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PS : une unité affichée pour cacher une absence de projet

Publié le 30 août 2010 par Hmoreigne

 L’unité dans l’atonie. Hormis le cours réveil des militants lors de l’intervention de Ségolène Royal, le cru 2010 de l’université d’été du PS aura été à l’image du discours de clôture de sa première secrétaire : ronronnant et incantatoire. Si les querelles de personnes sont restées dans les placards, le bouillonnement des idées également. Le plus grand danger pour la principale force d’opposition serait de rester dans son actuel état de léthargie intellectuelle en pensant que le seul rejet du sarkozysme sera la clé de la victoire en 2012.

Toujours évoqué mais toujours repoussé à une échéance ultérieure, le projet socialiste prend des allures d’arlésienne. L’affirmation de Martine Aubry selon laquelle, “en 2012, nous serons prêts”,  revêt l’aspect d’un pari risqué. Soufflant faussement le froid Christophe Borgel, secrétaire national chargé de la vie des fédérations et des élections, a eu beau déclarer aux journalistes de LCP avec un air de jeune fille gênée que, “le PS ce n’est pas la chronique d’une victoire annoncée”, une majorité de responsables socialistes pense le contraire.

L’idée selon laquelle le plus simple pour assurer l’unité serait d’éviter d’aborder le fond et les questions qui fâchent est certes confortable mais, particulièrement dangereuse. Elle laisserait certes une grande liberté au candidat issu des primaires mais surtout un laps de temps très court pour finaliser son programme. Or, c’est bien dans le détail que se cache le diable. Nicolas Sarkozy ne manquera pas de s’engouffrer dans cette brèche pour tenter de démontrer, à l’image de ses observations sur les contrepropositions socialistes en matière de retraites,  l’absence de crédibilité de son adversaire.

On rétorquera que Martine Aubry a remis le PS au travail. C’est vrai. Le laboratoire des idées confié à Christian Paul mène son petit bout de chemin et retisse des liens avec les intellectuels de gauche mais, le travail est énorme pour constituer après des années de disette un nouveau socle idéologique et le faire partager à l’ensemble du parti.

Face à un adversaire qui n’est plus à un mensonge près, le projet socialiste 2012 devra être béton d’autant que les Français, échaudés par les promesses non tenues du candidat de la rupture seront vigilants sur le caractère réaliste des mesures proposées.

Conscient de cette difficulté, François Hollande aurait souhaité un autre calendrier que celui arrêté par Solférino avec un candidat socialiste désigné beaucoup plus tôt. Début juin sur France Inter, le député de Corrèze avait estimé qu’ “on ne vient pas au dernier moment dans une campagne présidentielle quasiment sans préparation face à Nicolas Sarkozy”.

Agacée par cette petite musique rejouée à La Rochelle, la Maire de Lille a sèchement répondu par la négative :“on garde notre calendrier, n’en déplaise à tel ou tel qui, à partir de petites phrases trouvées je ne sais où, explique autre chose”.

Martine Aubry reste arc-boutée sur les échéances qu’elle a fixé. Fin 2010 : deux conventions thématiques (international et égalité réelle). En 2011 constitution du programme et choix du candidat (dépôt des candidatures  pour les primaires en juin et un vote à l’automne). A partir  du moment  pourtant où le projet et le candidat sont intimement liés, retarder le choix du candidat laisse planer un doute dangereux et justifié dans l’opinion sur l’existence du projet.

Concernant le fond justement, Stéphane Alliès de Mediapart note que la question européenne est passée au second plan dans les échanges de La Rochelle. “La fracture du référendum sur la constitution européenne semble bien loin, et l’on a surtout assisté à des effets de manche incantatoires et à des diagnostics volontaristes, plutôt qu’à une vraie pensée en cours de construction”.

La construction européenne justement, les socialistes français semblent l’abandonner au PSE et au parlement européen sans s’interroger sur la justesse de l’orientation actuelle. Dans son discours de clôture, Martine Aubry ne s’est guère faite plus précise, évoquant en référence à son père “L’Europe, c’est la concurrence qui stimule, la coopération qui renforce, la solidarité qui unit”, pour constater sans dessiner de méthode pour y remédier “que seul le premier terme a été pleinement mis en place”.

A lire Stéphane Alliès, le traitement de la question sociale ne relève pas le niveau. En charge de la convention sur l’égalité réelle Benoît Hamon paraît incapable de sortir des beaux discours dont la mise en oeuvre reste un mystère. Illustration avec le devoir de “lutter contre le déclassement et améliorer l’égalité des places, en réduisant l’amplitude de la hiérarchie sociale” ou encore “la création de nouvelles allocations, comme un “droit aux vacances” pour tous” sans oublier “une révision de l’organisation de la médecine libérale dans ce pays, en la régulant et en imaginant une carte sanitaire permettant à chacun d’avoir autant de chances d’être soignés, où qu’il habite.”

Bof, bof , bof. Trois fois bof d’autant que la question centrale de l’économie de l’emploi et des finances publiques, nerf de la guerre, reste inabordée. Sauf à considérer que DSK, grand financier de la gauche et de la planète a déjà la réponse et qu’il est donc l’homme providentiel.

La grande force du directeur du FMI c’est que son silence permet à tout un chacun de s’y projeter et de s’y retrouver. Sa grande faiblesse c’est comme le dit Yvan Rioufol, d’être le clone de Nicolas Sarkozy. L’un est social-libéral l’autre, libéral-social. Somme toute, le navire France serait condamné à aller de Charybde en Scylla.

Dans ce paysage monotone, Ségolène Royal est l’une des rares à apporter par son mysticisme, ses propositions atypiques et sa capacité à retranscrire le pouls de l’opinion, un peu de couleur et de rêve (vidéo 1).

Avec une intelligence très intuitive, la Présidente de Poitou-Charentes a compris que si on ne peut pas apporter une nouvelle vision de l’organisation du monde quand l’actuelle touche à sa fin, il faut au moins offrir l’espérance.

Citant Jaurès dans son discours d’ouverture de l’université de La Rochelle l’ancienne candidate des socialistes a rappelé que, “La peur resserre et l’espérance dilate”. “C’est une façon de dire que, dans une nation qui n’a pas confiance en elle, chacun se méfie de l’autre alors que l’espérance fait triompher la solidarité, l’espérance permet de faire la France.” Tout un programme.

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