Posté par clomani le 24 août 2010
Malgré les nombreux déplacements pour assister et diriger les réunions à droite et à gauche dans l'Etat de Tlaxcala, l'équipe de la CNUC employait ses loisirs à participer à la vie et aux fêtes locales. Elles ne manquent d'ailleurs pas ! J'ai pu voir combien les Mexicains étaient prompts à la gaieté, même les catégories les moins favorisées représentées par les Indiens.
Mon arrivée à Tlaxcala a correspondu au début du Carnaval. Ca se passe en gros fin février, et chaque ville a sa propre organisation et son propre costume pour défiler. Luz voulant vraiment m'introduire aux us et coutumes typiquement mexicains, a décidé que nous irions visiter un ami très cher vivant dans un gros bourg sur la route de Vera-Cruz à Tlaxcala. Il avait été désigné « président » du Carnaval par les citoyens de sa ville. J'allais donc être aux premières loges.
C'est une fête de mecs (seuls les hommes défilent) où les femmes font un travail de titan, comme d'habitude
). Chaque ville fêtant carnaval a son propre costume, entièrement brodé par les mères ou les épouses. En l'occurence, le costume de la ville en question représentait des roses écloses sur un fond marron-beige. Gilet à manches et pantalons doivent être brodés ! J'en ai vu un de près : les roses et le fond étaient faits de petites paillettes, minuscules « sequins » cousus sur le tissus une fois coupé, après avoir été assemblé ! La femme du compagnon m'a dit qu'elle avait mis 6 mois à faire le costume du « petit dernier » qui avait 8 ans et s'apprêtait à fêter son premier carnaval avec ses aînés. Dans chaque ville, un président du carnaval est désigné par la collectivité, afin d'organiser au mieux les défilés et surtout de sustanter tous les participants aux défilés, tous les soirs ! Dur d'être une femme dans un tel pays de machos !Le défilé commence un jeudi je crois… sur le coup de 20h car il faut que tous soient rentrés du travail. Les hommes du village, tous costumés , portant chapeau et masques s'appellent ici « los Franceses ». Tous les masques sont identiques : un visage rose très lisse portant une fine moustache… (héritage des troupes de Français accompagnant Napoléon III). Sauf un : un masque féminin, porté par un homme déguisé en femme, appelée la « Néné » : si ses compagnons marchent d'un pas lourd derrière la fanfare répétant en boucle le même morceau, la Néné est là pour faire le fou, amuser la galerie et apostropher le public. C'est le provocateur, censé certainement représenter la vengeance du peuple indigène dominé se moquant de ces « Franceses » militaires au pas lourd.
Sur le coup d'une heure du matin, la fatigue commençant à se faire sentir (d'autant que les costumes sont très lourds), la fanfare et les participants s'arrêtent et vont casser la croûte à coup de tamales chez le Président. Quant aux enfants, ils vont se coucher tard mais ils ont école le lendemain.
La fête dure 3 ou 4 jours, tous les soirs, jusqu'au mardi gras où c'est une apothéose de pétards, de feux d'artifice (les Mexicains adoooorent ça) et de flonflons. Car partout les Mexicains sortent le soir pendant ces fêtes de carnaval. C'est un peuple qui occupe ses espaces communs, les jardins, les places publiques et promènent leur petite famille. Même à Mexico, les gens s'installent sur l'herbe des jardins publics, faute de bancs plus nombreux… Inutile de dire qu'à la moindre festivité, ils sont tous dehors ! Pour en revenir au Carnaval, si vous voulez dormir avant 3 ou 4h du matin pendant les 5 jours où il dure, il faut le faire le mercredi des Cendres. Là, tout est calme. Plus de fête. Plus de lumière. Plus de pétards. Plus de costume, plus de grosse bouffe, plus de bals avec des sorties très alcoolisées (j'ai pu voir deux compères soutenir difficilement leur copain complètement ivre-mort, tenant péniblement debout, et tenter de le ramener chez lui).
C'est d'ailleurs ce soir-là que Roberto, le fils de Luz qui conduisait la VW nous ramenant du bal (à 6 dans une petite VW) nous a fait « le coup de la panne d'essence « , au beau milieu de ce plateau désertique éloigné d'une bonne 60taine de kilomètres de Tlaxcala ! Nuit noire, plantés au milieu de nulle part. Les 5 autres morts de rire, moi pas du tout. Doublés par une voiture pendant que nous nous perdions en conjectures du genre : on a un jerrycan mais où est la station d'essence la plus proche etc. je dis alors à mes compagnons d'infortune : « on peut arrêter la prochaine voiture qui passera et demander au conducteur si l'un de nous peut monter à bord avec un jerrycan ».
Eclat de rire général de mes cinq compagnons. « Ils ne s'arrêteront pas ! Bien trop peur de se faire attaquer ». Moi, insistante « mais si, vous allez voir, si c'est moi, avec mon air de touriste, ils n'auront pas peur ». Une voiture arrive à toute vitesse… je sors et me mets au milieu en gesticulant. Au lieu de ralentir, la bagnole a manqué m'écrabouiller ! Retour penaude dans la VW sous les rires, j'ai donc dû relativiser l'incident, même s'il commençait à faire sérieusement froid. Ils sont partis à trois à pied, le jerrycan à la main, en direction de la station d'essence censée être en gros à 6 km. Je suis restée avec le couple d'amoureux : Martina (la Flaca) et son chéri… Nous avons bien dû attendre deux bonnes heures (12 km aller et retour) dans un froid glacial ! Une fois repartis, il a fallu s'arrêter à la station service -heureusement ouverte-.
Nous sommes arrivés à la maison sur le coup de 7h du mat. C'est là que Luz nous a annoncé qu'elle n'avait pas pris le bon jeu de clés ! Impossible d'entrer dans le patio (au très haut portail) ! J'ai alors eu ma seconde leçon de « relativisation rigolarde »… Roberto a réussi à escalader un des côtés de la maison et à retomber de l'autre côté dans le patio. Où Diego, le rotweiler pourtant gentil comme tout, lui a mordu la main le prenant pour un cambrioleur… D'aucuns vont encore dire que je n'ai pas visité les sites archéologiques… je l'ai fait, mais à quoi bon raconter ce qui est bien mieux expliqué dans les guides touristiques ou dans des ouvrages archéologiques ? Je préfère vous faire partager ces moments où j'ai pu toucher de près cette incroyable faculté d'être joyeusement insouciant, typique de ce petit peuple mexicain qui m'est devenu si cher. Je pensais terminer mais je voudrais faire une « spéciale mort » puisque les Mexicains ont une culture étonnante de la mort.