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La petite Bill et le petit caporal de centre commercial

Publié le 26 août 2010 par Sheumas

« Il voulait Molène en mer d’Iroise, les coffres rouillés, les baleines, les belles sournoises, les grands voiliers mais il promène sa vie en Saône et Loire dans sa Simca rouillée »

   Ces quelques vers de « le Marin » préludent assez bien à cet article dont le titre cherche à rendre compte de l’univers des chansons de Souchon. Souchon avance en effet dans ce domaine comme certains de ces écrivains qui créent leur univers propre en variant la même thématique. Au fil des œuvres, le lecteur retrouve « le sol » de ce que Proust qualifie de « planète unique à chaque artiste ».

   Appuyons-nous sur deux exemples particulièrement « fondateurs » : « la petit’Bill » et « Le Bagad de Lann Bihouée »... ils datent tous les deux des années 70-80. Pourtant, si on en épluche les thèmes, ils font écho à des textes beaucoup plus récents « Tailler la zone » ou « le Marin » ». Le « je » de Souchon occupe le centre de ses chansons, un peu comme Woody Allen jouant dans ces rôles mélancoliques et burlesques dont les personnages lui ressemblent étrangement....

   Belles idées, tempérament romanesque, clichés romantiques, et à chaque fois désillusion, rêves brisés, cochonneries de consommation qui se combinent à « la grande aventure tintin » ! « La Ptit’Bill elle est malade »… Madame Bovary est l’aînée de la petit’Bill : comme elle, « elle a trop lu de littérature »… Mais Bill est une enfant de la société de consommation et ce milieu est un facteur aggravant qui produit l’effet burlesque. Souvenons-nous du roman de Flaubert : le Rodolphe d’Emma lui semble un de ces « cavaliers au grand coeur à bottes doublées de velours ». Chez Souchon, il mute en « petit caporal de centre commercial, moche en moustaches, en laides sandales ».

   Ce héros romantique attardé a recyclé dans un espace piteux son rêve de cornemuse et ses « soixante kilos d’échevelé poète ». Rodolphe « a débordé de son jean », il a changé son avatar, parce que « la groupie fait de la bonne cuisine ». La petit’Bill de la « foule sentimentale », « la belle danseuse » n’est pas épargnée non plus… Mais elle garde au fond de sa mémoire ses rêves d’héroïsme, « cet œil profond d’hidalgo tango, ces joues creusées de guerillero »… « L’albatros patauge dans l’ice-cream » : tout est dit... l’aventure est emballée et quelque chose comme le spleen baudelairien alimente le sourire caustique de « l’espadon dans sa baignoire » !…

Aix (11) [1600x1200]


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