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Une forme de vie - Amélie Nothomb - Albin Michel

Par Lescalelitteraire

nothomb-vie.jpgIl est de notoriété publique qu'Amélie Nothomb reçoit de nombreuses lettres chaque jour, chez son éditeur. Elle entretient, avec certaines personnes, une correspondance régulière. Dans "Une forme de vie", elle ouvre la porte de son bureau et raconte, non sans humour, la teneur de certaines missives pour le moins effrontées : demandes en mariage, demandes de "pistons" pour la publication d'ouvrages, demandes d'argent, etc... Mais Amélie Nothomb raconte aussi quel plaisir elle prend à entretenir, plus ou moins sur la durée, certaines relations épistolaires.

Parfois, les lettres qui lui parviennent sont intéressantes, amicales (les plus courtes sont les meilleures : selon Amélie Nothomb, plus d'une page A4 recto-verso c'est trop), mais il arrive aussi qu'elles s'avèrent stupides, menaçantes ou carrément grossières. On imagine aisément que cela arrive à d'autres artistes connaissant ce qu'elle qualifie de "relative notoriété", des chanteurs, des présentateurs de télévision, ou autres. L'auteur oscille entre plusieurs sentiments, inspirés par toutes ces lettres (jusqu'à 2000 correspondants !). Cela lui fait plaisir, peur aussi parfois. Elle reste très souvent incrédule et pratique le "classement vertical" des lettres inopportunes. 

C'est le coeur de ce nouveau roman. Contrairement à son roman de l'an dernier "Le voyage d'hiver", Amélie Nothomb revient à un écrit autobiographique et se met donc en scène. Elle égrène les différents types de correspondances qu'elle entretient... ou pas ! Elle ajoute à tout cela une partie complètement fictive. Un jour, elle reçoit une lettre d'un soldat américain, Melvin Maple, deuxième classe basé en Irak.

Extrait : Chère Amélie Nothomb, Je suis soldat de 2e classe dans l’armée américaine, mon nom est Melvin Mapple, vous pouvez m’appeler Mel. Je suis posté à Bagdad depuis le début de cette fichue guerre, il y a plus de six ans. Je vous écris parce que je souffre comme un chien. J’ai besoin d’un peu de compréhension et vous, vous me comprendrez, je le sais. Répondez-moi. J’espère vous lire bientôt.

Melvin Mapple Bagdad, le 18/12/2008

Je crus d’abord à un canular. À supposer que ce Melvin Mapple existe, avait-il le droit de m’écrire de telles choses ? N’y avait-il pas une censure militaire qui n’eût jamais laissé passer le «fucking» devant «war» ? »

Intriguée par la missive, elle lui répond et un véritable échange va commencer. Elle apprend que ce soldat, obèse, est loin d'être le seul dans l'armée américaine à souffrir de troubles alimentaires provoqués par le stress. Un nouveau scandale ? Elle essaie d'en savoir plus et les échanges vont aller bon train. Jusqu'à un judicieux coup de théâtre...

Il est beaucoup question d'excès dans "Une forme de vie", qui rappelle "Robert des noms propres" ou "Biographie de la faim" où elle évoquait l'anorexie.

L'équilibre est difficile à trouver également en ce qui concerne ses relations avec ses lecteurs : « Il en va du courrier comme de n'importe quoi : l'excès est aussi insupportable que la carence. »   


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