Skellig

Par Vanessav

Je connais David ALMOND par son livre magnifique"Le sauvage" illustré par Dave McKEAN. Je m'attendais à de la finesse du propos dans "Skellig". Je n'ai pas été déçue même si la part fantastique est un peu plus présente dans ce roman là.
Mickaël a déménagé avec sa famille dans une nouvelle maison anciennement habitée par un vieux monsieur. Tout est à refaire, la maison, le jardin et aussi la garage. C'est aussi une étape de vie, la famille s'est agrandie, une petite sœur est arrivée, elle n'a pas encore de nom et se bat pour vivre. La maman est souvent avec elle à l'hôpital et le papa bricole pour que la maison soit prête pour leur retour. Le jeune garçon n'a aucune envie d'être là, dans cette maison en ruine et ce garage qui tombe en miettes. Il lui est défendu d'aller le visiter d'ailleurs mais l'envie est trop forte: dans les décombres, les débris, les toiles d'araignées, il découvre une ombre, un homme, décharné, peut-être mort ou mourant, blanc, qui gobe les mouches.


Il faut que cet habitant parte, tout va s'écrouler sur lui et le garage va être refait. Mickaël veut l'aider... mais qui est-il? Qu'est-il? Il trouvera en sa jeune voisine, Mina, une alliée de choix.


"- [...] Moi, je suis malade comme un chien.- Calcifiés. L'os durcit comme de la pierre. Le corps entier se change en pierre.
Elle lui effleure les mains. Elle remonte les manches crasseuses pour palper les poignets enflés. Elle murmure:
Il glousse.
- Pas aussi sotte qu'elle en a l'air.
- En même temps, reprend Mina, l'esprit aussi durcit. Il arrête de penser, d'imaginer. Il devient comme de l'os. Ce n'est plus un esprit. C'est un bloc d'os dans une coque de pierre. C'est l'ossification."

Derrière cet étrange personnage se faufile des thèmes comme la mortalité, la vieillesse mais aussi la naissance et les accidents ou la fragilité de la vie. La relation frère/sœur est aussi à ses débuts, entre jalousie, émotion et envie d'être le sauveur.


Et puis comment ne pas être sensible à la pédagogie. Mickaël est scolarisé. Il est accompagné par ses copains, joue au foot et, en cours, réponds à des questions fermées et est très dirigé. Mina, elle, fait l'école à la maison, avec sa maman. Elle est souvent perchée dans un arbre de son jardin, ou sur une couverture au pied de l'arbre, elle dessine, peins, écrit son journal, modèle et observe, écoute la nature.


- Tu vois comme l'école t'enferme! Des sciences nat, pas du tout. Je dessine, je peins, je regarde, je lis. Je sens le soleil et l'air sur ma peau. J'écoute le merle. Je m'ouvre l'esprit. L'école, tu parles!
Elle saisit un livre sur sa couverture, l'ouvre et me dit:
- Écoute.
Elle s'assied bien droit, toussote pour s'éclaircir la voix et lit:


Mais aller à l'école par un matin d'été,
Oh! Voilà qui tue toute joie;
Par un œil cruel harcelés,
Les petits passent la journée

A soupirer de désarroi.


Elle referme le livre.
- William Blake. Encore. Tu as entendu parler de lui, au moins?

- Il était peintre. Graveur, aussi. Et il écrivait des poèmes, en plus. Les trois-quarts du temps, il ne portait pas de vêtements. Il voyait des anges dans son jardin."


Les notions d'ornithologie ponctuent le texte, lui donne une ligne et une ampleur. Skellig ressemble un peu à l'un d'eux, peut-être, et puis les omoplates sont là, signes d'anciennes ou futures ailes humaines.
Les rêves de Mickaël suivent la réalité de sa vie et s'entremêlent avec la vie des oiseaux, sa petite sœur comme l'un d'entre eux. Le livre ouvre la voie sur d'autres choses encore.


Une petite merveille! Et puis je suis tellement d'accord avec beaucoup de propos sur l'enseignement et la découverte de William BLAKE cité souvent est d'un bonheur constant. Pour le plaisir, je vous laisse la représentation de Perséphone de Dante Gabriel ROSSETTI... personnage secondaire du récit, ramenant l'énergie après l'hiver.

Lily vous propose un très beau billet tout aussi mystérieux.