Etudiants : Sarkozy fait volte-face sur le cumul aide au logement et demi-part fiscale

Publié le 28 août 2010 par Letombe

Annoncée officiellement début juillet, la suppression du cumul entre les aides au logement étudiant et la demi-part fiscale proposée à leurs parents est finalement écartée. Une victoire pour les syndicats et les étudiants, qui en dit long sur la difficulté que va avoir le gouvernement à respecter ses engagements en matière de réduction de la dépense publique.

Le gouvernement n’est pas au bout de ses peines pour réduire le déficit public. Le mois d’août n’est pas encore achevé qu’il se voit déjà contraint de renoncer à certaines mesures d’économies budgétaires annoncées en juillet.

A l’issue d’une rencontre hier avec la ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, Nicolas Sarkozy a officiellement renoncé à interdire, pour les étudiants et leurs parents, le cumul entre les aides personnalisées au logement et la demi-part fiscale pour enfant à charge. Le président de la République a hésité jusqu’au dernier moment entre la modulation du non-cumul en fonction des revenus des parents (« Les Echos » du 25 août) et sa suppression pure et simple. La seconde avait le mérite d’être plus lisible, même si elle prive l’Etat de plusieurs centaines de millions d’euros, selon Bercy (423 millions selon le premier syndicat étudiant, l’Unef)

650.000 bénéficiaires
Cette somme devait contribuer à la réduction des dépenses d’intervention (aides aux entreprises, aides sociales, etc.), à hauteur de 5 % l’an prochain et de 10 % sur trois ans. Mais la fronde des syndicats étudiants et autres associations familiales ont eu raison des arguments budgétaires. De fait, l’aide au logement, accordée à tous les niveaux de revenus, est souvent la seule allocation perçue par les étudiants des classes moyennes. Au total 650.000 étudiants en profitent aujourd’hui, pour un montant moyen d’environ 200 euros par mois. Et 80 % d’entre eux sont aussi rattachés au foyer fiscal de leurs parents, ce qui permet à ces derniers de déduire une demi-part fiscale supplémentaire.

Selon les simulations faites par le sénateur UMP de Seine-Saint-Denis, Christian Demuynck, très opposé au non-cumul, la mesure aurait particulièrement pénalisé les classes moyennes. Ainsi, d’après ses calculs, un foyer fiscal avec deux étudiants gagnant 4.800 euros brut par mois aurait subi une perte annuelle de plus de 1.685 euros en choisissant l’aide au logement et de 3.400 euros en choisissant la demi-part fiscale. C’est ce tableau de simulations qui a achevé de convaincre Valérie Pécresse, à qui Bercy avait refusé de donner toute estimation de l’économie qui aurait pu être réalisée. C’est avec ce même tableau qu’elle est venue plaider contre cette mesure, hier matin, auprès de Nicolas Sarkozy. « Nous voulons que plus aucun étudiant ne limite ses ambitions parce qu’il n’en aurait pas les moyens », a-t-elle défendu lors d’une conférence de presse. L’entourage de François Baroin, ministre du Budget, tente de faire bonne figure : «  C’est un processus en entonnoir. Il est normal que certaines mesures soient abandonnées au cours de l’été. »

Un précédent dangereux
Outre les organisations étudiantes -qui menacent de participer massivement aux manifestations du 7 septembre -, ce sont les élus de la majorité qui ont achevé de convaincre le président de la République. « La mesure avait beaucoup d’opposants à droite », témoigne un conseiller gouvernemental. Les principaux syndicats étudiants, l’Unef et la Fage, se sont réjouis de « ce recul du gouvernement ». « Dans le contexte actuel, [cette mesure] aurait généré une dégradation sans précédent des conditions de vie des étudiants », a souligné hier le président de l’Unef Jean-Baptiste Prévost. « C’est une victoire pour la CFDT, qui avait fustigé cette mesure d’économie injuste et inefficace », a réagi le syndicat.

Les tenants de la rigueur budgétaire, eux, ne décolèrent pas. Ils jugent le cumul entre ces deux avantages excessivement généreux, puisqu’il profite aussi aux familles les plus fortunées. «  Le centrage des aides sur les étudiants boursiers reste une nécessité impérieuse tant au regard de la justice sociale que de la situation des finances publiques », avait indiqué la Cour des comptes dans un récent rapport. En faisant machine arrière, le gouvernement crée en outre un précédent dangereux pour tous les lobbys qui espèrent échapper à l’effort de rigueur, estimé à 100 milliards d’euros d’économies sur trois ans.

JESSICA BERTHEREAU ET LUCIE ROBEQUAIN, Les Echos

merci à Section du Parti socialiste de l'île de ré