Sois soumis, mon chagrin, puis dans ton coin sois sourd.
Tu la voulais la nuit, la voilà, la voici:
Un air tout obscurci a chu sur nos faubourgs,
Ici portant la paix, là-bas donnant souci.
Tandis qu’un vil magma d’humains, oh, trop banals,
Sous l’aiguillon Plaisir, guillotin sans amour,
Va puisant son poison aux puants carnavals,
Mon chagrin, saisis-moi la main; là, pour toujours,
Loin d’ici. Vois s’offrir sur un balcon d’oubli,
Aux habits pourrissants, nos ans qui sont partis;
Surgir du fond marin un guignon souriant;
Apollon moribond s’assoupir sous un arc,
Puis ainsi qu’un drap noir traînant au clair ponant,
Ouïs, Amour, ouïs la Nuit qui sourd du parc.
(Georges Perec)
posté le 28 janvier à 13:15
Paix d'un animal
Un triton fait son nid dans un plasma dormant Qui s’accroît plus haut qu’un canal coulant ici ; Il vit ainsi, captif, loin d’un urbain roman, Sans affliction, sans cri, sans chagrin, sans souci.
Son voisin fait un fil inactif, mais charmant ; Aux animaux s’offrant sous un jour adouci, Ni fulminant, ni noir, ni dur, ni alarmant, Nul jour par son action tari, ni raccourci.
Loin, fort loin, franchissant un sol à l’abandon, Portant un joli son, la chanson du bourdon, Au matin, dans l’azur, au mitan du grand parc ;
Un piaf au ton saphir au bord du flot chanta ; Du triton pur cobalt l’audition s’aimanta, Apprivoisant l’amour, ainsi qu’a dit Saint Marc.