"J'ai ouvert mon sac avec mes doigts gourds, pour en sortir le papillon...Ah, c'était bien lui. Aucun doute, je l'avais pris dans la main de cette femme. Soyeux comme de la mousseline, les cils transparents, le pollen humide. ...Je l'ai approché de mon oreille... J'entends. J'entends le bruit. Le bruit discret de la respiration de mon bébé entre les replis. Ce bruit qui petit à petit, chaque jour, inexorablement, se précise. Jusqu'où la température de ton corps va-t-elle augmenter? Jusqu'où vas-tu ouvrir mon intérieur? Alors que ce n'est même pas mon véritable moi. ...La fille de la photographie se retourne. Ses cheveux ondulent. La colère monte comme des contractions. Je referme brusquement la main. En un instant le papillon se transforme en poussière. Il reste une douleur lancinante. Les fragments tombés de ma main s'éparpillent sur le calendrier. "
L'essentiel du récit me semble rassemblé dans ce passage: l'interrogation sur l'identité des êtres vivants, le passage obligé de la vie à la mort, les périodes de transition, naissance et mort, croissance et disparition progressive de la conscience, de la mémoire, des gestes du corps, transformation, écoulement, métamorphose, le temps qui passe, qui détruit et renouvelle aussi.
Un beau récit sur les question essentielles. Qui sommes-nous qui nous sentons vivants? Qu'est-ce que la réalité? La normalité? La folie?
Entre "cet extrait de vivant qui palpite au plus profond" d'elle-même et cette vieille femme si aimeé qui s'en va, elle se sent perdue:"Ne pas être fixés sur notre sort nous désoriente parfois complètement, comme si nous tombions dans un trou d'air."J'ai aiméDe plus en plus de récits apparaissent en ce moment sur la question de la personne dépendante placée en maison spécialisée. Dure réalité!La désagrégation du papillon de Yoko Ogawa, , Œuvres
Ttome 1, (Thésaurus, Actes Sud, 2006, 906 p)La désagrégation du papillon, premier texte, de la page 11 à la page 44Traduit du japonais par Rose-Marie Makino. publication au Japon en 1989Photographie de couverture: "La Mariée thé vert" (détail), autoportrait 2006 par Kimiko Yoshida.