresser les fans (tel que le tailgate). Étant donné que la couverture du football universitaire est très mince dans la région montréalaise, nous sommes l’endroit pour s’abreuver d’information sur nos Bleus et leurs rivaux.
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Nous re-publions ce billet parce que notre lectorat a triplé depuis l'an dernier et également parce qu'il est un de nos favoris et qu'il est le billet idéal pour débuter une saison de football
Avec le camp d'entrainement qui se termine, on se permet de ressortir un texte qui avait paru dans la revue IForum de l'UdM. Bien que datant de 5 ans, et traitant de la saison inaugurale des Carabins en 2002, il possède encore toute sa pertinence. Il est le texte que nous avons croisé qui décrit le mieux la réalité culturelle quotidienne des joueurs des Carabins. En effet, seuls les Carabins sont confrontés à une telle diversité culturelle parmi les équipes de la LFUQ. Et ironiquement, comme il arrive souvent avec les Carabins, cette expérience est relatée par un étudiant provenant de Québec: Vincent-Thomas Maher.
14 août 2002; je viens de me taper Québec-Montréal. Ma Géo-Métro tient le coup. Pour un gars qui commence l’université dans deux semaines, j’ai l’air relax. En fait, je suis stressé comme un puceau. À 19 h, j’irai au premier entraînement de l’histoire des Carabins. Je dépose mes affaires et mange un sandwich qu’il est déjà 17 h 30. Je dois y aller. Sur le chemin, je réalise que j’habite à cinq minutes du terrain. Heureuse constatation qui m’aide à canaliser ma nervosité.
Je suis en retard. Il y a beaucoup de bruit dans le vestiaire. Je tourne le coin. Je pénètre. Un petit groupe de joueurs en uniforme discutent; «grouille-toi, mec», me disent-ils pour la forme. J’exécute. Ils partent. Ils ne m’ont pas demandé mon nom. Des yeux, je cherche mon casier. Je le repère. Sur le chemin qui m’y mène, je sens qu’on m’observe. Je souris, j’ai l’air cool, mais je suis petit dans mes shorts. J’arrive à ma case. Mon voisin de gauche, Mangumgu Pati, a la carte d’Afrique pendue autour du cou. Il me salue, sans plus. Mon voisin de droite me fait peur. Il a l’air d’un vrai «thug»; 6 pieds 5, 250 lb, un foulard aux couleurs d’Haïti sur la tête et les écouteurs sur les oreilles. Je le salue, mais il ne me répond pas. Je n’insiste pas. Dans ce vestiaire, on parle français, anglais, franglais et créole. Je m’ennuie un peu de Québec. La minorité visible ici, c’est moi.
Les premières journées du camp sont dures. Je dois m’adapter, les autres aussi. Ça cogne fort au football universitaire. Chacun veut faire sa place. Il y a bousculade, escalade et intimidation. À la café, on sent vraiment le choc des cultures. C’est aussi simple que classique; les Noirs d’un bord, les Blancs de l’autre. Il y a des clans. Il paraît que c’est normal. Ce n’est pas ce que Jacques Dussault, l’entraîneur, semble croire. À la pratique suivante, il nous parlera, longtemps, du football mais aussi de la vie. Il s’adressera à de jeunes adultes qui, apprenant ce qu’est la différence, ont du mal à voir par delà les apparences. Il a compris ça, Jacques. C’est pourquoi il nous obligera à manger ensemble, en équipe. Je sais maintenant que l’emplacement de mon casier n’a rien d’aléatoire. Au souper suivant, on mange ensemble. Cela se passe bien, de mieux en mieux et, sur le terrain, on le sent. Je m’ennuie moins de Québec maintenant.
20 octobre 2002; dernière pratique de la saison. Je me sens nostalgique. L’année prochaine, certains ne reviendront pas. Dans un coin, Fritznel Casaneuve et Rodney Pierre taquinent les gars de Saint-Georges de Beauce sur leur accent d’habitant. Tout de suite, Samuel, un gaillard de 6 pieds 2, du Lac-Saint-Jean, défend ses compères des régions, en créole, oui monsieur! Les Haïtiens sont trop crampés pour répliquer. Ils rient fort, les Haïtiens. Ils vont me manquer. Greg, mon voisin de 6 pieds 4, 250 lb, va me manquer aussi. Il faisait du bon riz haïtien, Greg. Je suis sûr qu’il aurait aimé Québec.
21 octobre 2002; dernier match. Un genou au sol, main dans la main, nous attendons tous que Jacques nous fasse son speech. Il y a quelque chose de fort entre nous. De par nos différences, nous formons une équipe solide. Comme quoi, lorsqu’on partage un objectif commun, on en arrive à s’accepter, à s’apprivoiser, à se comprendre et parfois même à s’aimer. Saison difficile; 0 victoire et 7 défaites. Personne ne veut en perdre une huitième, mais peu importe, la vraie victoire est déjà remportée. Personne n’en parlera, mais tout le monde le sait. Je le sais. Je regarde Mangumgu Pati dans les yeux et je sais qu’il le sait. Les gars de la Beauce le savent. Ousmane Koly, Fritznel et Sanchez le savent. Les gars du Lac le savent, Greg aussi. Jacques nous regarde, tous. Il nous aime, Jacques. Aujourd’hui il n’y a qu’une couleur qui signifie quelque chose pour nous tous. Cette couleur, c’est le Bleu des Carabins de l’Université de Montréal. Jacques est heureux, nous aussi, «Buckle up. Let’s go», dit-il. Et ce fut un bon match...
Vincent-Thomas Maher, un étudiant en communication, l'a soumis à un concours portant sur les relations interculturelles au Québec. Les juges, des membres de la Commission canadienne des droits de la personne, lui ont accordé le premier prix.
Avec le passage du temps les instructeurs et les prénoms ont changé, on parle dorénavant de Marc Santerre et de Djems, Rotrand, Rudy, Zachary et Nadis, mais également d’Alexandre, de Mathieu, de Jean-Christophe (ça prenait bien un prénom composé) et de Olivier, cependant la trame de fond demeure la même...
Kick-off inaugural de la saison 2010 par Pierre-Paul, jeudi 2 septembre @19:00, 3 heures plus tôt pour le tailgate.
Photo de l'édition originale des Carabins 2002 - gracieuseté de l'Université de Montréal
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