Le 15 août 2010, les journalistes Mathilde Mathieu et Michaël Hajdenberg signent sur Mediapart un article relatif à un emprunt de 6500 euros contracté par Eric Woerth pour financer sa campagne municipale de 2008. On peut y lire que le ministre a dû remplir un formulaire d’emprunt dans lequel il a déclaré ses revenus, ses salaires, ses emprunts en cours, et le montant de ses impôts sur le revenu. Mediapart publie une copie de ce document dans lequel Eric Woerth se présente comme ingénieur cadre technicien, mentionne 3.000 euros de revenus mensuels et ne déclare aucun impôt sur le revenu. Il en ressort que le demandeur dispose pour lui-même de 112 euros par mois pour vivre, avec un taux d’endettement de 89%. Curieusement, le prêt a été accordé et la signature du ministre atteste qu’il certifie complets, exacts, sincères et véritables les renseignements fournis.
Etonnamment, cette information a réussi à briser le mur de silence qui arrête d’ordinaire tout ce qui pourrait troubler la quiétude de nos gouvernants. Aussitôt l'entourage du ministre proteste, estimant que « chaque Français comprendra à nouveau l'absurdité de ces allégations ». De son côté, le Crédit Agricole Brie Picardie s’élève contre des « allégations ou interprétations qui pourraient vouloir être tirées d'un document de travail purement provisoire et ne représentant aucun caractère contractuel » et qualifie cette opération tout à fait de tout à fait « banale ». Jamais à court d’outrance, Dominique Paillé, porte-parole adjoint de l’UMP, a dénoncé « l'acharnement abject dont Eric Woerth est la cible, basé sur des montages farfelus, fabriqués de toutes pièces et qui n'ont qu'un objectif: abattre un ministre qui fait bien son travail ».
Mediapart a répondu dès le lendemain, affirmant persister et signer. Ce que M. Paillé appelle des montages a été obtenu par les journalistes auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. La banque, quant à elle, a osé prétendre qu’il ne s’agissait que d’« un document de travail purement provisoire et ne présentant aucun caractère contractuel » alors que le ministre lui-même a signé, paraphé et versé à ses comptes de campagnes ce même document ! Par contre, le ministre, reconnaissant l’authenticité de ce document, a expliqué à l’AFP que « les revenus mentionnés correspondent aux revenus arrondis perçus en tant que maire. Il s’agit d’un prêt lié à des élections municipales, c’est donc tout à fait cohérent.» Mais il n’a pas daigné répondre aux questions posées par Mediapart. Etrange de la part d’un homme si sûr de son intégrité !
Pour le coup, le mur de silence s’est refermé. Je n’ai entendu aucune mention de la réponse de Médiapart. La bave de Paillé et la morgue insolente de Woerth demeurent.